À deux semaines d’une élection présidentielle cruciale aux États-Unis, le secrétaire d’État américain Antony Blinken effectue un nouveau déplacement au Proche-Orient. Sa mission : tenter de capitaliser sur la mort récente d’un chef du Hamas pour obtenir un cessez-le-feu dans la bande de Gaza, théâtre d’un conflit meurtrier depuis plus d’un an maintenant.
Pour la vice-présidente démocrate Kamala Harris, engagée dans une âpre bataille face à Donald Trump, une percée diplomatique serait plus que bienvenue. Ce 11ème voyage de Blinken dans la région depuis le début de la guerre témoigne de l’importance de l’enjeu, tant sur le plan humanitaire que politique.
Une « dernière chance » pour la paix ?
Lors de sa précédente visite en août, le chef de la diplomatie américaine avait averti qu’il s’agissait peut-être de l’ultime opportunité pour parvenir à un cessez-le-feu sous l’égide des médiateurs internationaux. Malgré l’échec de cette tentative, l’administration Biden veut croire que la donne a changé avec l’élimination de Yahya Sinouar, influent dirigeant du Hamas, par une frappe israélienne la semaine passée.
Mais la situation reste explosive, avec une escalade des combats au Liban impliquant le Hezbollah, allié de l’Iran comme le Hamas, et la crainte d’une riposte israélienne massive après le tir de 200 missiles iraniens début octobre. Autant d’éléments qui pressent la communauté internationale d’agir au plus vite.
L’aide humanitaire comme levier
Pour tenter d’infléchir la position israélienne, les États-Unis jouent la carte de l’aide militaire, qui se chiffre en milliards de dollars chaque année. Blinken et le ministre de la Défense Lloyd Austin ont ainsi averti qu’une partie de ces subsides pourrait être suspendue si des couloirs humanitaires n’étaient pas ouverts vers Gaza dans les 30 jours.
La situation humanitaire dans le territoire palestinien, dévasté par des mois de frappes israéliennes, a été qualifiée de « catastrophique » par l’ONU.
Outre l’urgence humanitaire, l’enjeu est aussi politique pour Joe Biden, qui achève son mandat dans un contexte tendu. Le soutien quasi inconditionnel apporté à Israël passe de plus en plus mal auprès de l’aile gauche du parti démocrate. À l’inverse, les Républicains poussent Benjamin Netanyahu à « finir le travail » à Gaza.
Préparer le « jour d’après »
Au-delà de l’objectif immédiat d’un cessez-le-feu, Antony Blinken entend jeter les bases du « jour d’après », notamment en termes de reconstruction et de gouvernance à Gaza. Un vaste chantier qui soulève de nombreuses questions, à commencer par celle de la sécurité dans le territoire palestinien.
Selon des sources proches du dossier, les pays arabes seraient réticents à payer seuls la facture sans perspective de création d’un État palestinien viable, une option rejetée par Israël. En parallèle, les États-Unis font miroiter une possible normalisation des relations entre l’État hébreu et l’Arabie saoudite, ce qui constituerait un tournant historique.
Les prochains jours s’annoncent donc décisifs pour l’avenir de la région, avec en toile de fond le spectre d’une nouvelle explosion de violence en cas d’échec diplomatique. Antony Blinken, artisan d’une stratégie de petits pas, a-t-il cette fois les moyens de ses ambitions ? Réponse dans les prochaines semaines, alors que la campagne présidentielle américaine entre dans sa dernière ligne droite.