La détresse et l’exaspération sont palpables dans les campagnes ariégeoises. Près de 10 mois après leur mobilisation d’ampleur pour défendre leur profession en crise, les agriculteurs du département attendent toujours des actes forts de la part du gouvernement. Faute de réponses à leurs revendications, ils se disent prêts à durcir le ton et à lancer de nouvelles actions coup de poing.
Des promesses non tenues qui passent mal
En février dernier, face à une contestation qui prenait de l’ampleur sur tout le territoire, l’exécutif avait dévoilé une série de mesures en faveur du monde agricole. Mais sur le terrain, les professionnels déplorent le manque de concrétisation de ces engagements.
On fonctionne avec des mesures d’urgence, des mesures d’urgence dues aux crises sanitaires. Aujourd’hui, par exemple, en élevage, on a des conséquences indirectes de ces crises sanitaires et ça ne va plus.
Sébastien Durand, président de la FDSEA Ariège
Parmi les griefs des agriculteurs : la faiblesse et la lenteur de la mise en place des indemnisations pour les éleveurs touchés par la fièvre catarrhale et d’autres épizooties, la pression grandissante des normes environnementales ou encore le manque de valorisation de leurs productions. Autant de facteurs qui grèvent la rentabilité des exploitations.
Un sentiment d’abandon
Au fil des mois, c’est un profond sentiment d’abandon qui se développe dans les fermes ariégeoises. Beaucoup ont la sensation de ne pas être entendus, voire méprisés par les pouvoirs publics.
On travaille 70-80 heures par semaine et on ne se sort pas un Smic.
Un agriculteur ariégeois
Malgré leur labeur acharné, nombre d’entre eux peinent à dégager un revenu décent de leur activité. Les exploitations familiales sont menacées, avec une transmission compromise vers les jeunes générations. C’est tout un pan essentiel de l’économie et de l’identité du département qui vacille.
Coup de semonce à la préfecture
Exaspérés par cette situation, environ 200 agriculteurs ont déposé lundi soir des panneaux de signalisation dérobés devant la préfecture à Foix. Un acte symbolique fort pour signifier leur ras-le-bol et interpeller les autorités.
Les panneaux sont un signe de notre mécontentement au niveau de ce qui a été annoncé l’hiver dernier et que l’on n’a toujours pas.
Kevin Audouy, président des Jeunes Agriculteurs de l’Ariège
Pour l’heure, la préfecture se veut rassurante, assurant que les dispositifs sont en cours de déploiement pour soutenir la profession. Mais le compte n’y est pas pour les principaux intéressés qui réclament des mesures bien plus ambitieuses et pérennes pour enrayer le déclin de l’agriculture française.
Vers un nouvel hiver de colère ?
Si leurs revendications restent lettre morte, les agriculteurs ariégeois se disent prêts à durcir leurs actions dans les prochaines semaines. Des menaces qui font planer le spectre d’une réédition de la grande mobilisation de l’hiver dernier, qui avait vu des blocages et opérations coup de poing partout en France.
Une perspective inquiétante alors que les organisateurs de ce mouvement inédit misent sur un élargissement de la contestation à l’ensemble des acteurs des filières agricoles et agroalimentaires. L’objectif : construire un véritable rapport de force pour imposer une autre politique agricole, garantissant la survie des exploitations et la souveraineté alimentaire du pays.
Dans ce bras de fer qui s’annonce, le gouvernement joue gros. S’il ne parvient pas à apaiser rapidement la colère qui gronde, il s’expose à un embrasement social majeur dans les territoires ruraux, mettant en péril tout un pan stratégique de l’économie nationale. Les prochaines semaines s’annoncent décisives.