À l’approche des élections générales du 2 juin au Mexique, une vague de violences sans précédent s’abat sur les candidats locaux. Dans un pays gangrené par les puissants cartels de la drogue, faire campagne relève de plus en plus d’une mission à haut risque. Derniers faits d’armes en date : l’assassinat d’un prétendant à la mairie dans l’État de Morelos et la tentative de meurtre d’un autre dans le Jalisco. Une situation alarmante qui met en lumière l’emprise du crime organisé sur la vie politique mexicaine.
Sous la menace des narcos
Alors que les Mexicains s’apprêtent à élire leur nouveau président ainsi que plus de 20 000 dirigeants nationaux et locaux, les cartels de la drogue multiplient les pressions et les exactions pour garder la mainmise sur les territoires qu’ils contrôlent. Leur objectif : placer leurs pions ou neutraliser tout candidat susceptible de contrecarrer leurs intérêts. Une stratégie d’intimidation qui s’avère tristement efficace.
Depuis le début de la campagne, pas moins de 30 candidats auraient ainsi été froidement exécutés selon les ONG, un bilan que le gouvernement minimise en avançant le chiffre de 22 assassinats. Une hécatombe qui touche tous les partis et plonge le pays dans un climat de terreur à l’approche du scrutin.
Exécution en pleine rue
Dans l’État de Morelos, c’est Ricardo Arizmendi, candidat à la mairie de Cuautla, qui a été abattu de cinq balles dans la tête par deux tueurs à moto, avant qu’ils ne prennent la fuite. Une exécution en bonne et due forme, en plein jour et en pleine rue, qui souligne l’impunité avec laquelle opèrent les hommes de main des cartels.
Pluie de balles
Même scénario dans le Jalisco où Gilberto Palomar, qui briguait la mairie d’Encarnacion de Diaz, a été criblé de quatre balles alors qu’il préparait un meeting avec son équipe. Il a miraculeusement survécu mais reste dans un état critique. Deux exemples parmi tant d’autres des méthodes expéditives employées par le crime organisé pour décourager toute velléité de résistance.
Les cartels cherchent à imposer leurs candidats, en choisissant un et en interdisant aux autres de se présenter sous peine de mort.
Ricardo Sanchez Beruben, responsable sécurité de l’État de Jalisco
Une démocratie en sursis
Face à ce déchaînement de violence, c’est la démocratie mexicaine qui vacille. Difficile en effet d’organiser des élections crédibles et apaisées quand les narcos font régner la loi du silence. Achats de voix massifs, bourrages d’urnes, intimidations des électeurs… Tous les coups bas sont permis pour garder la main sur les mairies et préserver de juteux trafics.
Un défi colossal pour les autorités mexicaines, débordées et souvent suspectées de collusion, qui peinent à endiguer la spirale meurtrière. Il y a urgence à agir pour ne pas voir le scrutin du 2 juin entièrement confisqué par le crime organisé. Faute de quoi, la démocratie mexicaine risque de n’être plus qu’une façade au service des intérêts mafieux…
Le Mexique, narco-État ?
Cette escalade de violence interroge sur la nature même du régime mexicain. Certains observateurs n’hésitent plus à parler d’un véritable “narco-État” où le crime organisé aurait infiltré toutes les strates du pouvoir. Une accusation gravissime qui souligne l’urgence d’une réaction forte de l’État pour restaurer son autorité et garantir la tenue d’élections libres et transparentes.
Car au-delà de l’enjeu démocratique, c’est la crédibilité même des institutions qui est en jeu. Comment les citoyens peuvent-ils encore croire en un système gangrené par la violence et la corruption ? Un système qui semble avoir renoncé à les protéger et à faire respecter l’état de droit. La crise de confiance est profonde et ne pourra se résorber sans un sursaut salutaire.
L’heure des choix
Les élections du 2 juin s’annoncent donc comme un moment de vérité pour le Mexique. L’État parviendra-t-il enfin à reprendre la main face aux cartels ? Les électeurs réussiront-ils à faire entendre leur voix malgré le climat de terreur ? Rien n’est moins sûr tant l’emprise des narcos paraît tentaculaire.
Une chose est certaine : le prochain président, qu’il soit Florencia Serranía ou Miguel Torruco, n’aura d’autre choix que de s’attaquer frontalement au problème. En renforçant les moyens de la justice et de la police, en assainissant la vie publique et en redonnant espoir à une population tétanisée. Un immense défi qui engagera l’avenir du Mexique pour les années à venir. En espérant que le sang versé durant cette campagne n’ait pas coulé en vain…