Le Liban est à feu et à sang. Depuis maintenant une semaine, le pays du Cèdre subit une pluie de frappes aériennes israéliennes d’une intensité sans précédent. Les cibles : le Hezbollah, l’ennemi juré de l’État hébreu, mais aussi et surtout les populations civiles, prises au piège d’un conflit qui les dépasse. 100 000 personnes ont déjà fui vers la Syrie voisine, selon les derniers chiffres de l’ONU. Un exode massif qui en dit long sur la gravité de la situation.
Le Hezbollah décapité
Le point d’orgue de cette offensive israélienne a sans nul doute été l’élimination de Hassan Nasrallah, le chef emblématique du Hezbollah. Tué il y a deux jours dans une frappe ciblée sur la banlieue sud de Beyrouth, son fief, sa disparition laisse le mouvement chiite orphelin de celui qui était considéré comme l’homme le plus puissant du Liban. Une victoire éclatante pour Israël, même si le Premier ministre Benyamin Netanyahou a affirmé que la plupart des hauts dirigeants du Hezbollah avaient déjà été éliminés ces derniers mois.
Mais le Hezbollah n’a pas dit son dernier mot. Le numéro deux du mouvement, Naïm Qassem, a pris les rênes dans l’attente d’une nomination officielle. Les représailles ne devraient pas tarder, prolongeant un cycle de violences qui paraît sans fin.
Des civils pris pour cible
Car sur le terrain, ce sont bien les populations civiles qui paient le plus lourd tribut. Les frappes israéliennes, d’une précision chirurgicale, n’épargnent rien ni personne. Même la capitale Beyrouth, jusqu’ici relativement épargnée, a été touchée ce matin, une première depuis le début des hostilités il y a un an. Quatre personnes, dont trois membres du FPLP, un groupe palestinien, ont été tuées.
Le bilan humain ne cesse de s’alourdir, avec déjà deux ressortissants français tués. Face à cette situation, la France, ancienne puissance mandataire, tente une médiation. Le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot est arrivé hier soir à Beyrouth, une première pour un haut responsable occidental depuis le début de la crise. Sa tâche s’annonce ardue.
Israël maintient la pression
Car côté israélien, on ne semble pas prêt à desserrer l’étau. La pression militaire se poursuit, avec des dizaines de nouvelles frappes dans la nuit. L’armée affirme avoir visé des sites de lancement de roquettes et des installations militaires du Hezbollah à travers tout le pays. Elle a également annoncé avoir intercepté un drone en provenance du Liban.
Sur un autre front, Israël a étendu ses opérations au Yémen voisin, bastion des rebelles houthis soutenus par l’Iran, le parrain du Hezbollah. Au moins quatre personnes ont été tuées dans des raids visant des centrales électriques et un port.
Vers une escalade régionale ?
Car c’est bien la grande crainte : voir ce conflit déborder les frontières du Liban et embraser tout le Moyen-Orient. Les différents acteurs régionaux, de l’Iran à la Syrie en passant par l’Arabie saoudite, suivent la situation de très près, prêts à en découdre par procuration.
Les Iraniens n’ont pas envie d’escalade, car ils ne veulent pas se faire tuer pour le Liban ou la Palestine.
Bernard Hourcade, spécialiste de l’Iran au CNRS
Mais pour l’heure, comme le souligne Bernard Hourcade, spécialiste de l’Iran, « les Iraniens n’ont pas envie d’escalade, car ils ne veulent pas se faire tuer pour le Liban ou la Palestine ». Jusqu’à quand ? Nul ne peut le dire avec certitude.
L’avenir en pointillé du Liban
Une chose est sûre, c’est bien l’avenir du Liban qui est en jeu. Déjà exsangue économiquement après des années de crise, le pays est aujourd’hui au bord du gouffre. Les destructions sont immenses, les déplacés se comptent par dizaines de milliers et les perspectives de paix semblent plus que jamais éloignées.
Un sombre tableau qui fait dire à plus d’un observateur que le Liban, ce petit pays qui a déjà tant souffert par le passé, est peut-être en train de vivre ses dernières heures. Un constat amer, mais qui traduit hélas la dure réalité d’une nation prise en étau, victime collatérale d’un conflit qui la dépasse. L’histoire retiendra peut-être que c’est ici, sur les rives de la Méditerranée, que se joue une partie de l’avenir du Moyen-Orient. Avec le Liban comme sacrifié sur l’autel des rivalités régionales.