En France, terre de grands crus mondialement réputés, les vignerons tirent la sonnette d’alarme. Alors que la valeur des parcelles atteint des sommets dans des régions comme la Bourgogne, la Champagne ou le Bordelais, la lourde fiscalité sur les héritages compromet la transmission familiale des vignobles. Face à ce constat alarmant, les représentants des producteurs pressent les parlementaires d’alléger la facture pour permettre aux nouvelles générations de prendre la relève.
Des vignes qui s’envolent, un “cadeau empoisonné” pour les héritiers
D’après les professionnels du secteur, la flambée des prix du foncier viticole, couplée à une fiscalité sur les successions particulièrement lourde en France, met en péril la pérennité des exploitations familiales. Jérôme Bauer, président de la Confédération nationale des appellations d’origine contrôlée, a ainsi affirmé lors d’une conférence de presse :
On est en train de perdre des joyaux que seuls des investisseurs financiers ou des grands groupes ont les moyens de reprendre.
Pour Thiébault Huber, représentant des vignerons de Bourgogne, les vignes deviennent un véritable “cadeau empoisonné” pour les enfants de viticulteurs. Ces derniers se retrouvent contraints de s’endetter sur 40 ans pour régler les frais de succession, les privant ainsi de toute capacité d’investissement. Un constat partagé par Maxime Toubart, du syndicat général des vignerons de Champagne, qui souligne :
Ce qu’on veut, c’est transmettre à nos enfants, installer des jeunes, continuer à faire vivre une histoire.
La Bourgogne, un cas emblématique
La situation en Bourgogne illustre parfaitement les défis auxquels sont confrontés les vignerons. Récemment, le groupe de luxe LVMH a ainsi déboursé pas moins de 15,5 millions d’euros pour acquérir seulement 1,3 hectare de vignes. Face à de tels montants, les exploitations familiales peinent à rivaliser, comme l’explique Thiébault Huber :
On ne sera plus propriétaire de nos terres parce qu’on n’y arrivera plus.
Et d’ajouter que, contrairement aux idées reçues, il ne s’agit pas de “problèmes de riches”. Au contraire, cette situation a déjà “détruit des familles”.
Un appel à alléger la fiscalité sur les transmissions
Pour faire face à cette problématique, les organisations représentatives des vignerons, rejointes par le principal syndicat agricole FNSEA, réclament un élargissement aux terres agricoles d’un dispositif fiscal existant. Celui-ci permet d’alléger considérablement la taxation lors de la transmission d’entreprises familiales. En contrepartie, les repreneurs s’engageraient à conserver les parcelles pendant au moins 15 ans.
Maxime Toubart, du syndicat général des vignerons de Champagne, a ainsi lancé un vibrant “appel du cœur” aux parlementaires. En Champagne, où l’hectare avoisine le million d’euros, un enfant souhaitant reprendre les vignes de ses parents doit actuellement s’acquitter de 150 000 euros de droits de succession. Avec la mesure proposée, cette somme serait réduite à 50 000 euros.
Préserver un patrimoine viticole d’exception
Au-delà des enjeux économiques, c’est tout un pan du patrimoine français qui est en jeu. Les vignobles, façonnés par des générations de viticulteurs passionnés, sont le fruit d’un savoir-faire ancestral et participent au rayonnement de la France dans le monde. Faciliter leur transmission au sein des familles apparaît donc comme un impératif pour préserver ces terres d’exception.
Si les pouvoirs publics semblent avoir pris la mesure du problème, reste à définir précisément les contours de la réforme fiscale attendue par la profession. Les prochains mois seront décisifs pour l’avenir des vignobles français, qui espèrent pouvoir continuer à se transmettre de génération en génération, dans le respect de leur histoire et de leurs terroirs uniques.