Des pluies torrentielles se sont abattues sur le sud-est de l’Espagne dans la nuit du 29 au 30 octobre, provoquant des inondations meurtrières et semant le chaos. Au cœur de cette catastrophe, des touristes français se sont retrouvés pris au piège par la montée soudaine des eaux, vivant des heures d’angoisse. Ils nous livrent leurs témoignages poignants.
“Un véritable cauchemar” : coincés dans un centre commercial
Christine Zamareno fait partie des 700 personnes bloquées dans un centre commercial d’Alfafar, dans la province de Valence. Alors qu’une annonce résonne pour avertir que les voitures doivent être remontées du parking inondé, son mari part déplacer leur véhicule. C’est là que tout bascule.
“Je suis restée dans le magasin, et finalement tout a tourné au cauchemar, raconte-t-elle, la gorge nouée. Vous partez en vacances, et vous ne pensez pas que ça peut partir en cacahuètes comme ça.”
Pendant plusieurs heures, Christine perd contact avec son mari. Ce dernier, frigorifié, attend pendant sept longues heures, les pieds dans l’eau, accroché à un panneau de signalisation, avant d’être secouru. Au fil de la nuit, des dizaines d’autres personnes affluent dans le centre commercial, fuyant la montée des eaux.
“On a vu des gens demander à l’aide, coincés dans leurs voitures”
À quelques centaines de mètres de là, Léa Jamardo et une autre Française se réfugient sur un pont, assistant, impuissantes, à un spectacle de désolation. L’autoroute en contrebas est submergée, des voitures flottent, retournées, parfois même ensevelies.
“On a vu des gens demander à l’aide, coincés, enfermés dans leurs voitures, rapporte Léa. Le courant était tellement fort qu’on était impuissants, nous, en haut du pont, on n’avait aucun moyen de les secourir. On a vu leurs voitures ensevelies sous la boue et sous l’eau.”
Un lourd bilan humain
Cette catastrophe naturelle, qualifiée de “pire en Espagne depuis 1973” par les autorités, a déjà coûté la vie à 95 personnes. La région de Valence est de loin la plus durement touchée, concentrant l’immense majorité des victimes.
- 95 morts, dont une large majorité dans la région de Valence
- Pire catastrophe naturelle en Espagne depuis 1973
- Des dégâts matériels considérables
Les services de secours débordés
Face à l’ampleur des inondations et au nombre de personnes à secourir, les services d’urgence ont été mis à rude épreuve. Malgré leur mobilisation, de nombreuses vies n’ont pu être sauvées. Des images montrant des sauveteurs luttant contre les flots déchaînés pour extraire des victimes ont choqué l’opinion.
“On a vu les secouristes s’activer toute la nuit, c’était surréaliste, témoigne un habitant. Malgré tous leurs efforts, ils étaient débordés par les appels et le nombre de personnes à sauver.”
Un habitant de Valence
Un phénomène de “goutte froide” d’une rare intensité
Ces inondations dévastatrices sont dues à un épisode méditerranéen particulièrement intense, appelé “goutte froide”. Il s’agit d’un phénomène qui se produit en automne, lorsque l’air froid en altitude rencontre l’air chaud et humide venant de la mer, générant de violents orages.
Mais cette “goutte froide”, qualifiée de “pire depuis un demi-siècle” par les météorologues espagnols, a atteint une puissance inouïe, déversant des trombes d’eau en un temps record. Selon l’agence météorologique espagnole AEMET, il est tombé plus de 600 mm de pluie en 24h dans certaines zones, soit l’équivalent de 6 mois de précipitations.
“En 50 ans de métier, je n’ai jamais vu un épisode d’une telle violence. Tous les records ont été pulvérisés, c’est du jamais vu.”
José Luis Jover, météorologue à AEMET
L’Espagne endeuillée, trois jours de deuil national décrétés
Devant l’ampleur de la tragédie, le gouvernement espagnol a décrété trois jours de deuil national. Le pays est sous le choc, rendant hommage aux victimes de ces inondations meurtrières. Le roi Felipe VI et le Premier ministre Pedro Sánchez se sont rendus dans les zones sinistrées pour apporter leur soutien aux habitants et saluer le travail des secours.
Dans les prochains jours, l’heure sera au bilan et à l’évaluation des dégâts. De nombreuses questions se posent déjà sur l’urbanisation de certaines zones à risque et sur les mesures à mettre en place pour éviter qu’une telle catastrophe ne se reproduise. En attendant, l’Espagne pleure ses morts et se relève doucement de ce drame qui restera dans les mémoires.