Imaginez un pays où rouler en voiture électrique est devenu la norme. Un pays qui, malgré sa puissance pétrolière, a réussi sa transition énergétique dans les transports. Ce pays existe, c’est la Norvège. Le pays scandinave vient en effet de franchir un cap historique : pour la première fois, le nombre de voitures électriques en circulation y dépasse celui des modèles à essence.
La Norvège, championne mondiale de l’électrique
Selon les derniers chiffres du Conseil d’information sur le trafic routier norvégien (OFV), sur les 2,8 millions de véhicules individuels immatriculés dans le pays, 754 303 sont 100% électriques, contre 753 905 modèles essence. Les diesel restent encore majoritaires, mais leur part de marché fond comme neige au soleil. Cette bascule est le fruit d’une politique volontariste menée depuis plus de 30 ans par les autorités norvégiennes.
C’est historique. Un jalon que peu de gens auraient envisagé il y a dix ans.
– Øyvind Solberg Thorsen, directeur de l’OFV
Une fiscalité ultra-incitative
Pour encourager l’achat de véhicules “propres”, la Norvège a mis en place une fiscalité extrêmement favorable aux voitures électriques :
- Exemption de la TVA à 25%
- Dispense des taxes sur l’achat et l’immatriculation
- Réduction des péages, du prix des ferries, du stationnement
- Accès aux voies de bus
Résultat, en août 2024, les voitures électriques ont représenté 94,3% des nouvelles immatriculations dans le pays, un record absolu.
Des infrastructures de recharge développées
Mais les incitations financières ne suffisent pas. Pour rassurer les automobilistes sur l’autonomie, la Norvège a aussi massivement déployé des bornes de recharge sur tout son territoire. On en compte aujourd’hui plus de 22 000, soit environ une pour 10 véhicules électriques, l’un des meilleurs ratios au monde.
Cap sur le 100% électrique en 2025
Forte de ces résultats, la Norvège vise encore plus haut. Le pays s’est fixé l’objectif ambitieux de ne vendre que des voitures neuves zéro émission dès 2025, soit 10 ans avant l’Union Européenne.
Pourtant, le chemin n’est pas sans embûches. Certains s’inquiètent des conséquences sociales de cette transition accélérée, craignant une mobilité à deux vitesses. Le financement des infrastructures pourrait aussi devenir problématique avec la baisse des rentrées fiscales liées à l’essence.
L’électrification du parc automobile progresse à un rythme soutenu, et la Norvège avance rapidement vers l’objectif de devenir le premier pays au monde dont le parc automobile sera dominé par des voitures électriques.
– Øyvind Solberg Thorsen, directeur de l’OFV
Paradoxe pétrolier
Cette success story de l’électrique a un goût particulier en Norvège. Le pays est en effet le plus grand producteur d’hydrocarbures d’Europe de l’Ouest. Un paradoxe assumé par Oslo, qui utilise justement sa rente pétrolière pour financer sa transition énergétique.
Mais au-delà de cet apparent paradoxe, la stratégie norvégienne est d’une implacable lucidité. Face à l’urgence climatique et l’épuisement annoncé des ressources fossiles, le pays anticipe. En devenant un leader de l’électrique, il espère aussi créer une nouvelle filière industrielle d’avenir, entre constructeurs de véhicules, fabricants de batteries et énergéticiens.
Un modèle à suivre ?
Le pari norvégien sera-t-il payant? Difficile de le dire encore. Mais une chose est sûre, l’exemple scandinave est scruté de près dans le monde entier. Car il pourrait bien dessiner les contours d’un nouveau modèle de développement, conciliant prospérité économique et durabilité écologique.
Bien sûr, toutes les nations ne peuvent pas s’appuyer sur une rente pétrolière pour financer leur virage vert. Mais elles peuvent s’inspirer des recettes norvégiennes : une vision politique de long terme, un soutien fiscal massif à la demande, et des investissements conséquents dans les infrastructures.
Face aux défis environnementaux, la réussite de la Norvège montre qu’un autre avenir est possible pour l’automobile, et plus largement pour nos systèmes de transports. Une révolution silencieuse, propre, que de plus en plus de pays semblent prêts à embrasser. La route est encore longue, mais la direction est donnée.