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Marguerite Stern Attaquée en Justice par SOS Racisme

Marguerite Stern dans le viseur de SOS Racisme après avoir osé pointer du doigt l'épineuse question de la surreprésentation des étrangers africains dans la délinquance en France. L'activiste risque gros pour avoir relayé des statistiques ethniques explosives du Ministère de l'Intérieur. La liberté d'expression en danger ?

Un coup de tonnerre dans l’antiracisme français. L’activiste féministe Marguerite Stern se retrouve dans le collimateur de SOS Racisme, qui lui intente un procès en “injure publique en raison de l’origine, l’ethnie, la nation, la race ou la religion”. Son tort ? Avoir relayé sur les réseaux sociaux des chiffres explosifs du Ministère de l’Intérieur pointant la surreprésentation massive des étrangers africains dans les agressions commises en France. Des statistiques ethniques qui dérangent et valent aujourd’hui à la militante d’être traînée en justice par l’association antiraciste. Retour sur une affaire qui en dit long sur les lignes rouges et les tabous de notre débat public.

Des chiffres qui dérangent

Marguerite Stern n’a pourtant fait que relayer une réalité statistique embarrassante mais avérée. Comme l’a confirmé le Ministère de l’Intérieur, si les étrangers de nationalité africaine ne représentent officiellement que 3,5% de la population, ils sont en revanche impliqués dans 10% des affaires de coups et blessures volontaires sur les personnes de 15 ans et plus. Soit, souligne Marguerite Stern, une énorme surreprésentation par rapport à leur poids démographique. Le constat est sans appel : les Français de souche apparaissent au contraire sous-représentés parmi les mis en cause.

Mettre en lumière cette réalité est-il donc devenu un crime ? C’est ce que semble penser SOS Racisme, qui attaque l’activiste en justice, au motif que ces chiffres constitueraient une “injure” aux personnes issues de l’immigration africaine. L’association antiraciste reproche à Marguerite Stern de stigmatiser une communauté et de faire le jeu de l'”extrême droite”.

Un procès politique

Mais pour la principale intéressée, cette plainte n’est rien d’autre qu’un procès politique destiné à la faire taire. “Je suis attaquée pour avoir dit la vérité, alors même que ces chiffres émanent du gouvernement”, s’insurge Marguerite Stern. À ses yeux, refuser de regarder ces statistiques en face, c’est se priver des moyens de penser les problèmes d’intégration et leurs éventuels liens avec la délinquance.

On m’accuse d’être raciste, mais c’est l’inverse : seule une approche antiraciste et républicaine, fondée sur les faits et non les fantasmes, permettra d’avancer

Marguerite Stern

À ses détracteurs qui l’accusent de faire le jeu du Rassemblement National, elle rétorque qu’au contraire, nier ces réalités contribue à nourrir les discours les plus radicaux, faute d’un débat apaisé sur ces questions. Un réquisitoire qui tombe à pic, alors que le RN n’a pas manqué de s’emparer de l’affaire pour dénoncer le “deux poids deux mesures” dont serait victime Marguerite Stern.

Vers une condamnation pour “délit de vérité” ?

Au-delà du cas individuel de Marguerite Stern, c’est bien la question de la liberté d’expression et du droit à évoquer certaines réalités qui se trouve posée. Son avocat dénonce un procès “liberticide” et une tentative de censure :

Au fond, on reproche à ma cliente un “délit de vérité”. Depuis quand citer les chiffres du Ministère de l’Intérieur est-il passible de poursuites ? Les associations antiracistes veulent-elles interdire toute forme de statistiques ethniques, mêmes officielles ?

Maître Thomas Bernard, avocat de Marguerite Stern

Et de fustiger les dérives d’un “antiracisme militant” qui confondrait la lutte contre les discriminations avec la négation des réalités. Une dérive d’autant plus inquiétante que de nombreux intellectuels et universitaires, à l’instar du sociologue Emmanuel Todd, ont eux aussi défendu par le passé l’idée de statistiques ethniques, sans pour autant passer pour des suppôts de l’extrême droite. Marguerite Stern sera-t-elle condamnée pour un “crime de la pensée” ?

Tensions entre féminisme universaliste et antiracisme communautariste

En creux, l’affaire cristallise aussi les tensions entre un féminisme à l’ancienne, universaliste et laïc, et un antiracisme de nouvelle génération davantage porté sur les revendications identitaires et religieuses. Cofondatrice du mouvement Femen, Marguerite Stern a toujours incarné un combat féministe intransigeant, n’hésitant pas à bousculer tous les “patriarcats”, y compris dans les banlieues et les quartiers issus de l’immigration.

Une ligne qui a fini par la mettre en porte-à-faux avec une partie de la gauche antiraciste, encline selon elle à fermer les yeux sur le sexisme au nom du respect des “cultures”. En atteste l’épisode de la polémique déclenchée par ses collages dénonçant les “chasseurs de rue”, ciblant les jeunes hommes des quartiers populaires qui harcèlent les femmes dans l’espace public. Des collages jugés “stigmatisants” par une frange des milieux anti-racistes, mais salués par un féminisme plus classique.

J’ai été exclue d’une partie de la gauche pour avoir refusé l’essentialisme et le communautarisme qui avancent masqués. Mon féminisme a toujours été universaliste.

Marguerite Stern

Ses prises de position iconoclastes sur des sujets comme l’islamisme, le voile ou les violences faites aux femmes dans les “territoires perdus de la République” lui ont valu des inimitiés tenaces dans le camp de l’anti-racisme institutionnel. La plainte de SOS Racisme en constitue-t-elle le point d’orgue ?

Quel avenir pour un débat apaisé sur l’immigration et l’insécurité ?

Une chose est sûre : l’affaire en dit long sur l’extrême difficulté à aborder sereinement la question des liens éventuels entre immigration et délinquance dans notre pays. Évoquer une simple réalité statistique suffit-il désormais à vous faire passer pour un dangereux délinquant, passible de poursuites judiciaires ? Un tel climat de censure est-il de nature à permettre un débat démocratique et rationnel, fondé sur des faits plus que sur des postures ?

Au-delà du cas individuel de Marguerite Stern, c’est bien notre capacité collective à penser les maux de notre société qui semble aujourd’hui en cause. À trop vouloir faire taire ceux qui dérangent, ne risque-t-on pas de voir prospérer les discours les plus outranciers, portés par ceux-là mêmes qui s’en gargarisent ?

Tel est l’enjeu du procès qui s’annonce, et qui dépasse largement la seule personne de l’activiste féministe. Un procès en “sorcellerie” d’un nouveau genre, révélateur des lignes de fracture qui parcourent notre société. Et dont l’issue, quelle qu’elle soit, ne manquera pas de faire date.

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