Et si votre boîte de thon cachait un dangereux secret ? C’est ce que suggère une récente étude de l’ONG Bloom qui pointe du doigt des taux préoccupants de mercure dans le thon en conserve consommé en France et en Europe. Mais d’où vient cette substance toxique et pourquoi s’accumule-t-elle spécifiquement dans la chair du thon ? Plongée dans les eaux troubles d’un scandale sanitaire qui pourrait bien vous couper l’appétit.
Le mercure, ce poison invisible
Le mercure est un métal lourd naturellement présent dans l’environnement, mais dont les concentrations ont explosé depuis l’ère industrielle. Centrales à charbon, incinérateurs de déchets, industrie minière… Les activités humaines rejettent massivement du mercure dans l’atmosphère, qui finit par se déposer dans les océans.
Selon un expert interrogé, environ 15 tonnes de mercure s’échangent chaque année entre l’atmosphère et les océans à l’échelle planétaire. Un chiffre en apparence modeste, mais dont l’impact est démultiplié une fois dans le milieu marin.
Car sous l’action de certaines bactéries, le mercure se transforme en méthylmercure, un composé hautement toxique et bioaccumulable. Autrement dit, il a la propriété de se concentrer tout au long de la chaîne alimentaire, des micro-organismes jusqu’aux superprédateurs comme le thon.
Un prédateur supérieur comme le thon rouge peut concentrer entre 1 et 10 millions de fois le mercure présent dans l’eau environnante.
– D’après un chercheur spécialiste de la contamination des écosystèmes marins
Orpaillage et centrales à charbon pointés du doigt
Parmi les sources de pollution au mercure, l’orpaillage artisanal, en forte croissance ces dernières années, est considéré comme un “grand pourvoyeur” selon les experts. Cette pratique d’extraction d’or utilisant du mercure a connu une accélération fulgurante dans certaines régions du monde.
Les centrales électriques au charbon sont une autre source majeure d’émissions de mercure. Malgré les progrès technologiques, cette énergie fossile reste largement répandue à travers le monde, libérant des quantités massives de ce polluant dans l’atmosphère.
Le thon, une éponge à mercure
Situé au sommet de la chaîne alimentaire marine, le thon est l’un des poissons les plus exposés à la contamination au mercure. En se nourrissant de proies elles-mêmes contaminées, ce grand prédateur accumule des taux record de méthylmercure dans sa chair.
Entre l’eau de mer et un thon de haut niveau comme le thon rouge, la concentration en méthylmercure est multipliée par un facteur pouvant atteindre 10 millions.
– Selon une source scientifique
L’âge et la taille des spécimens jouent également un rôle, les individus les plus gros et les plus âgés présentant logiquement des taux de contamination supérieurs. Des facteurs aggravants qui expliquent les niveaux préoccupants relevés dans certaines conserves de thon.
Quels risques pour la santé ?
Le méthylmercure est un neurotoxique puissant, particulièrement dangereux pour le développement du système nerveux central chez le fœtus et le jeune enfant. À forte dose, il peut entraîner de graves troubles neurologiques : retards de développement, déficits intellectuels, atteintes sensorielles et motrices…
Chez l’adulte, une exposition chronique est associée à des symptômes plus subtils mais bien réels : troubles de l’humeur, pertes de mémoire, fatigue chronique… Des effets sanitaires encore sous-estimés selon certains chercheurs.
Vers une révision des recommandations ?
Face à ces risques, les autorités sanitaires appellent à une consommation modérée de thon et autres grands prédateurs marins, en particulier pour les populations sensibles comme les femmes enceintes et les jeunes enfants.
Il est recommandé de diversifier les espèces de poissons consommées et de limiter les grands prédateurs comme le thon à une fois par semaine pour les enfants et les femmes enceintes.
– Selon les recommandations officielles
Mais au vu des récentes analyses publiées par l’ONG Bloom, montrant des dépassements fréquents des seuils réglementaires dans les conserves de thon, ces recommandations sont-elles encore suffisantes pour protéger les consommateurs ? La question mérite d’être posée.
En attendant une éventuelle révision des repères de consommation, la prudence reste de mise face à ce met apprécié des Français. Car derrière sa saveur et ses apports nutritionnels, le thon pourrait bien cacher une menace invisible mais bien réelle pour notre santé.