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Assassinat du manager du rappeur Jul : peines alourdies en appel

Rebondissement dans l'affaire de l'assassinat du manager de Jul : en appel, les deux accusés écopent de 30 ans de réclusion. Un procès sous haute tension qui lève le voile sur les dessous du rap marseillais et ses liens avec le grand banditisme...

C’est un procès sous haute tension qui s’est achevé dans la nuit de vendredi à samedi à la cour d’assises d’appel des Bouches-du-Rhône. Mohamed Seghier, 46 ans, et Juan-Gino Marti, 42 ans, ont été condamnés à 30 ans de réclusion criminelle pour l’assassinat en bande organisée de Karim Tir, manager du rappeur marseillais Jul. Une peine alourdie par rapport à la condamnation en première instance qui avait prononcé 25 ans de prison à leur encontre en mars dernier.

Un règlement de comptes sur fond de trafic de drogue

Le 12 juin 2014, Karim Tir, 30 ans, est abattu au volant de son véhicule par des hommes circulant à moto, devant une station de métro à Asnières-sur-Seine, en région parisienne. Une exécution qui porte la marque des règlements de comptes marseillais. La victime, qui avait purgé une peine de 5 ans de prison pour trafic de stupéfiants, s’était reconvertie dans la production musicale, devenant notamment le manager de Jul, étoile montante du rap à l’époque.

Pour l’accusation, cet assassinat s’inscrit dans une vendetta sanglante opposant deux équipes criminelles marseillaises actives dans le trafic de drogue : les Tir et les Remadnia. Mohamed Seghier, présenté comme un membre influent d’une équipe de braqueurs de Marignane, aurait voulu venger la mort de son frère Karim, tué en 2010. Une hypothèse contestée par l’accusé :

«Les Tir et les Remadnia, c’est leur contentieux, je n’ai rien à voir avec eux. Je suis un voleur de voitures, je pouvais faire un braquage mais je ne suis pas un tueur.»

Mohamed Seghier, lors du procès

Le spectre de Zakary Remadnia

En mars dernier, la première cour d’assises avait estimé, au vu des circonstances du meurtre et des images de vidéosurveillance, que le tireur boitant ne pouvait être que Zakary Remadnia, un jeune homme lui-même abattu quelques mois plus tard à Marseille. Mohamed Seghier l’aurait déposé en voiture sur les lieux du crime. Quant à Juan-Gino Marti, il est désigné comme le pilote expérimenté ayant pris en charge le tireur sur la moto après les coups de feu. Un scénario que réfutent leurs avocats, qui ont plaidé l’acquittement dans les deux cas.

Jul, le grand absent

Si le mobile et le déroulé exacts du meurtre restent sujets à caution pour la défense, un protagoniste central brille par son absence : Jul lui-même. La star du rap marseillais a refusé de comparaître comme témoin au procès en appel et devra s’acquitter d’une amende de 3500 euros. Un mutisme qui entretient le flou sur les éventuels liens entre certains artistes et le milieu du banditisme.

Ce procès met en lumière la violence et les tensions qui gangrènent régulièrement la scène rap marseillaise. Des artistes prometteurs fauchés dans leur ascension, des destins brisés sur fond de règlements de comptes et de trafic de stupéfiants… Loin des paillettes et des punchlines, cette affaire illustre la part d’ombre du rap des quartiers, pris entre succès populaire et dérive mafieuse. Un phénomène qui dépasse Jul et Marseille, et interroge sur le rôle ambigu de certains rappeurs, mi-porte-voix mi-complices d’une criminalité enracinée.

Si les lourdes peines prononcées en appel apportent une forme de réponse judiciaire, elles ne suffiront pas à dissiper tous les non-dits. Mais elles rappellent que la justice entend frapper fort pour endiguer une spirale de violence qui commence à sérieusement écorner l’image d’une ” Marseille capitale du rap”, et avec elle tout un pan de la culture urbaine.

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