Un accord migratoire qui soulève des questions. C’est ce que pointe du doigt la médiatrice de l’Union Européenne, Emily O’Reilly, dans ses récentes conclusions rendues publiques ce mercredi. Au cœur du débat : le manque de transparence de la Commission européenne lors de la négociation d’un accord migratoire avec la Tunisie l’an dernier.
Des Risques Pour Les Droits Humains Insuffisamment Communiqués
Selon la médiatrice, la Commission aurait dû être plus claire sur les potentielles violations des droits humains en Tunisie au moment de sceller cet accord. “Le manque d’informations accessibles au public dans cette affaire… a clairement été une source de préoccupation”, souligne-t-elle dans son rapport d’enquête, ouvert en avril dernier.
L’accord en question, validé à l’été 2023 par les 27 pays membres de l’UE, prévoit notamment que la Tunisie prenne en charge au moins partiellement la gestion de l’immigration clandestine vers l’Europe via la Méditerranée. En échange, le pays bénéficierait de financements européens.
Des Critiques Multiples, Des ONG Aux Élus
Mais dès sa signature, cet accord a fait l’objet de vives critiques. ONG et élus de gauche ont dénoncé l’autoritarisme du président tunisien Kais Saied et les atteintes aux droits humains subies par les migrants subsahariens dans le pays. Emily O’Reilly juge que la Commission doit être plus transparente sur les critères à respecter par les pays tiers dans ce type d’accord, et sur les conditions pouvant mener à leur suspension.
De Graves Accusations De Violences Sexuelles
Des témoignages accablants ont notamment été publiés le mois dernier par le quotidien britannique The Guardian. Des migrants y mettent en cause des membres de la garde nationale tunisienne, les accusant de violences sexuelles, dont des viols. Face à ces allégations “fausses et sans fondement” selon les autorités tunisiennes, l’UE a haussé le ton, réclamant l’ouverture d’une enquête.
La Tunisie, Plaque Tournante De L’Immigration Clandestine
Avec ses côtes situées à moins de 150 kilomètres de l’Italie, la Tunisie est, avec la Libye voisine, le principal point de départ en Afrique du nord pour les migrants subsahariens cherchant à traverser la Méditerranée et à rejoindre clandestinement l’Europe. Face à cet afflux, l’UE multiplie les accords migratoires ces dernières années, avec la Tunisie donc, mais aussi l’Égypte et la Mauritanie, dans l’objectif affiché de faire baisser les arrivées à ses frontières.
Le manque d’informations accessibles au public dans cette affaire… a clairement été une source de préoccupation.
Emily O’Reilly, Médiatrice de l’Union Européenne
L’UE Appelée À Plus De Vigilance
Mais à quel prix ? C’est tout l’enjeu des conclusions d’Emily O’Reilly. En pointant le manque de transparence de la Commission sur les risques encourus par les migrants, elle appelle de fait l’UE à plus de vigilance dans sa politique migratoire. Car si la lutte contre l’immigration clandestine est une priorité, elle ne peut se faire au détriment du respect des droits fondamentaux.
Un équilibre délicat, que l’accord avec la Tunisie peine visiblement à trouver si l’on en croit la médiatrice. Ses recommandations seront-elles entendues par la Commission ? L’avenir nous le dira. Mais une chose est sûre : sur un sujet aussi sensible que les migrations, la transparence et le contrôle démocratique sont plus que jamais de mise. L’Europe ne peut se permettre de fermer les yeux.