Alors que l’emblématique cathédrale Notre-Dame de Paris s’apprête à rouvrir ses portes le 8 décembre prochain, 5 ans après l’incendie qui l’a dévastée, une question brûlante refait surface : faut-il instaurer un droit d’entrée payant pour accéder à l’édifice ? Si la gratuité reste de mise en France, de nombreux monuments religieux très visités à l’étranger ont franchi le pas. Entre nécessité de financer l’entretien du patrimoine et volonté de préserver l’accès libre aux lieux de culte, le débat est lancé.
Une pratique répandue à l’étranger
De la Sagrada Familia à Barcelone à l’abbaye de Westminster à Londres en passant par la basilique Saint-Pierre de Rome, les exemples de lieux de culte demandant une contribution financière aux visiteurs ne manquent pas à travers le monde. Une façon pour ces monuments d’assurer leur entretien et leur restauration grâce aux revenus du tourisme.
Ces monuments doivent être entretenus sinon restaurés, et les ressources publiques disponibles sont limitées, alors que les millions de visiteurs qui les fréquentent sont prêts à acquitter une redevance somme toute marginale.
– explique Christian Gérondeau, essayiste et ancien président de la Caisse nationale des monuments historiques.
Selon une étude menée par le comparateur de voyage Omio en 2019, la Sagrada Familia était le monument religieux le plus cher d’Europe avec un ticket d’entrée à 17€, suivie par la cathédrale Saint-Paul de Londres (16,50€) et le Duomo de Florence (15€). Des sommes conséquentes, mais relativement faibles comparées au budget global d’un séjour touristique.
La France, une exception culturelle ?
Pourtant, en France, les principaux lieux de culte restent accessibles gratuitement, à l’instar de Notre-Dame de Paris avant sa fermeture. Une particularité hexagonale liée au principe de laïcité et à la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État. Les édifices religieux étant propriétés des communes, leur accès doit demeurer libre et gratuit.
Des voix s’élèvent cependant pour faire évoluer ce modèle face aux défis de la conservation du patrimoine. Ainsi, Mgr Aupetit, archevêque de Paris, s’est dit favorable à une “contribution volontaire” des visiteurs de la cathédrale, sur le modèle du Sacré-Cœur de Montmartre.
On pourrait imaginer que les touristes laissent 2 ou 3 euros. Cela nous aiderait pour l’entretien, qui est considérable.
– a-t-il suggéré dans un entretien au Parisien en 2019.
Concilier accès et préservation
Une proposition qui ne fait toutefois pas l’unanimité. Pour beaucoup, instaurer un ticket d’entrée, même sous forme de “contribution volontaire”, reviendrait à privatiser un bien commun et à entraver la liberté de culte. Surtout, l’afflux de visiteurs pourrait pâtir d’une telle mesure, privant Notre-Dame d’une partie de son rayonnement.
Une alternative pourrait alors être de limiter le droit d’entrée payant aux seuls touristes, en maintenant la gratuité pour les fidèles et résidents. Un compromis déjà adopté par certains lieux emblématiques comme l’abbaye du Mont-Saint-Michel, avec des résultats mitigés en termes de gestion des flux.
Hasard du calendrier, le débat ressurgit au moment où le chantier pharaonique de Notre-Dame touche à sa fin, cinq ans après l’incendie. Une reconstruction largement financée par les dons et le mécénat, mais dont les coûts d’entretien futurs soulèvent des questions. Autant d’enjeux complexes auxquels devront répondre l’État et le diocèse, pour préserver ce joyau en partage.