Le puissant mouvement chiite libanais Hezbollah traverse une période charnière suite à l’assassinat il y a un mois de son chef charismatique Hassan Nasrallah. Soutenue par l’Iran, l’organisation fait désormais face à un débat existentiel sur l’avenir de son imposant arsenal militaire, selon des experts.
Un “front de soutien” contre Israël
Malgré les épreuves, le Hezbollah conserve une capacité de frappe au cœur du territoire israélien. Depuis plus d’un an, des échanges de tirs sporadiques ont lieu à la frontière, sur un “front de soutien” ouvert par le mouvement en solidarité avec le Hamas palestinien de Gaza, en guerre avec Israël depuis octobre 2023.
Le 23 septembre, ce conflit larvé a muté en guerre ouverte : opérations terrestres, bombardements dévastateurs au sud et à l’est du Liban ainsi qu’en banlieue sud de Beyrouth. Et surtout, une campagne de frappes visant la tête du Hezbollah, éliminant Hassan Nasrallah le 27 septembre.
La fin d’une époque pour le Hezbollah
Pour Sam Heller, analyste à la Century Foundation, cette disparition marque “la fin d’une époque” et “un tournant” pour le Hezbollah. Dirigeant très charismatique, Nasrallah était le principal décideur à mesure que le Hezbollah gagnait en influence. Sa mort a créé un séisme au Liban et dans la région.
La mort de Nasrallah représente la fin d’une époque.
Sam Heller, analyste à la Century Foundation
Depuis, le Hezbollah n’a pas nommé de successeur. Le nom d’Hachem Safieddine, chef du Conseil exécutif, a circulé avant qu’il ne soit tué dans des raids le 4 octobre. D’autres commandants de haut rang ont aussi été éliminés. En un mois, les frappes israéliennes ont fait au moins 1580 morts et plus d’un million de déplacés.
Une direction collégiale mais une “féroce résistance”
Actuellement, une direction collégiale est aux commandes mais les communications sont coupées, selon des responsables libanais. Malgré l’adversité, le Hezbollah ne renonce pas, revendiquant mardi une attaque de drone contre la résidence du Premier ministre israélien.
L’ennemi n’a pas pu progresser plus de deux kilomètres au-delà de la frontière. Nos forces opposent une féroce résistance.
Une source proche du Hezbollah
Des médias rapportent toutefois que le Parlement libanais serait enclin à négocier un cessez-le-feu. Mais le Hezbollah refuse une trêve sans accord similaire pour Gaza.
Le débat sur le désarmement relancé
Avec le chaos actuel, les détracteurs reposent la question épineuse de l’arsenal du Hezbollah. Seul à avoir gardé les armes après la guerre civile, il surpasserait même l’armée libanaise.
La guerre ne pourra pas se terminer avant un désarmement du Hezbollah. Quand cela arrivera, il pourra intégrer les institutions en tant que parti politique.
Elie Jabbour, informaticien de 27 ans
Des partis font pression pour appliquer les résolutions de l’ONU réservant le monopole des armes à l’État. Et les appels à élire un président qui s’y engage se multiplient. Sam Heller met en garde :
Même les rivaux du Hezbollah seraient mal avisés de suivre les conseils des États-Unis pour le marginaliser politiquement. Cela ne mènerait qu’à un conflit intra-libanais.
Sam Heller, analyste à la Century Foundation
Pour l’expert, le Hezbollah “devra probablement s’adapter”, via la négociation ou en acceptant “des conditions équitables”. Mais il doute que cette guerre conduise à son désarmement.
L’héritage de Nasrallah pèse lourd alors que le mouvement traverse une crise majeure. La question de son arsenal divise, sur fond de chaos au Liban et de guerre ouverte avec Israël. Une nouvelle page s’ouvre pour le Hezbollah, dans la douleur et l’incertitude.