Un complot meurtrier d’une ampleur internationale a été mis au jour ce mardi, selon des documents judiciaires révélés par le ministère de la Justice américain. Pas moins de cinq ressortissants iraniens, dont un haut gradé des Gardiens de la révolution, sont accusés d’avoir fomenté l’assassinat d’une journaliste et opposante irano-américaine sur le sol new-yorkais en 2022. Une affaire qui met en lumière les extrémités auxquelles le régime de Téhéran est prêt à recourir pour réduire au silence ses détracteurs, même au-delà de ses frontières.
Un projet criminel orchestré au plus haut niveau
Selon l’acte d’accusation daté du 17 octobre et rendu public ce mardi, ce projet d’assassinat aurait été conçu suite à l’échec d’une précédente tentative d’enlèvement de la dissidente en 2018. Bien que son identité n’ait pas été révélée dans les documents officiels, la principale intéressée, Masih Alinejad, a confirmé sur les réseaux sociaux qu’il s’agissait bien d’elle.
La révélation que le projet d’assassinat contre moi en juillet 2022 a été fomenté par les Gardiens d’Ali Khamenei est un rappel brutal des extrémités jusqu’où le régime islamique est prêt à aller pour réduire au silence les dissidents, même ceux qui sont loin des frontières de l’Iran.
Masih Alinejad, journaliste et opposante irano-américaine
Parmi les cinq iraniens inculpés figure notamment Rouhollah Bazghandi, général des redoutés Gardiens de la révolution, bras armé du régime. Tous sont présumés se trouver actuellement en Iran, hors de portée de la justice américaine. Trois autres personnes, de nationalités azerbaïdjanaise et géorgienne et membres présumés d’une organisation criminelle est-européenne, avaient déjà été arrêtées en janvier dernier dans le cadre de cette affaire.
La menace extraterritoriale des régimes autoritaires
Ce dossier met en exergue un phénomène inquiétant en pleine expansion selon les défenseurs des droits de l’Homme : la projection par les régimes autoritaires de leur contrôle sur leurs ressortissants, même lorsque ces derniers se trouvent à l’étranger. Un cas emblématique avait défrayé la chronique en 2018 avec l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi au consulat saoudien d’Istanbul.
Masih Alinejad, qui a dû fuir son pays en 2009, paye aujourd’hui au prix fort son combat acharné contre le port obligatoire du voile et son militantisme en faveur des droits des femmes iraniennes. Mais loin de la faire taire, ces menaces semblent au contraire renforcer sa détermination :
Je me rends au Canada pour parler des dangers de la répression transnationale, qui est devenu un instrument des dictateurs pour cibler la liberté d’expression.
Masih Alinejad, message posté sur X (ex-Twitter)
La communauté internationale appelée à réagir
Face à cette dérive liberticide, les autorités américaines affichent leur volonté d’agir. Le ministre de la Justice Merrick Garland a tenu à souligner l’engagement de son administration à protéger les citoyens américains des menaces étrangères, où qu’elles se trouvent. De son côté, le directeur du FBI Christopher Wray a insisté sur la nécessité de dévoiler au grand jour l’ampleur de ces complots pour mieux les combattre.
Mais au-delà des déclarations, c’est une réponse ferme et concertée de la communauté internationale qui est attendue. Car si l’Iran semble avoir franchi un cap dans sa traque exterritoriale des voix dissidentes, d’autres régimes autoritaires pourraient être tentés de suivre le pas. Un scénario aux conséquences potentiellement dévastatrices pour la liberté d’expression et les droits humains à l’échelle mondiale.
Face à cette menace, une mobilisation sans faille s’impose. Soutien aux opposants en exil, sanctions ciblées, pressions diplomatiques… Tous les leviers doivent être actionnés pour endiguer cette dérive liberticide. Car en s’attaquant à ses contempteurs par-delà les frontières, c’est le fondement même de nos démocraties que le régime iranien tente de saper. Un défi que nos sociétés ne peuvent se permettre d’ignorer, sous peine de voir s’éroder un peu plus chaque jour l’espace vital de nos libertés.
