Un vent de changement semble souffler sur le Nigeria. Alors que les arrestations massives de manifestants, dont de nombreux mineurs, avaient soulevé une vague d’indignation dans le pays, le président nouvellement élu Bola Ahmed Tinubu vient d’ordonner leur libération immédiate. Cette décision, annoncée ce lundi par le ministre de l’Information Mohammed Idris, marque-t-elle un tournant dans la gestion des mouvements sociaux par les autorités nigérianes ?
Des images qui ont choqué le Nigeria
Tout a commencé début août, lorsque des manifestations contre la vie chère et la mauvaise gouvernance ont éclaté dans plusieurs villes du pays. La réponse des forces de l’ordre a été brutale : selon Amnesty International, au moins 21 personnes ont été tuées et plus de 700 arrêtées. Mais ce sont surtout les images de mineurs détenus dans des conditions déplorables qui ont fait le tour des réseaux sociaux vendredi dernier, suscitant un tollé général.
Sur ces vidéos choquantes, on peut voir de jeunes adolescents en état de grande détresse, certains s’évanouissant même dans un tribunal d’Abuja où ils avaient été conduits après leur interpellation. Des scènes insoutenables qui ont relancé le débat sur les violences policières dans le pays, deux ans seulement après le mouvement EndSARS qui avait secoué le Nigeria.
Vives réactions de la société civile et de la classe politique
Face à ce qu’ils considèrent comme une atteinte aux droits humains les plus fondamentaux, de nombreux activistes et hommes politiques ont fait entendre leur voix. Sur les réseaux sociaux, les appels à la libération des jeunes détenus se sont multipliés, tandis que des rassemblements étaient organisés devant les tribunaux.
C’est une honte pour notre démocratie. Aucun enfant ne devrait être traité de cette manière, quelles que soient les circonstances.
Muhammadu Gimbiya, député de l’opposition
Sous pression, le président Tinubu, arrivé au pouvoir en mai dernier, a donc fini par réagir. Selon le ministre de l’Information, il a exigé que “ces enfants, ces mineurs, soient libérés immédiatement” et a promis que “des mesures disciplinaires” seraient prises contre les responsables de ces arrestations.
La police nigériane sur la sellette
Car au-delà du sort des jeunes manifestants, c’est bien le comportement des forces de sécurité qui est pointé du doigt. Malgré les dénégations du porte-parole de la police assurant qu'”une aide médicale a été rapidement apportée” aux détenus malades, nombreux sont ceux qui dénoncent la persistance des violences et de l’impunité policières.
Des accusations qui font écho aux revendications du mouvement EndSARS, né en octobre 2020 après la mort d’un jeune homme tué par des agents de la très redoutée unité spéciale anti-vol (SARS). Malgré la dissolution de cette brigade, beaucoup estiment que les pratiques n’ont guère changé et que les réformes promises sont restées lettre morte.
Un test pour le président Tinubu
Dans ce contexte, la gestion de cette crise apparaît comme un véritable test pour le nouveau président. Elu sur la promesse d’un “renouveau” démocratique, Bola Tinubu se doit de montrer qu’il est à l’écoute des aspirations d’une jeunesse qui réclame plus de justice et de transparence.
En ordonnant la libération des mineurs détenus et en annonçant des sanctions contre les policiers fautifs, il envoie un premier signal fort. Mais pour de nombreux observateurs, seule une réforme en profondeur des forces de sécurité et un changement durable des mentalités permettront d’éviter de nouveaux drames.
Le chemin est encore long, mais la décision du président Tinubu apparaît comme un pas dans la bonne direction. Reste à savoir si les actes suivront les paroles et si ce geste d’apaisement suffira à calmer la colère qui gronde dans le pays. L’avenir du Nigeria et la crédibilité de ses institutions en dépendent.