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Biopiraterie : La Menace Invisible de la COP16

La COP16 sur la biodiversité en Colombie met en lumière un enjeu crucial : la biopiraterie. Ce phénomène invisible menace les pays en développement, privés des bénéfices liés à l'exploitation de leurs ressources génétiques. Mais des solutions se dessinent à l'horizon...

Imaginez un instant que les trésors de la nature, jalousement préservés par des communautés locales depuis des siècles, soient soudainement exploités par de grandes entreprises sans qu’elles n’en reçoivent le moindre bénéfice. C’est précisément le phénomène de biopiraterie qui sera au cœur des débats de la 16ème Conférence des Parties (COP16) sur la biodiversité, qui s’ouvre ce lundi 21 octobre à Cali en Colombie.

La biopiraterie, une menace invisible aux lourdes conséquences

Mais qu’est-ce que la biopiraterie exactement ? Ce terme, apparu dans les années 90, désigne l’utilisation des ressources génétiques de la biodiversité à des fins économiques, sans que les communautés qui les ont préservées n’en reçoivent une juste part des bénéfices. Plantes, animaux, micro-organismes… Ces ressources naturelles recèlent souvent des propriétés extraordinaires, prisées par l’industrie pharmaceutique, les biotechnologies ou encore les cosmétiques.

Un exemple parmi tant d’autres : selon des sources proches du dossier, un laboratoire aurait développé des composés anticancéreux à partir d’un arbre de la forêt malaisienne, générant des ventes annuelles de plus de 300 millions de dollars, sans que la Malaisie n’en voie la couleur. Un marché juteux qui profite principalement aux pays développés, au détriment des pays riches en biodiversité mais pauvres économiquement.

Le protocole de Nagoya, un premier pas

Face à ce pillage, la communauté internationale a tenté de réagir avec le Protocole de Nagoya, entré en vigueur en 2014. Ce traité prévoit un partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques. En clair, chaque utilisation d’une plante ou d’un animal prélevé doit donner lieu à une compensation pour le pays d’origine.

Mais avec la numérisation des séquences génétiques, regroupées au sein de gigantesques bases de données, les entreprises peuvent désormais contourner le protocole. Plus besoin de se rendre physiquement dans un pays pour prélever un échantillon, il suffit de quelques clics pour accéder à l’information génétique convoitée. Un vide juridique qui prive les pays en développement de précieuses ressources financières.

Si une contribution obligatoire de 0,1% est adoptée, cela représente potentiellement un milliard de dollars.

Sébastien Treyer, directeur de l’Iddri

Vers un mécanisme mondial de partage des bénéfices ?

Pour y remédier, de nombreux pays du Sud réclament la mise en place d’un “mécanisme mondial de partage des bénéfices” pour l’usage des séquences numérisées. Une proposition portée par une trentaine d’États, dont la Chine, le Brésil et l’Afrique du Sud. Ils exigent également que les entreprises dévoilent systématiquement l’origine des ressources génétiques utilisées lors des demandes de brevet. Des mesures ambitieuses qui restent encore à négocier, notamment avec les pays du Nord où se concentrent les industries concernées.

Les enjeux de la COP16

C’est tout l’enjeu de la COP16 qui s’ouvre en Colombie. Les participants devront notamment s’accorder sur la définition même d’une ressource génétique. Faut-il prendre en compte le pays où a poussé la plante, ou son premier lieu d’origine ? Les ressources génétiques humaines doivent-elles être incluses ? Autant de questions épineuses à trancher en seulement quelques jours.

Il s’agira également de clarifier les modalités du mécanisme de compensation : quelles entreprises devront y contribuer ? De manière volontaire ou obligatoire ? Et surtout, comment répartir équitablement cet argent ? Des négociations ardues en perspective, mais cruciales pour l’avenir de la biodiversité mondiale et des populations qui en dépendent.

Car au-delà des enjeux économiques, c’est bien d’équité et de souveraineté dont il est question. Alors que l’érosion de la biodiversité s’accélère de manière alarmante, il est plus que jamais nécessaire de repenser notre rapport au vivant. Et cela passe par une réelle reconnaissance de la valeur des savoirs traditionnels et des droits des communautés locales sur leurs ressources naturelles.

La COP16 sera-t-elle à la hauteur de ces défis ? Réponse dans les prochains jours, avec on l’espère des avancées à la hauteur des enjeux. Car il y a urgence : chaque jour, ce sont des espèces entières qui disparaissent, emportant avec elles des trésors génétiques inestimables. Il est temps d’agir, pour que la biopiraterie ne soit plus qu’un mauvais souvenir.

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