À l’approche de l’élection présidentielle américaine, le logement s’impose comme l’un des thèmes majeurs de campagne. Aux États-Unis, où l’accès à la propriété fait partie intégrante du rêve américain, la pénurie de logements disponibles provoque une envolée des prix dans l’ensemble du pays. Une situation qui place le pouvoir d’achat au cœur des débats.
San Francisco, emblème d’une crise qui touche tout le pays
La Californie, et en particulier San Francisco, cristallise les tensions. Dans cette ville, vitrine de la Silicon Valley, le contraste est saisissant. Des milliers de sans-abri, souvent dépendants au fentanyl, errent dans le centre-ville, tandis que des salariés manifestent dans la rue, incapables de se loger décemment. Une passante témoigne :
Aucun d’entre nous ne peut se permettre de vivre ici. Il faut habiter à au moins deux heures de route.
Dans cette région, les prix de l’immobilier ont atteint des sommets. Selon John Nelson, agent immobilier franco-américain, les maisons se négocient entre 1 et 2 millions de dollars. Le coût de la vie à San Francisco, ville la plus chère du pays, dépasse de 60% la moyenne nationale. Pour subvenir à ses besoins, une personne seule doit débourser 4000 euros mensuels.
Même dans les banlieues alentours, où John a élu domicile avec son épouse Kristi, les loyers restent prohibitifs. Le couple a dû se résoudre à partager un pavillon pour 3000 euros par mois, faute de mieux. Kristi se désole :
Pour la vie quotidienne, les prix sont dingues. On vient de se marier, et on ne peut même pas être propriétaires.
Face à cette situation intenable, John et Kristi envisagent de quitter prochainement la Californie, avec l’espoir de trouver ailleurs des conditions de vie plus favorables.
Une problématique qui s’étend aux zones autrefois abordables
Mais les difficultés d’accès au logement ne se limitent plus aux grandes métropoles californiennes. Le phénomène touche désormais des régions jusque-là épargnées, à l’image de Kalamazoo, petite ville de 75 000 habitants dans le Michigan.
Pour faire face, les autorités locales ont lancé des initiatives inédites : construction de micro-maisons, programmes immobiliers low-cost, aides publiques pour la location et l’achat destinées aux classes moyennes. Willa Ditaranto, en charge du logement, explique :
Ici, il fallait 40 000 euros de revenu annuel pour s’offrir une maison. Maintenant, on est plus proche de 70 000, voire 100 000 euros pour obtenir un prêt.
Cet État du Midwest, pour l’instant acquis aux démocrates, fait partie des “swing states” susceptibles de basculer lors du scrutin présidentiel. Et la question du pouvoir d’achat s’annonce comme l’un des principaux champs de bataille.
Le logement, un enjeu central de la présidentielle
À quelques jours de l’élection, les candidats multiplient les propositions pour tenter de répondre aux angoisses des Américains. Selon un récent sondage, près de 70% des électeurs estiment que l’accès à un logement abordable devrait être une priorité pour le prochain président.
La vice-présidente Kamala Harris, candidate démocrate, a fait de cette question un axe fort de son programme. Elle promet des investissements massifs pour construire de nouveaux logements, ainsi que des aides accrues pour les locataires et les primo-accédants. Son rival républicain Donald Trump mise quant à lui sur des incitations fiscales et une dérégulation du marché immobilier.
Au-delà des clivages partisans, c’est bien le modèle de société américain qui est questionné. Le rêve d’une nation de propriétaires, profondément ancré dans l’imaginaire collectif, semble aujourd’hui de plus en plus inaccessible pour une large part de la population. Un constat amer qui pèsera sans nul doute dans les urnes le 6 novembre prochain.