Depuis la mi-septembre, des milliers d’assurés en arrêt maladie en Loire-Atlantique et en Vendée se retrouvent privés de leurs indemnités journalières. En cause : la mise en place chaotique d’un nouveau logiciel de traitement des dossiers dans ces deux départements. Face à ce bug majeur, de nombreux malades se retrouvent sans ressources et plongés dans une grande précarité.
Un déploiement expérimental qui tourne au fiasco
Les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) de Loire-Atlantique et de Vendée ont fait le choix d’expérimenter un nouveau logiciel censé moderniser et fluidifier le traitement des dossiers d’arrêts maladie. Mais c’était sans compter sur les nombreux bugs et dysfonctionnements engendrés par cette bascule informatique.
Depuis, c’est la pagaille : des milliers de dossiers seraient bloqués, empêchant le versement des précieuses indemnités journalières à de nombreux assurés en arrêt de travail. Une situation ubuesque et dramatique pour tous ces malades qui se retrouvent sans revenus du jour au lendemain.
Des assurés livrés à eux-mêmes
Face à cette gabegie, les assurés concernés tentent tant bien que mal d’obtenir des réponses auprès de leur CPAM. Mais c’est souvent la douche froide comme l’explique Jennifer, en arrêt suite à une opération du genou :
Vous téléphonez tous les jours. Tous les jours, on vous apporte un discours complètement différent. Oui, vous êtes payé. Non, vous n’êtes pas payé et en fait, il n’y a jamais rien.
Jennifer, assurée en arrêt maladie
Privée de ses indemnités depuis plus d’un mois, Jennifer se retrouve dans une situation critique. Pour faire face à ses dépenses courantes comme le loyer ou les courses, elle a dû emprunter 700 euros à sa fille, sans savoir quand elle pourra la rembourser. Plus grave encore, elle a dû solliciter un colis alimentaire d’urgence aux Restos du Cœur pour pouvoir se nourrir.
Et Jennifer est loin d’être un cas isolé. Ils seraient des milliers à vivre le même calvaire, confrontés brutalement à la précarité à cause de ce bug. C’est le cas également de cet assuré en accident du travail :
Moi je touche 1200 euros vu que je suis en accident de travail et j’ai un complément du coup de la prévoyance. Ça fait deux mois que je les attends. C’est compliqué, très très très compliqué.
Un assuré en accident du travail
Des milliers de dossiers en souffrance
Selon une source proche du dossier, en Loire-Atlantique, ce ne sont pas moins de 5000 dossiers qui seraient ainsi bloqués à cause de cette défaillance informatique. Un chiffre considérable qui donne la mesure de l’ampleur du problème.
Face à cette situation inédite, la CPAM de Loire-Atlantique affirme avoir pleinement conscience des difficultés rencontrées par les assurés. Pierre Peix, son directeur, assure que tout est mis en œuvre pour solutionner au plus vite ce bug :
Notre priorité, c’est de payer les indemnités journalières dues aux assurés. C’est vraiment quelque chose de très profond chez nous et de très ancré chez les salariés de la caisse primaire. Pour nous, l’objectif prioritaire, c’est de rétablir ces paiements. C’est de trouver des solutions pour payer les assurés.
Pierre Peix, directeur de la CPAM de Loire-Atlantique
Actuellement, pas moins de 200 agents seraient mobilisés nuit et jour à Nantes pour tenter de résorber les dossiers en souffrance. La CPAM indique également étudier la possibilité de verser des acomptes dans certaines situations d’urgence. Des versements qui pourraient intervenir dans les tout prochains jours.
Des bugs à répétition et un avenir incertain
Malheureusement, les bugs informatiques sont légion à l’Assurance Maladie. En 2022 déjà, de nombreux dysfonctionnements avaient été constatés lors de la fusion des mutuelles étudiantes avec le régime général, privant des milliers de jeunes de remboursements pendant des semaines.
Plus récemment, en juillet dernier, une panne nationale avait fortement perturbé l’accès aux services et applications de l’Assurance Maladie pendant plusieurs jours. Des incidents à répétition qui interrogent sur la fiabilité et la robustesse du système informatique de cette institution pourtant cruciale pour des millions de Français.
Avec ce nouveau bug majeur impactant le versement des indemnités journalières, c’est une fois de plus la logique de transformation numérique à marche forcée des caisses d’assurance maladie qui est pointée du doigt. Le déploiement de ce nouveau logiciel révèle surtout une faille béante : l’absence de procédure de secours en cas de défaillance du système principal.
En attendant une régularisation rapide de la situation, des milliers d’assurés en arrêt maladie se retrouvent donc pris en otage par ce bug XXL. Sans visibilité ni ressource, certains basculent dans une grande précarité. Un drame humain et social dont la CPAM semble peiner à prendre la mesure. Espérons que des solutions concrètes soient rapidement trouvées pour mettre un terme au cauchemar de tous ces malades privés de leurs droits les plus élémentaires.