Face à la spirale guerrière qui embrase le Proche-Orient, un havre de paix et de réflexion se prépare à Marseille. Du 21 au 24 novembre, la cité phocéenne accueillera une nouvelle édition des Rencontres d’Averroes, ce rendez-vous annuel qui rassemble depuis plus de 30 ans des milliers de personnes autour des grands enjeux de la Méditerranée. Historiens, écrivains, philosophes et musiciens tenteront, le temps de quelques jours, d’imaginer le futur de cette région au cœur des tensions.
Car malgré les vents contraires, les idées ont plus que jamais besoin d’un « port assez abrité pour qu’elles puissent s’écouter, s’échanger, se nourrir les unes des autres », comme le souligne le collectif en charge de l’organisation. Alors que le conflit entre Israël et Gaza occupera tous les esprits, il s’agira lors de ces rencontres de penser l’avenir et l’espoir aussi peut-être, selon les mots de l’historien Julien Loiseau.
Des regards croisés pour éclairer le présent
Pendant 4 jours, intellectuels et artistes de renom se succéderont pour apporter leur éclairage sur la situation actuelle en Méditerranée. Parmi eux :
- David Abulafia, éminent spécialiste de l’histoire de la Méditerranée, professeur émérite à Cambridge
- Jinam Liman, professeure de droit à l’université de Tunis
- Sadia Agsous, chercheuse en littérature, passionnée par le passage d’une langue à l’autre entre cultures arabes et hébraïques
- Pierre Zaoui, philosophe de l’Université Paris Cité qui aidera à « penser face à la catastrophe »
Une grande table ronde réunira près d’un millier de spectateurs autour de la Méditerranée, cet « échiquier où le jeu est dangereux et les pièces ni blanches ni noires ». L’occasion de croiser les regards de spécialistes venus d’horizons divers pour tenter de déchiffrer le présent.
Ghassan Salamé : un grand témoin au cœur des crises
Point d’orgue de ces rencontres : le grand entretien avec Ghassan Salamé, prévu le samedi 23 novembre. Cet intellectuel libanais a été tour à tour ministre de la Culture de son pays et émissaire de l’ONU en Libye. Un parcours riche qui lui permet de poser un regard aiguisé sur les tensions qui agitent la région. Son intervention très attendue apportera un éclairage précieux sur les défis du moment.
Redonner la parole aux artistes
Mais les Rencontres d’Averroes ne se limitent pas aux joutes intellectuelles. Elles sont aussi l’occasion de célébrer la créativité des artistes méditerranéens. La poétesse marocaine Rim Battal présentera ainsi son travail, accompagnée par le groupe Syqlone qui mêle électro et sonorités du chaâbi algérien.
Le jeudi 22 novembre, une création originale permettra de redécouvrir Le Prophète, le texte culte de Khalil Gibran, un siècle après sa parution. Sur scène, les dessins de Zeina Abirached projetés en direct viendront dialoguer avec la voix envoûtante de la chanteuse Tania Saleh.
C’est une autre façon de penser l’avenir et l’espoir aussi peut-être.
Julien Loiseau, historien et co-organisateur
À l’heure où la Méditerranée s’embrase, où chaque jour apporte son lot de drames et de destructions, les Rencontres d’Averroes apparaissent plus que jamais comme un rendez-vous nécessaire. Un moment suspendu, hors du temps, pour tenter de penser l’avenir malgré tout. Pour continuer à tisser, envers et contre tout, les liens entre les peuples et les cultures de cette région tourmentée mais toujours vibrante.
Alors que les armes semblent avoir pris le dessus sur la raison, ces rencontres nous rappellent que d’autres voies sont possibles. Celles du dialogue, de l’échange, de la création aussi. Des voies étroites et fragiles, mais qui restent notre meilleur espoir de construire une Méditerranée apaisée.
Les Rencontres d’Averroes se tiendront du 21 au 24 novembre à Marseille. Un événement à ne pas manquer pour tous ceux qui veulent garder espoir en des lendemains meilleurs sur les rives de notre mer commune. Car comme le rappelle si justement l’écrivain Amin Maalouf, “il n’y aura pas de paix durable sans réconciliation des mémoires”. Un long chemin que ces rencontres, à leur échelle, contribuent à tracer.