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Légalisation des casinos en ligne : atout ou addiction ?

Le gouvernement veut légaliser les casinos en ligne pour récupérer 1 milliard d'euros. Un pari risqué qui fait débat : concurrence déloyale, risques d'addiction... Les casinotiers montent au créneau.

En quête de nouvelles recettes pour boucler son budget 2025, le gouvernement français envisage une mesure aussi inédite que controversée : légaliser les casinos en ligne. Bien qu’illégaux, ces sites de jeux d’argent virtuels pullulent déjà sur la toile, représentant un manque à gagner fiscal estimé à 1 milliard d’euros par an. Mais cette manne financière espérée ne risque-t-elle pas de se payer au prix fort en termes de santé publique et d’emplois ? Décryptage d’un dossier brûlant.

Le jackpot des taxes en ligne de mire

Selon nos informations, Bercy aurait convaincu Matignon d’ouvrir les machines à sous et tables de jeux virtuelles dans la foulée du refus du Conseil d’État d’augmenter les prélèvements sur les jeux d’argent physiques. Un amendement en ce sens a été discrètement glissé samedi soir dans le projet de loi de finances 2025.

Officiellement, il s’agit d’assainir un marché illégal en plein boom. Mais l’objectif est surtout de récupérer le pactole fiscal associé, chiffré à près de 1 milliard d’euros par an. Une aubaine budgétaire que l’exécutif compte bien saisir, 14 ans après la libéralisation partielle des jeux d’argent en ligne.

Il s’agit d’une fausse bonne idée menaçant casinos terrestres et ressources des communes où ils sont implantés.

Philippe Bon, délégué général de Casinos de France

Des acteurs historiques à la mise

Mais la pilule passe mal auprès des casinotiers traditionnels. Le secteur affiche son opposition franche à une concurrence en ligne qualifiée de “déloyale” et prévoit jusqu’à 15 000 emplois détruits parmi les 45 000 directs et indirects de la filière. Des pertes qui se répercuteraient inévitablement sur les finances des villes abritant des établissements.

Le gouvernement tente de calmer le jeu en promettant une taxation “supérieure à 50%” des futurs opérateurs en ligne. Mais cela suffira-t-il à rééquilibrer les chances entre casinos physiques lourdement taxés et concurrents virtuels aux coûts allégés ?

Le spectre de l’addiction et de l’endettement

Au-delà de ces enjeux économiques, c’est le risque d’addiction aux jeux d’argent qui alarme les spécialistes. D’après plusieurs études, les machines à sous virtuelles seraient parmi les jeux les plus addictifs avec leur succession rapide de petits gains. Un phénomène que confirment certains habitués de casinos physiques :

Ici, quand je gagne un peu, je m’en vais. Mais à la maison sur Internet, ce ne serait pas pareil, on aurait tendance à rejouer…

Sans les garde-fous et la surveillance des établissements physiques, la spirale du jeu compulsif en ligne pourrait vite échapper à tout contrôle. Avec à la clé, des risques d’endettement et de paupérisation touchant particulièrement les plus fragiles.

Entre pragmatisme et principe de précaution

Interpellé sur ces dangers par TF1, le ministre de l’économie Antoine Armand s’est voulu rassurant sans être totalement convaincant. Tout en assurant que ces enjeux de santé publique seront pris en compte, il insiste surtout sur l’urgence budgétaire et “l’importance de réguler des sites illégaux afin qu’ils contribuent à l’effort fiscal national.”

Entre la perspective de nouvelles rentrées fiscales et le respect du principe de précaution, le gouvernement marche sur une ligne de crête périlleuse. Le débat promet d’être animé à l’Assemblée où la majorité relative devra certainement lâcher du lest. Les députés de l’opposition pointent déjà les contradictions d’un exécutif prônant la responsabilité budgétaire et la protection de la jeunesse mais prêt à tous les compromis pour boucler ses comptes.

Je comprends le besoin de recettes mais légaliser un marché si addictif serait irresponsable et incohérent.

Thomas Chazal, député LR du Rhône

Quoi qu’il en soit, le gouvernement semble déterminé à passer en force quitte à lancer les dés sur la santé publique. Une prise de risque maximale dont les joueurs pathologiques pourraient bien être les grands perdants. La balle est désormais dans le camp des parlementaires qui devront assumer les conséquences de leur vote pour le budget et les Français.

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