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Visite controversée de Macron au Maroc sur fond de tensions

La visite de Macron au Maroc met le feu aux poudres. Entre soutien appuyé à la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental et vives critiques de la presse algérienne, les relations se tendent dangereusement. Un véritable séisme diplomatique qui...

La visite d’État d’Emmanuel Macron au Maroc cette semaine ne passe pas inaperçue de l’autre côté de la frontière algérienne. Dans un contexte de relations déjà tendues entre la France et l’Algérie, la presse du pays voisin s’est déchaînée contre le président français, l’accusant de “bafouer le droit international” en apportant un soutien appuyé à la “souveraineté marocaine” sur le Sahara occidental. Un véritable séisme diplomatique qui pourrait bien laisser des traces durables.

Le Sahara occidental, pomme de discorde

Au cœur de la polémique : le statut du Sahara occidental, ce vaste territoire désertique de la taille du Royaume-Uni, coincé entre le Maroc, l’Algérie et la Mauritanie. Ancienne colonie espagnole passée sous contrôle marocain dans les années 70, il est aujourd’hui considéré comme un “territoire non autonome” par les Nations Unies. Mais le Maroc en revendique la souveraineté, au grand dam de l’Algérie qui soutient les indépendantistes sahraouis du Front Polisario.

Un conflit vieux d’un demi-siècle, dans lequel la France vient de mettre les pieds en affichant un soutien sans ambiguïté au Maroc. Fin juillet, Paris avait déjà reconnu le plan d’autonomie marocain comme “une base sérieuse et crédible” pour résoudre le conflit. Des propos en forme de camouflet pour l’Algérie, qui avait immédiatement rappelé son ambassadeur.

Macron enfonce le clou devant le parlement marocain

Comme pour enfoncer le clou, Emmanuel Macron a réitéré mardi, devant les parlementaires marocains, que “le présent et l’avenir” du Sahara occidental “s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine”. Une petite phrase lourde de sens qui n’est pas passée inaperçue à Alger.

Le quotidien francophone El Watan a fustigé un président français qui “en remet une couche… au risque de sectionner définitivement le fil d’Ariane qui le retient encore à Alger”. Le journal cite des représentants sahraouis insistant sur la tenue d’un référendum d’autodétermination sous l’égide de l’ONU, décidé en 1991 mais jamais organisé.

Macron bafoue le droit international

Une visite sur le dos du peuple sahraoui

Titres de la presse algérienne

Un “marché de dupes” pour la France ?

Certains médias algériens voient dans ce rapprochement franco-marocain “un marché de dupes”. Selon TSA, le soutien français à la souveraineté marocaine est “symbolique, sans aucune valeur juridique”, le journal rappelant qu’une récente décision de la Cour de justice européenne est venue annuler les accords agricoles et de pêche entre le Maroc et l’UE au motif que le Sahara occidental n’en faisait pas partie.

D’autres soulignent que la position française ne fait pas l’unanimité au sein même de l’Union européenne et que Paris risque de se retrouver isolé sur ce dossier. Emmanuel Macron joue donc gros avec ce pari marocain, au risque de tendre durablement ses relations avec Alger, partenaire gazier stratégique.

Macron rate ses objectifs avec l’Algérie

Un pari d’autant plus risqué que la France a beaucoup à perdre en Algérie. Selon le quotidien arabophone Echorouk, proche du pouvoir, “de tous les objectifs que Macron a construit dans ses relations avec Alger, aucun n’a été atteint”. Et malgré ses tentatives de rapprochement depuis 2020, “Paris continue de perdre les quelques intérêts économiques qui lui restent” dans le pays.

Un coup dur pour l’image et les intérêts français au Maghreb. Reste à voir si Emmanuel Macron parviendra à ramener dans ses valises des contreparties suffisantes du côté marocain pour compenser cette prise de risque diplomatique. Car pour l’heure, notent certains observateurs, “le Maroc n’a pas grand chose à offrir” en échange à la France. Ni marché porteur, ni eldorado économique.

Seule certitude : en choisissant le camp marocain dans le conflit du Sahara occidental, quitte à froisser l’Algérie, Emmanuel Macron joue une partition diplomatique périlleuse. Avec le risque de voir la France perdre sur les deux tableaux au Maghreb. Quand la real politik prend le pas sur les principes du droit international, les équilibres sont fragiles. La suite des événements dira si le locataire de l’Élysée a vu juste ou s’est fourvoyé dans les sables du Sahara occidental.

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