C’est une véritable surprise qui s’est produite au Mozambique. Lors de l’élection présidentielle du 9 octobre, les Mozambicains ont porté leur choix sur Daniel Chapo, un homme politique jusqu’alors peu connu sur la scène nationale. Avec 70,67% des voix selon la commission électorale, dont l’impartialité est remise en cause par l’opposition et des observateurs, il s’apprête à prendre les rênes de ce pays d’Afrique australe en proie à de nombreux défis.
Du provincial à la présidence
Âgé de 47 ans, Daniel Chapo devient le premier président mozambicain né après l’indépendance du pays en 1975. Contrairement à ses prédécesseurs, il n’a pas pris part à la guerre d’indépendance contre le Portugal ni aux côtés du Frelimo pendant la sanglante guerre civile qui a suivi. Titulaire d’un diplôme de droit, cet ex-professeur de sciences politiques et présentateur radio a gravi les échelons au sein du parti au pouvoir, enchaînant des postes de nomination sans jamais avoir été élu.
Son dernier poste en date était celui de gouverneur de la province d’Inhambane depuis 2016. Mais c’est surtout son passage comme administrateur du district de Palma à partir de 2015 qui a été déterminant. Cette région du nord-est du pays abrite d’importants projets gaziers offshore et Daniel Chapo a eu l’occasion de traiter directement avec les multinationales impliquées, selon un expert.
Un choix par défaut ?
Sa désignation surprise en mai comme candidat du Frelimo est le fruit de difficiles tractations en interne. Après deux jours de débats et plusieurs votes, aucune des différentes factions du parti n’a réussi à imposer son poulain. Le choix s’est porté sur cet homme réputé influençable et à même de préserver les équilibres en place.
Personne ne pouvait croire à sa nomination parce qu’on n’avait jamais entendu parler de lui.
déclare Borges Nhamirre de l’Institut d’études pour la sécurité de Pretoria.
Les défis qui attendent le nouveau président
Malgré son manque de notoriété, Daniel Chapo a mené une campagne populaire, promettant écoles, hôpitaux et une économie plus robuste à ses compatriotes. Mais la tâche s’annonce ardue dans ce pays qui reste parmi les plus pauvres au monde. Il devra aussi gérer le conflit dans la province du Cabo Delgado, en proie à une insurrection jihadiste depuis 2017 qui a fait des milliers de morts et plus d’un million de déplacés. Les violences compromettent le développement des immenses réserves de gaz naturel découvertes au large des côtes, un projet à 20 milliards de dollars mené par Total.
Dans son discours, le nouveau président élu s’est voulu rassembleur, promettant de “travailler avec chaque couche de la société”. Mais au vu de son profil et des conditions de sa nomination, nombre d’observateurs doutent de sa capacité à s’émanciper des luttes de pouvoir internes au parti qui domine la vie politique depuis un demi-siècle. Le Mozambique retient son souffle alors qu’une nouvelle page de son histoire s’apprête à s’écrire.