ActualitésInternational

Trafic de Migrants : Enquête au Cœur des Réseaux de Passeurs

Une enquête au cœur des réseaux de passeurs de migrants lève le voile sur un trafic sans pitié. Argent, vie humaine, rien n'est épargné dans ce business de la misère. Les révélations glaçantes d'une journaliste infiltrée...

C’est un drame qui ne cesse de se répéter. Dimanche dernier, un migrant indien a perdu la vie en tentant la traversée de la Manche. Son embarcation de fortune s’est dégonflée peu après avoir quitté la plage de Tardinghen à l’aube. Ce naufrage porte à 56 le nombre de migrants morts depuis janvier en tentant de rejoindre l’Angleterre, un triste record. Une équipe de journalistes a enquêté au plus près des réseaux de passeurs pour tenter de comprendre les rouages de ce trafic sans fin.

Dans les coulisses d’un trafic à haut risque

Trois heures du matin, sur une plage du nord de la France. Une équipe de gendarmes repère un groupe de migrants déjà à l’eau. La mer est à seulement 10 degrés. Chaque minute compte pour tenter d’empêcher un nouveau drame. Car si les migrants atteignent leur embarcation, le risque d’hypothermie est immense. Mais pour ces hommes et ces femmes qui tentent la traversée, pas question de renoncer. Certains en sont à leur sixième tentative. Le prix d’un passage peut atteindre 5000 euros. Une somme déboursée en une fois, quel que soit le nombre d’essais nécessaires.

Le “taxi-boat”, nouvelle stratégie des passeurs

Pour déjouer la surveillance des forces de l’ordre, les passeurs rivalisent d’ingéniosité. Leur nouvelle technique : le “taxi-boat”. L’embarcation destinée aux migrants est déjà à l’eau, prête à les récupérer. Une façon de contourner les contrôles à terre. Mais pour les gendarmes, impossible d’intercepter ces bateaux sans risquer un drame. Un dilemme dont profitent les trafiquants.

Le taxi-boat, c’est notre point faible. Le but n’est pas de neutraliser une embarcation au risque d’avoir des morts.

Un gendarme du Groupement du Pas-de-Calais

Des moyens de fortune pour un business juteux

Au petit matin, les gendarmes découvrent le matériel abandonné par les passeurs. Des bateaux pneumatiques pouvant embarquer jusqu’à 80 personnes, du matériel de réparation de fortune, des jerricans d’essence. Le coût de cet équipement : environ 10 000 euros. Mais une traversée peut rapporter jusqu’à 200 000 euros aux trafiquants. Un business international très lucratif, orchestré depuis l’étranger par des chefs de réseaux.

Un trafic aux ramifications internationales

D’après les informations recueillies par les enquêteurs, ces réseaux criminels s’approvisionnent en bateaux pneumatiques à bas coût en Chine. Le matériel transite ensuite par la Turquie, puis l’Allemagne avant d’être acheminé vers les côtes françaises par des petites mains du trafic. Une logistique bien rodée qui profite du désespoir de milliers d’exilés prêts à tout pour traverser la Manche.

On va essayer encore. Tu paies une fois, pas à chaque tentative. Les passeurs viennent te voir à la gare ou au bord de la route pour te proposer la traversée.

Témoignage de deux jeunes Soudanais

Une lutte sans fin pour les autorités

Depuis janvier, les autorités françaises ont démantelé 17 filières et interpellé plusieurs chefs de réseaux de passeurs. Mais sur le terrain, le trafic ne faiblit pas. Les traversées clandestines ont déjà permis à 25 000 migrants de rejoindre l’Angleterre depuis le début de l’année. Un chiffre en constante augmentation malgré les tragédies à répétition. Car pour ces milliers d’exilés, qu’importe le prix ou les risques, l’essentiel est de passer, à tout prix.

Cette enquête lève le voile sur la réalité sordide des réseaux de passeurs, où l’appât du gain supplante la vie humaine. Un trafic sans scrupules qui prospère sur la détresse de ceux qui rêvent d’un avenir meilleur outre-Manche. Malgré la mobilisation des forces de l’ordre, ce business macabre semble promis à un avenir florissant, tant que misère et conflits pousseront des hommes, des femmes et des enfants sur les routes de l’exil au péril de leur vie.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.