C’est un accord qualifié d'”historique” qui vient d’être signé entre le Royaume-Uni et l’Allemagne. Londres et Berlin ont conclu mercredi un pacte de défense visant à renforcer significativement leur coopération militaire, notamment sur le flanc Est de l’OTAN, sur fond de tensions croissantes avec la Russie depuis l’invasion de l’Ukraine.
Cet accord intervient alors que le nouveau gouvernement travailliste britannique cherche à concrétiser sa volonté de se rapprocher de ses alliés européens après le Brexit, en mettant l’accent sur les questions de sécurité et de défense. Il marque ainsi une étape importante dans la relation bilatérale entre les deux pays.
Un message fort envoyé à Poutine
Pour le ministre britannique de la Défense John Healey, cet accord envoie un signal clair aux adversaires du Royaume-Uni et de l’Allemagne :
Nous dissuaderons et nous nous défendrons contre toute agression
John Healey, ministre britannique de la Défense
Son homologue allemand Boris Pistorius a abondé en ce sens, soulignant que face à “la politique de division et de destruction” de Vladimir Poutine, Londres et Berlin proposent “de la solidarité et de la confiance”. Un message fort alors que les deux pays sont les principaux fournisseurs européens d’aide militaire à l’Ukraine depuis le début du conflit.
Des exercices militaires conjoints renforcés
Baptisé “Trinity House Agreement”, l’accord prévoit notamment :
- Des entraînements plus fréquents entre les armées britannique et allemande pour renforcer le flanc oriental de l’OTAN
- Le déploiement périodique d’avions de patrouille maritime allemands P8 en Écosse pour protéger l’Atlantique Nord
- L’inauguration d’un nouveau centre de commandement naval de l’OTAN en mer Baltique basé en Allemagne
L’objectif est clair : muscler les capacités de dissuasion et de défense face à la menace russe aux portes de l’Europe. Un enjeu d’autant plus crucial que des activités suspectes de navires ont été détectées près d’infrastructures stratégiques sous-marines en mer du Nord et en mer Baltique.
Vers une coopération industrielle approfondie
Au-delà des aspects opérationnels, l’accord ouvre aussi la voie à une coopération industrielle renforcée entre le Royaume-Uni et l’Allemagne dans le domaine de la défense :
- Développement conjoint d’armes de frappe à longue portée dans le cadre d’une initiative européenne
- Ouverture d’une usine Rheinmetall au Royaume-Uni pour produire des canons d’artillerie
- Utilisation d’acier britannique et création de plus de 400 emplois
Pour John Healey, ces projets doivent permettre de combler le retard en matière de coopération industrielle de défense entre les deux pays, jugée jusqu’à présent “sous-développée”. Un partenariat prometteur alors que Londres cherche à renouer des liens étroits avec ses partenaires européens.
Quel impact sur la coopération franco-allemande ?
Cette alliance militaire renforcée entre l’Allemagne et le Royaume-Uni soulève toutefois des interrogations sur l’avenir de la coopération de défense franco-allemande. Paris garde en mémoire le camouflet essuyé en 2021 avec l’alliance AUKUS conclue dans son dos pour fournir des sous-marins à l’Australie.
Interrogé sur ce point, le ministre allemand Boris Pistorius s’est voulu rassurant, affirmant que cet accord bilatéral ne menaçait en rien le partenariat avec la France. Selon lui, Paris a même été “impliqué” dans les discussions ayant abouti à ce traité.
Reste à voir comment cet accord sera perçu côté français et s’il sera suivi d’un renforcement similaire de la coopération militaire entre Paris et Berlin. Une chose est sûre : face aux ambitions de la Russie, le renforcement des alliances de défense en Europe apparaît plus que jamais nécessaire.
