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Condamnation par contumace d’un cinéaste ukrainien en Russie

Un grand nom du cinéma ukrainien condamné à 8,5 ans de prison par un tribunal russe. Son crime ? Avoir osé dénoncer la guerre en Ukraine. Une décision choquante qui soulève de nombreuses questions sur la liberté d'expression en Russie...

Une condamnation qui fait froid dans le dos. Le cinéaste ukrainien de renom Alexandre Rodnianski a été condamné lundi à huit ans et demi de prison par contumace par un tribunal russe. Son crime ? Avoir publié sur les réseaux sociaux des messages dénonçant l’offensive russe en Ukraine, notamment la mort de civils dans des frappes imputées à l’armée du Kremlin.

Producteur de cinéma et de télévision influent, Rodnianski est connu pour avoir travaillé sur des films russes nominés aux Oscars comme “Faute d’amour” et “Léviathan” du réalisateur Andreï Zviaguintsev. Né à Kiev, il a œuvré pendant près de vingt ans en Russie où il était devenu une figure majeure du 7e art, avant de quitter le pays suite au déclenchement de la guerre en février 2022.

Une justice russe de plus en plus répressive

Le verdict du tribunal moscovite s’appuie sur un article controversé du code pénal russe punissant la diffusion de “fausses informations” sur l’armée. Cet article, comme plusieurs autres, est régulièrement brandi par la justice pour museler toute critique de l’intervention militaire en Ukraine.

Quelques mois avant sa condamnation, en octobre 2022, Alexandre Rodnianski avait déjà été fiché par les autorités russes comme “agent de l’étranger”, un label infamant utilisé pour réprimer les voix dissidentes.

Un cinéaste qui refuse de se taire

Loin de se laisser intimider, le réalisateur a réagi avec force à sa condamnation sur Telegram :

Je ne reconnais ni la légalité de ce procès, ni celle de l’article absolument absurde sur lequel il se base. La guerre menée par la Russie en Ukraine est une guerre de conquête méprisable. Aucun tribunal ne pourra m’empêcher de le clamer haut et fort.

Alexandre Rodnianski

Un procès emblématique de la répression en Russie

Au-delà du cas personnel d’Alexandre Rodnianski, ce procès met en lumière la détermination du régime de Vladimir Poutine à faire taire par tous les moyens ceux qui s’opposent à la guerre en Ukraine, y compris de grandes figures culturelles.

Selon des sources proches du dossier, le cinéaste était visé pour quatre publications sur les réseaux sociaux en 2022 et 2023 dans lesquelles il condamnait la mort de civils ukrainiens dans des bombardements russes. Des propos jugés inacceptables par le Kremlin qui nie systématiquement viser des cibles non militaires, malgré les nombreux rapports d’ONG documentant le contraire.

Un signal inquiétant pour la liberté d’expression

La sévérité de la peine infligée à Rodnianski, huit ans et demi de prison, est un signal particulièrement inquiétant envoyé aux opposants à la guerre. Elle illustre la volonté des autorités russes de criminaliser toute forme de dissidence, même exprimée depuis l’étranger par des personnalités reconnues.

Cette condamnation risque de renforcer un peu plus l’autocensure et le climat de peur chez les artistes, journalistes et intellectuels russes critiques du Kremlin. Beaucoup ont déjà fait le choix douloureux de l’exil pour continuer à s’exprimer librement, sans risquer la prison.

Un coup dur pour le cinéma russe

Au-delà de ses conséquences sur la liberté d’expression, le verdict visant Alexandre Rodnianski est aussi un coup porté au cinéma russe. Pendant deux décennies, le producteur a largement contribué à son rayonnement international, en participant à des films multi-primés comme “Léviathan”.

Son départ forcé de Russie, comme celui d’autres grands noms, risque d’appauvrir durablement la scène culturelle du pays. Un scénario malheureusement probable tant que le conflit ukrainien perdurera et que la chape de plomb continuera de s’abattre sur les voix dissonantes en Russie.

Il reste à espérer que des cinéastes courageux comme Alexandre Rodnianski continueront malgré tout à créer et à s’exprimer, depuis leur exil, pour que leur art demeure un espace de résistance face à l’oppression et à la guerre.

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