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L’Égypte face aux défis économiques liés aux tensions régionales

L'Égypte traverse une crise économique sans précédent. Le président al-Sissi met en garde contre une pression "insupportable" pour la population, menaçant de remettre en cause les réformes exigées par le FMI. Les défis régionaux pèsent lourd sur l'économie égyptienne, déjà fragilisée par une dette colossale et une inflation record. Jusqu'où ira la spirale ?

L’Égypte fait face à des vents contraires économiques d’une rare violence. Écrasé par une dette extérieure abyssale de près de 165 milliards de dollars et une inflation galopante, le pays traverse actuellement la pire crise économique de son histoire moderne. Un contexte explosif qui pousse le président Abdel Fattah al-Sissi à tirer la sonnette d’alarme.

Lors d’un congrès mondial au Caire ce dimanche, le chef de l’État a prévenu que si les “défis” régionaux créaient une pression économique “insupportable” pour la population, les réformes en cours dans le cadre d’un prêt du Fonds monétaire international (FMI) devraient être “réexaminées”. Un avertissement qui sonne comme un coup de semonce pour les partenaires internationaux du pays.

Une économie asphyxiée par les conflits régionaux

Derrière cette déclaration alarmiste, une réalité implacable : l’économie égyptienne pâtit lourdement d’une série de chocs exogènes liés aux tensions géopolitiques dans la région. Les attaques répétées des rebelles houthis yéménites contre les navires commerciaux en mer Rouge et dans le golfe d’Aden, soupçonnés de liens avec Israël, ont fait chuter les revenus stratégiques du canal de Suez.

“Nous avons perdu six à sept milliards de dollars au cours des sept, huit ou dix derniers mois”, a déploré le président al-Sissi, pointant du doigt l’impact dévastateur de ces attaques sur les finances du pays. Des pertes colossales qui viennent s’ajouter à une conjoncture économique déjà plus que morose.

Le spectre d’un dérapage incontrôlé

Car l’Égypte est aujourd’hui prise en étau entre le marteau de la dette et l’enclume de l’inflation. Pour tenter de reprendre la main, les autorités ont dû se résoudre à solliciter l’aide du FMI, obtenant en mars un nouveau prêt de 5 milliards de dollars qui s’ajoute aux 3 milliards déjà débloqués fin 2022. Mais cette perfusion de liquidités a un prix : des réformes économiques d’ampleur, allant d’un assouplissement du taux de change à un renforcement du secteur privé, en passant par une lutte acharnée contre la vie chère.

Des remèdes de cheval qui ne sont pas sans risques pour la stabilité sociale du pays. Avec une livre égyptienne qui a perdu les deux tiers de sa valeur en moins de deux ans au gré des dévaluations successives, et une envolée des prix des carburants de près de 17% pour la seule année en cours, la grogne populaire menace à tout moment de s’embraser.

La quadrature du cercle pour le pouvoir

Face à ce mécontentement grandissant, le pouvoir marche sur des œufs. “Si ces défis nous amènent à exercer une pression insupportable sur l’opinion publique, la situation doit être réexaminée avec le FMI”, a ainsi mis en garde le président al-Sissi, conscient du risque politique que représenterait un rejet massif des réformes par la rue.

Mais l’équation est loin d’être simple pour le raïs égyptien. Renoncer au programme de réformes négocié avec le FMI, c’est prendre le risque de voir les vannes du crédit international se fermer, précipitant le pays dans une crise de liquidités potentiellement fatale. À l’inverse, maintenir le cap de l’austérité à marche forcée, c’est s’exposer à une explosion sociale aux conséquences imprévisibles.

L’Égypte “entreprend ce programme (de réformes) dans des circonstances régionales et mondiales très difficiles” qui “doivent être prises en compte”, a affirmé le président al-Sissi, tentant de justifier ses atermoiements.

Une façon de gagner du temps, alors que les prochains mois s’annoncent décisifs pour l’avenir économique du pays. Avec en ligne de mire, le prochain versement de l’aide du FMI, théoriquement prévu en septembre mais déjà repoussé sine die, le pouvoir égyptien joue désormais une partie d’échecs complexe, où le moindre faux pas pourrait précipiter le pays dans l’abîme.

Une chose est sûre : entre des marges de manœuvre économiques quasi-inexistantes, des tensions sociales à couper au couteau et une instabilité régionale chronique, l’Égypte n’a pas fini de naviguer en eaux troubles. Et le temps presse pour éviter le naufrage.

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