C’est un scrutin à haut risque qui se tient ce dimanche au Japon. Les élections législatives anticipées, convoquées par le Premier ministre Shigeru Ishiba peu après son arrivée au pouvoir début octobre, pourraient bien tourner au désaveu pour son Parti Libéral-Démocrate (PLD). Après près de 70 ans d’hégémonie quasi-ininterrompue, le PLD et son allié du Komeito sont menacés de perdre leur majorité absolue à la Chambre basse, un cas de figure presque inédit dans l’histoire politique nippone.
Un pari risqué pour le Premier ministre Ishiba
En convoquant ce scrutin de manière anticipée, Shigeru Ishiba espérait surfer sur une dynamique positive en ce début de mandat pour renforcer son assise au Parlement. Mais c’était sans compter l’impact dévastateur d’un scandale de financement occulte qui éclabousse le PLD depuis plusieurs mois et avait déjà contribué à la chute de son prédécesseur Fumio Kishida.
Malgré les déclarations volontaristes de M. Ishiba, qui promet « un nouveau Japon » et un PLD « juste et sincère », la confiance des électeurs semble sérieusement entamée. Un sondage rapporté par le quotidien Asahi a révélé que le PLD continuait à soutenir financièrement les sections locales dirigées par les élus impliqués dans le scandale, suscitant la colère de l’opposition.
Des électeurs partagés et une opposition divisée
Dans les rues de Tokyo, les électeurs sont mitigés. Si beaucoup jugent sévèrement le PLD, à l’image de Hitomi Hisano qui estime que le parti « est au pouvoir depuis trop longtemps » et est devenu « orgueilleux », d’autres peinent à lui trouver une alternative crédible. « Il n’y a pas d’autres partis suffisamment fiables », déplore M. Hisano, résumant le dilemme de nombreux Japonais.
Car malgré les errements du PLD, l’opposition peine à capitaliser. Divisée en de multiples formations, elle ne parvient pas à faire émerger une figure de proue consensuelle. Même Yoshihiko Noda, chef du principal parti d’opposition, ne semble pas en mesure de l’emporter. Selon le professeur Masato Kamikubo, « une victoire du PDC est difficile car l’opposition est très divisée ».
Vers un séisme politique au Japon ?
Si les sondages se confirment, le Japon pourrait vivre une véritable secousse politique ce dimanche soir. Une perte de la majorité absolue pour le PLD constituerait un camouflet sans précédent pour ce parti qui domine la vie politique depuis l’après-guerre. Un tel résultat ouvrirait une période d’incertitude, avec un Premier ministre Ishiba potentiellement poussé vers la sortie après à peine un mois en poste, un record.
Les répercussions pourraient même dépasser la sphère politique. Selon des analystes, les marchés financiers, peu habitués à un tel scénario, risquent de réagir vivement. « La Bourse de Tokyo pourrait chuter considérablement » en cas de défaite du PLD, anticipe Masahiro Ichikawa de Sumitomo Mitsui DS.
Quoi qu’il en soit, cette élection législative marque un moment charnière pour le Japon. Après des décennies de stabilité sous la férule du PLD, l’archipel pourrait basculer dans l’inconnu. Un test crucial pour la démocratie japonaise et la maturité de son opposition. Les Japonais ont jusqu’à 20h, heure locale, pour faire leur choix et potentiellement écrire une nouvelle page de leur histoire politique.