L’Église catholique vient de reconnaître le manque de visibilité des femmes dans ses instances dirigeantes suite à un mois de débats au Vatican. Cependant, la question épineuse de leur ordination comme diacres ou prêtres reste en suspens, une déception pour les militantes qui espéraient voir évoluer cette institution bimillénaire.
Un synode sous le signe de l’ouverture mais sans décision majeure
Pendant tout le mois d’octobre, 368 personnes – religieux, évêques et laïcs dont une cinquantaine de femmes – issues d’une centaine de pays ont débattu à huis clos lors de l’Assemblée générale du Synode sur l’avenir de l’Église. Ce rendez-vous, l’un des principaux chantiers du pape François, se voulait plus horizontal et participatif que jamais.
Au terme de ces échanges, l’assemblée a publié un document final de 51 pages approuvé par le pape. Si elle y affirme que “les femmes et les hommes ont une dignité égale en tant que membres du peuple de Dieu”, elle constate aussi que “les femmes continuent à rencontrer des obstacles pour obtenir une plus grande reconnaissance” de leur rôle.
Sur la question sensible de l’ordination des femmes comme diacres, le texte se contente d’indiquer que l’étude “doit se poursuivre”, laissant la question “ouverte”. Une position prudente qui en a déçu plus d’une.
La décision sur le diaconat n’est pas mûre
Cardinal Víctor Manuel Fernández, homme fort de la doctrine du Saint-Siège
Un plafond de verre qui peine à se fissurer
Malgré l’affirmation qu’il n’y a “aucune raison ni aucun obstacle qui puisse empêcher les femmes d’exercer des rôles de direction dans l’Église”, le texte synodal reste flou sur les fonctions concrètes qu’elles pourraient occuper.
Les associations féministes, particulièrement actives en Europe et en Amérique du Nord, continuent de déplorer la marginalisation des femmes par un système jugé patriarcal, en dépit de leur rôle central dans les paroisses du monde entier. Contrairement à d’autres confessions chrétiennes, l’Église catholique n’autorise toujours que les hommes à être ordonnés prêtres ou diacres.
Face aux fortes réticences exprimées dans certains groupes conservateurs et régions du monde, le pape François a confié les thèmes les plus sensibles à 10 groupes de travail qui rendront leurs conclusions en juin 2024. De quoi repousser encore un peu l’horizon d’une possible évolution.
De timides avancées sur d’autres fronts
Si la question des femmes cristallise les tensions, le document synodal esquisse quelques pistes de réforme sur d’autres aspects de la vie ecclésiale :
- Une réorganisation de la formation des prêtres
- Une plus grande implication des laïcs, y compris dans la sélection des évêques
- Davantage d’indépendance pour les conférences épiscopales nationales
- Un accent mis sur la lutte contre les violences sexuelles dans l’Église
Autant de sujets sur lesquels le pape François, élu en 2013 avec un programme réformateur, tente d’impulser des changements malgré les résistances d’une frange conservatrice. Son souhait de décentraliser la gouvernance d’une Église jugée trop verticale se heurte encore à de nombreux obstacles.
Il faut dire que le chemin est étroit. Les propositions du Synode, organe consultatif, doivent recevoir in fine l’aval du pape pour se traduire en actes. Si François a adopté directement les conclusions de l’assemblée, leur donnant ainsi une valeur officielle, il n’a pas annoncé de décision fracassante. Pour l’heure, l’Église catholique semble vouloir avancer à petits pas plutôt qu’à coup de réformes spectaculaires.
La 16e Assemblée générale du Synode aura eu le mérite d’impulser une nouvelle façon de débattre au sein de l’Église, plus horizontale et participative. Avec pour la première fois une large place accordée aux laïcs et aux femmes. Reste à voir si ces évolutions dans la forme se traduiront dans les faits par des changements de fond. Le chemin vers une Église plus inclusive est encore long.