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La statue du hijab à Birmingham : un projet abandonné ?

Une statue géante rendant hommage aux femmes portant le hijab devait être érigée à Birmingham en octobre 2023. Un an plus tard, le projet semble avoir été abandonné suite à la polémique qu'il avait suscitée. Que s'est-il passé ? Éléments de réponse.

En septembre 2023, l’annonce de l’installation prochaine d’une sculpture monumentale rendant hommage aux femmes portant le hijab avait fait grand bruit à Birmingham, en Angleterre. Baptisée “La force du hijab”, cette statue de 5 mètres de haut devait être érigée en octobre dans le quartier de Smethwick, connu pour sa forte population musulmane. Un an plus tard, le projet semble pourtant avoir été abandonné dans la plus grande discrétion.

Un projet artistique inédit et controversé

L’œuvre, conçue par le sculpteur britannique Luke Perry, avait été commandée par l’association caritative locale Legacy West Midlands. L’artiste expliquait alors avoir voulu donner de la visibilité aux femmes voilées, estimant qu’elles étaient sous-représentées dans l’art public :

La force du hijab est une pièce qui représente les femmes qui portent le hijab de foi islamique, et elle est vraiment là parce qu’il s’agit d’une partie sous-représentée de notre communauté, mais si importante. Ils ont besoin de visibilité, c’est très important.

– Luke Perry, sculpteur

Si Luke Perry reconnaissait le caractère potentiellement “controversé” de son œuvre, il soulignait l’importance de représenter la diversité de la population britannique. Une prise de position qui n’avait pas manqué de faire réagir.

Une vague de critiques

Dès l’annonce du projet, de nombreuses voix s’étaient élevées pour dénoncer cette initiative. Pour ses détracteurs, ériger une telle sculpture revenait à faire l’apologie d’un signe religieux perçu comme un symbole d’oppression des femmes. Le chroniqueur Mathieu Bock-Côté s’était notamment indigné :

Statue d’une femme en hijab : que comprendre ? C’est une sculpture qui rend hommage à l’effacement des femmes, à une forme de soumission.

– Mathieu Bock-Côté, chroniqueur

D’autres pointaient du doigt le message ambigu envoyé, à l’heure où le port du voile fait l’objet de vifs débats dans plusieurs pays européens.

Un projet discrètement mis de côté

Face à cette levée de boucliers, les promoteurs du projet semblent avoir préféré faire profil bas. En octobre 2024, soit un an après la date prévue pour l’inauguration, la statue de la femme voilée n’a toujours pas vu le jour à Birmingham.

Sur le site de l’association Legacy West Midlands, un bref communiqué indique laconiquement que la sculpture a bien été réalisée, mais qu’un “site d’installation permanent approprié” est toujours recherché. Contactée, l’association n’a pas donné suite à nos demandes d’interview.

De son côté, Luke Perry a supprimé toute mention du projet sur ses réseaux sociaux, où il avait pourtant largement communiqué dessus. L’artiste n’a pas non plus répondu à nos sollicitations.

La triste fin d’un projet audacieux ?

Tout porte donc à croire que la sculpture ne verra jamais le jour, victime collatérale d’une polémique devenue trop embarrassante pour ses initiateurs. Une fin en queue de poisson pour un projet artistique qui se voulait audacieux et inclusif.

Cette sculpture géante de la femme voilée restera comme le douloureux symbole des passions et tensions que continue de cristalliser la question du voile islamique en Europe. Un sujet brûlant sur lequel le dialogue semble toujours aussi difficile, y compris quand l’art s’en mêle.

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