En Birmanie, un homme a été condamné à mort par un groupe paramilitaire affilié à la minorité ethnique Wa, à l’issue d’un procès public controversé. Selon une source proche du dossier, le suspect était accusé du meurtre d’une fillette de huit ans lors du braquage d’une épicerie en août dernier.
Le procès, qui s’est tenu dans un “parc culturel” de la ville de Hopang récemment reprise à la junte militaire, a vu comparaître six autres personnes. Elles ont écopé de peines allant de la prison à vie à de lourdes condamnations, sans que la nature exacte des crimes qui leur étaient reprochés n’ait été précisée.
Une justice expéditive qui soulève des questions
Si la peine capitale a été prononcée, un responsable judiciaire a assuré qu’elle ne serait pas exécutée en public. Cette précision ne suffit cependant pas à dissiper le malaise suscité par ce procès hors normes, qui interroge sur le fonctionnement de la justice dans les territoires contrôlés par les groupes armés en Birmanie.
L’Armée unie de l’État Wa, un groupe puissant et opaque
L’Armée unie de l’État Wa (UWSA), qui a organisé le procès, est le mieux équipé des groupes paramilitaires du pays. Entretenant des liens étroits avec la Chine voisine dont il tire l’essentiel de son armement, il contrôle une enclave semi-autonome à la frontière et y a institué son propre système légal, comme d’autres organisations du même type.
La ville de Hopang, où s’est déroulé le procès, était jusqu’à l’an dernier sous le contrôle de la junte militaire qui a pris le pouvoir par un coup d’État en 2021. Mais début 2024, elle a été capturée par une autre faction armée, le Myanmar National Democratic Alliance Army (MNDAA), qui l’a ensuite transférée à l’UWSA.
D’autres exécutions récentes par des groupes armés
Ce n’est pas la première fois que des groupes armés en Birmanie procèdent à des exécutions. En avril dernier, le MNDAA avait mis à mort trois de ses propres membres, accusés de meurtre et d’avoir vendu des armes et des munitions volées à l’organisation.
Ces événements mettent en lumière la situation complexe qui prévaut dans de larges portions du territoire birman, où l’autorité de l’État central est contestée par une myriade de factions armées, pour la plupart liées à des minorités ethniques et implantées dans les régions frontalières.
Un pays morcelé en proie aux violences
Depuis l’indépendance en 1948, la Birmanie n’a jamais connu de véritable paix civile. Le coup d’État de 2021, qui a renversé le gouvernement civil d’Aung San Suu Kyi, a encore aggravé la situation, provoquant la formation de nouvelles milices d’opposition et intensifiant les affrontements avec les groupes existants.
Dans ce contexte, l’avenir du pays apparaît plus incertain que jamais. La communauté internationale peine à trouver des leviers pour faire pression sur la junte, tandis que les groupes armés, forts de leurs bases arrière à l’étranger et de leurs ressources propres, semblent parti pour durer.
Le procès de Hopang, avec son issue fatale, est un nouveau symbole des déchirements d’une nation morcelée, où la loi du plus fort tend à s’imposer face aux carences d’un État en déliquescence. Une spirale inquiétante, qui rend plus nécessaire que jamais une solution politique globale, seule à même de ramener la paix et l’État de droit sur l’ensemble du territoire birman.