La sonnette d’alarme résonne avec force : notre planète traverse une crise majeure de la biodiversité. Lors de la récente COP16 Biodiversité qui s’est tenue à Cali en Colombie, les experts ont dressé un constat accablant sur l’état de la nature à travers le monde. Face à l’ampleur des dégâts causés par l’humanité, la communauté internationale a adopté l’accord de Kunming-Montréal, établissant une feuille de route ambitieuse pour tenter d’enrayer l’hémorragie d’ici 2030. Plongeons au cœur des chiffres clés et des solutions envisagées pour faire la paix avec la nature.
Des écosystèmes gravement dégradés
Selon la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), environ 75% de la surface terrestre a été significativement altérée par les activités humaines. Les forêts défrichées, les zones humides asséchées, les prairies converties en terres agricoles… Les conséquences sont multiples et désastreuses :
- Perte d’habitats naturels pour la faune sauvage
- Infertilité des sols surexploités
- Réduction de la capacité d’absorption du CO2
- Dégradation de la qualité de l’air et de l’eau
- Risque accru de zoonoses
D’après les projections, la population des zones arides pourrait passer de 2,7 milliards à 4 milliards d’habitants d’ici 2050, exacerbant encore la pression sur des écosystèmes déjà fragilisés. Mais les scientifiques insistent : il n’est pas trop tard pour agir. Les bénéfices de la restauration des terres dégradées seraient dix fois supérieurs à son coût.
Un million d’espèces menacées d’extinction
Autre chiffre alarmant révélé par l’IPBES : sur les quelque 8 millions d’espèces animales et végétales estimées sur Terre, 1 million sont aujourd’hui menacées de disparition. Parmi elles, environ 600 000 espèces d’insectes, indispensables à la pollinisation des cultures dont dépend notre alimentation. Les récifs coralliens, véritables nurseries des océans qui nourrissent plus de 850 millions de personnes, pourraient disparaître à 70-90% dans un monde plus chaud de 1,5°C.
Les cinq grands facteurs de déclin
L’ONU identifie cinq causes majeures du déclin de la biodiversité, toutes d’origine anthropique. Par ordre d’importance :
- La destruction et la fragmentation des habitats
- La surexploitation des ressources naturelles
- Les changements climatiques
- La pollution multiforme
- Les espèces exotiques envahissantes
Si rien n’est fait, le réchauffement climatique pourrait devenir le facteur prépondérant de perte de biodiversité d’ici le milieu du siècle. Un cercle vicieux puisque la nature joue elle-même un rôle clé de régulateur du climat.
Une facture salée pour l’économie mondiale
Outre sa valeur intrinsèque inestimable, la biodiversité représente des services écosystémiques vitaux pour l’humanité. Selon un calcul du cabinet PwC, plus de la moitié (55%) du PIB mondial dépend dans une large mesure du bon fonctionnement de la nature. Pollinisation des cultures, approvisionnement en eau potable, régulation des maladies… La destruction du vivant pourrait coûter très cher à terme.
La dégradation des sols due aux activités humaines compromet le bien-être d’au moins 3,2 milliards de personnes.
IPBES, 2018
Paradoxalement, alors que nous dépendons tant de la nature, nos systèmes économiques continuent de subventionner massivement les activités les plus destructrices comme l’extraction d’énergies fossiles, la surpêche ou l’agriculture intensive. Ces « subventions néfastes pour l’environnement » sont estimées entre 500 milliards et 2 600 milliards de dollars par an selon les sources, soit jusqu’à 2,5% du PIB mondial !
L’espoir d’un sursaut mondial
Face à ce constat accablant, la COP15 Biodiversité a débouché sur l’adoption d’un accord historique baptisé « Cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal ». Parmi ses 23 objectifs phares à l’horizon 2030 :
- Placer sous protection 30% des terres et des mers de la planète
- Restaurer 30% des écosystèmes dégradés
- Réduire de moitié les pertes d’habitats naturels et le rythme d’extinction des espèces
- Diminuer de 50% l’utilisation des pesticides
- Mobiliser au moins 200 milliards de dollars par an pour la biodiversité
Reste désormais à passer des paroles aux actes. Car le temps presse et c’est bien notre propre survie en tant qu’espèce qui est en jeu. Comme le martèle le Secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres dans son discours à la COP15 : « Sur le chemin du suicide, l’humanité a un choix à faire entre l’espoir et la capitulation. Il est grand temps de faire la paix avec la nature. Mettons fin à notre guerre contre la nature et prenons la voie du rétablissement ».