C’est un événement sans précédent dans l’histoire de la Ve République. Ce mardi 17 septembre 2024, le bureau de l’Assemblée nationale a jugé recevable la procédure de destitution du président Emmanuel Macron, initiée par les députés de La France insoumise (LFI). Une première qui ouvre la voie à des débats historiques au sein du Palais Bourbon.
LFI à l’offensive contre Emmanuel Macron
Tout commence quelques semaines plus tôt, lorsque l’alliance de gauche Nouveau Front populaire, menée par LFI, arrive en tête des élections législatives anticipées. Forte de sa nouvelle majorité à l’Assemblée, LFI réclame alors la nomination d’un premier ministre issu de ses rangs. Une demande à laquelle Emmanuel Macron oppose une fin de non-recevoir, déclenchant l’ire des Insoumis qui crient au “coup de force antidémocratique“.
En réponse, les députés LFI décident de lancer une procédure de destitution contre le président de la République, une première sous la Ve République. Si elle est adoptée, cette motion pourrait contraindre Emmanuel Macron à quitter ses fonctions. Mais la route est encore longue.
Le soutien crucial du Parti socialiste
Premier obstacle franchi ce mardi : le bureau de l’Assemblée nationale, plus haute autorité collégiale du Palais Bourbon, a jugé la procédure de destitution recevable. Un feu vert rendu possible grâce au soutien du Parti socialiste (PS), qui a fait pencher la balance en faveur des Insoumis lors du vote.
Cette procédure étant signée par plus d’un dixième des membres de l’Assemblée, et motivée, nos représentants au bureau voteront en faveur de sa recevabilité.
– Communiqué du groupe socialiste à l’Assemblée
Un choix qui n’a pas été sans déchirer le PS, tiraillé entre son opposition à Emmanuel Macron et sa réticence à s’aligner sur la stratégie des Insoumis. Mais soucieux de ne pas apparaître comme un frein à la volonté populaire, les socialistes ont finalement décidé de laisser la procédure suivre son cours.
Les prochaines étapes du processus
Maintenant que la motion est jugée recevable, elle va pouvoir être examinée sur le fond par la commission des lois de l’Assemblée nationale. Celle-ci entendra les arguments des différentes parties avant de rendre son rapport.
La procédure de destitution sera ensuite débattue dans l’hémicycle du Palais Bourbon, offrant une tribune de choix aux Insoumis pour pilonner la politique présidentielle. Néanmoins, pour être adoptée définitivement, la motion devra recueillir une majorité des deux tiers du Parlement, Assemblée et Sénat réunis. Un seuil qui semble pour l’heure difficilement atteignable.
Une épée de Damoclès sur le quinquennat
Mais même si ses chances d’aboutir sont minces, cette procédure place une épée de Damoclès au-dessus de la tête d’Emmanuel Macron. Affaibli politiquement depuis la perte de sa majorité absolue à l’Assemblée, le chef de l’État voit sa légitimité et son autorité un peu plus ébranlées.
Surtout, les débats à venir promettent d’être particulièrement électriques et pourraient paralyser l’action du gouvernement pendant plusieurs semaines. De quoi compliquer encore un peu plus la mise en œuvre des réformes dans cette seconde partie de quinquennat qui s’annonce d’ores et déjà périlleuse pour l’exécutif.
Une situation inédite sous la Ve République
Au-delà du cas Emmanuel Macron, cette situation est totalement inédite sous la Ve République. Jamais encore une procédure de destitution n’avait franchi l’étape de la recevabilité à l’Assemblée nationale. La plus haute marche atteinte jusqu’ici était celle d’une tentative de destitution de François Hollande en 2016, finalement rejetée par le bureau de l’Assemblée, alors à majorité de droite.
Cette procédure montre que les lignes politiques sont en train de bouger et que le rapport de force s’est inversé au profit des oppositions. Reste à savoir si celles-ci parviendront à transformer l’essai en obtenant le départ anticipé du président. Réponse dans les prochaines semaines, à l’issue de ce bras de fer politique qui s’annonce déjà historique.