Face à l’arrivée en Albanie des premiers migrants interceptés dans les eaux italiennes, la Grèce appelle de ses vœux une approche européenne concertée. Cet accord bilatéral sans précédent entre Rome et Tirana, qualifié de controversé, soulève des inquiétudes quant à une possible externalisation de la demande d’asile, jamais vue auparavant en Europe.
La Grèce met en garde contre les accords bilatéraux
Nikos Panagiotopoulos, ministre grec des Migrations et de l’Asile, a affirmé mercredi que son pays souhaitait privilégier “une solution européenne” car “les accords bilatéraux ne mèneront nulle part”. Selon lui, “personne ne peut s’attaquer seul au problème”, c’est pourquoi le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis compte plaider pour une approche commune lors du prochain sommet européen.
Une structure d’accueil limitée en Albanie
Le ministre grec a tenu à relativiser la portée de l’accord entre la Croatie et l’Albanie, soulignant que “cette structure est destinée à accueillir moins de 1 000 personnes”. Il a ainsi mis en perspective l’ampleur du défi migratoire : “Il ne s’agit donc pas d’un super projet alors que nous parlons de centaines de milliers [de migrants entrant dans l’Union européenne] au total”.
La Grèce en première ligne
Située aux avant-postes de l’Union européenne, la Grèce est confrontée à un afflux continu de migrants en raison de sa frontière terrestre et maritime avec la Turquie. Athènes ne cesse de marteler qu’une réponse coordonnée des 27 États membres est indispensable face à ce défi.
La suppression unilatérale de Schengen n’est pas la solution.
– Kyriakos Mitsotakis, Premier ministre grec
La Grèce avait critiqué le mois dernier la décision de l’Allemagne de généraliser les contrôles à l’ensemble de ses frontières pendant six mois, y voyant une remise en cause de l’espace Schengen de libre circulation. Le pays se montre également réticent à l’idée d’accueillir de nouveaux demandeurs d’asile après avoir connu une forte augmentation de leur nombre cette dernière décennie.
Vers une réforme du régime d’asile européen ?
La position de la Grèce met en lumière les failles du système actuel et la nécessité d’une refonte en profondeur de la politique migratoire européenne. Plusieurs pistes sont évoquées, comme une meilleure répartition des demandeurs d’asile entre États membres, un renforcement des contrôles aux frontières extérieures ou encore une coopération accrue avec les pays d’origine et de transit.
Mais les divergences persistent entre pays “de première entrée” comme la Grèce, l’Italie ou Malte, qui réclament davantage de solidarité, et ceux d’Europe centrale et orientale, qui s’opposent aux quotas obligatoires de répartition. L’unanimité requise complique l’adoption de réformes ambitieuses, alors que l’urgence humanitaire demeure.
En attendant une hypothétique refonte du régime d’asile européen, l’accord entre la Croatie et l’Albanie illustre la tentation pour certains États de trouver des solutions ad hoc, au risque de fragmenter encore davantage la réponse européenne. Un scénario que rejette la Grèce, convaincue que seule une approche collective et solidaire permettra de relever durablement le défi migratoire.