C’est la fin d’une époque en Finlande : le Musée Lénine de Tampere, ultime vestige en Europe d’une institution dédiée à l’ancien dirigeant soviétique, s’apprête à définitivement fermer ses portes. Une nouvelle qui suscite une vague de réactions en Russie, oscillant entre critiques acerbes et théories du complot les plus folles.
Un lieu chargé d’histoire
Fondé en 1946 dans la ville méridionale de Tampere, ce musée occupait un bâtiment emblématique. C’est en effet ici même qu’en 1905, Lénine, alors en exil, rencontra pour la première fois Staline lors de la conférence bolchévique fondatrice. Plus qu’un simple musée, l’endroit était un véritable symbole des liens historiques unissant la Finlande et la Russie.
Un nom devenu “un fardeau”
Pourtant, selon Kalle Kallio, directeur de l’établissement, le nom même du musée était devenu problématique. “Il ne reflète pas l’histoire que nous souhaitons transmettre”, a-t-il confié à l’AFP. “Certains pensent qu’il s’agit d’une sorte de temple maléfique”, a-t-il ajouté, reconnaissant que l’appellation était “devenue un fardeau”, particulièrement depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022.
Ce poids s’est notamment fait sentir auprès des écoles. “Les enseignants ne veulent pas demander aux parents s’ils peuvent emmener leurs enfants ici”, a expliqué M. Kallio. Un constat amer pour ce musée qui, malgré son nom, avait fait le choix dès 2016 de se recentrer sur l’histoire soviétique plutôt que sur la vie du révolutionnaire, et n’entretenait aucun lien avec le Kremlin.
Malentendus et théories du complot en Russie
La décision de rebaptiser le musée a suscité de vives réactions en Russie voisine, avec laquelle la Finlande partage une frontière de 1 340 kilomètres. “La nouvelle s’est répandue comme quoi il s’agissait d’un nouvel acte inamical de la part de la Finlande après son adhésion à l’Otan, et que cette décision avait en fait été prise à Washington”, a relaté Kalle Kallio.
Des théories complotistes qui ont pris de l’ampleur malgré le fait que le musée, financé publiquement, n’a aucun lien avec le gouvernement russe actuel. Une situation qui illustre la complexité et la sensibilité des relations finno-russes, même autour d’un lieu dédié à l’histoire.
La renaissance du musée sous un nouveau nom
Loin de disparaître, le musée renaîtra en février 2025 sous le nom de “Nootti” (La note, instrument de correspondance diplomatique). Il se focalisera sur l’évolution des relations entre la Finlande et la Russie au cours des XXe et XXIe siècles.
En attendant, l’établissement connaît un pic de fréquentation avant sa fermeture le 3 novembre, les visiteurs se pressant pour découvrir ou redécouvrir ce lieu unique avant qu’il ne tourne définitivement la page Lénine.
Au-delà de l’histoire d’un musée, c’est toute la complexité des liens entre deux nations voisines qui se révèle. Entre mémoire partagée et tensions actuelles, le Musée Lénine de Tampere aura été, jusqu’au bout, le reflet d’une relation en perpétuelle évolution.
Alors que le rideau tombe sur ce lieu emblématique, une nouvelle page de l’histoire finno-russe s’apprête à s’écrire. Une histoire faite de mémoire, de diplomatie et d’échanges, dont “Nootti” sera, à n’en pas douter, un acteur incontournable.