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La réforme controversée de l’Aide médicale d’État divise le gouvernement

Le sujet brûlant de l'AME met le feu aux poudres au sein du gouvernement. Entre la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq qui refuse d'y "toucher" et le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau qui veut réduire son périmètre, les positions semblent irréconciliables. Quels sont les enjeux de cette polémique ? Analyse.

La question de l’Aide médicale d’État (AME) est revenue sur le devant de la scène politique ces derniers jours, créant de vives tensions au sein du gouvernement. D’un côté, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau souhaite en réduire drastiquement le périmètre. De l’autre, la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq refuse catégoriquement d’y “toucher”. Ce clivage illustre les difficultés de l’exécutif à parler d’une seule voix sur ce dossier sensible.

L’AME, un sujet clivant qui divise la majorité

L’Aide médicale d’État, dispositif permettant aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d’un accès aux soins, est un sujet éminemment politique. Avec un budget d’1,2 milliard d’euros en 2024 et près de 466 000 bénéficiaires fin 2023, l’AME cristallise les tensions entre partisans d’une ligne dure sur l’immigration et défenseurs d’une approche plus sociale.

Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, n’a pas hésité à laisser entendre qu’il pourrait prendre des dispositions par voie réglementaire pour restreindre l’accès à l’AME, souvent présentée comme un “appel d’air” pour l’immigration illégale. Une position aux antipodes de celle de Geneviève Darrieussecq, pour qui “il ne faut pas avoir de tabou mais il ne faut pas créer des fantasmes”.

Geneviève Darrieussecq défend une vision “sanitaire” de l’AME

Médecin de formation, la ministre de la Santé plaide pour le maintien de l’AME au nom de la santé publique. Elle rappelle régulièrement que ce dispositif est aussi “une assurance pour la santé des Français”, permettant d’éviter certaines contagions.

L’aide médicale d’État, c’est aussi une assurance sur la santé des Français pour éviter certaines contagions

Geneviève Darrieussecq, ministre de la Santé

Une position partagée par de nombreux acteurs du monde médical et associatif, qui mettent en garde contre les risques sanitaires d’une restriction de l’accès aux soins pour les populations précaires.

Bruno Retailleau veut “mieux gérer” l’AME

À l’inverse, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau estime qu’il faut réformer l’AME pour mieux en maîtriser les coûts et les conditions d’accès. Sans aller jusqu’à la suppression pure et simple, il prône une gestion “plus rigoureuse” du dispositif.

Il faut voir calmement les choses pour que ceux qui y ont droit puissent la recevoir.

Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur

Cette volonté de réforme est soutenue par une partie de la majorité parlementaire, pour qui l’AME est devenue un symbole du laxisme migratoire. Reste à savoir comment concilier ces approches divergentes au sein du gouvernement.

Les pistes d’une réforme a minima

Pour tenter de sortir de l’impasse, le Premier ministre Michel Barnier a évoqué la possibilité d’une réforme mesurée de l’AME. Sans en changer fondamentalement les principes, il s’agirait de mieux contrôler les conditions d’accès et de renforcer la lutte contre les fraudes.

  • Vérification plus stricte des conditions de résidence et de ressources
  • Restriction du “panier de soins” pris en charge
  • Participation financière symbolique des bénéficiaires

Autant de pistes qui permettraient de réformer l’AME a minima, sans braquer ni le camp social ni les partisans d’une ligne dure. Mais ce scénario du “en même temps” sera-t-il suffisant pour apaiser les tensions? Rien n’est moins sûr, tant le sujet de l’AME est devenu un marqueur politique.

Un débat symptomatique des fractures de la majorité

Au-delà de la question technique de l’AME, cette polémique révèle surtout les profondes divisions idéologiques qui traversent la majorité gouvernementale. Entre une aile droite sécuritaire et identitaire, incarnée par Bruno Retailleau, et une sensibilité plus sociale et humaniste dont Geneviève Darrieussecq est la représentante.

Ces tensions, récurrentes depuis le début du quinquennat, compliquent la tâche de l’exécutif qui peine à trouver un point d’équilibre sur les sujets de société. Et fragilisent la cohésion d’une majorité relative, contrainte de composer avec des partenaires aux visions souvent opposées.

Dans ce contexte, les arbitrages du Premier ministre Michel Barnier sur le dossier de l’AME seront scrutés avec attention. Au risque de décevoir un camp ou l’autre, il devra trancher en s’efforçant de préserver l’unité de son gouvernement. Un exercice d’équilibriste dont dépendra la suite des réformes.

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