Le Bangladesh traverse actuellement l’une des pires crises politiques de son histoire récente. Depuis plusieurs semaines, le pays est secoué par un vaste mouvement de contestation réclamant la démission de la Première ministre Sheikh Hasina, au pouvoir depuis 2009. Ces manifestations antigouvernementales, initialement pacifiques, ont pris un tournant dramatique ce dimanche 4 août, avec des heurts d’une violence inouïe faisant au moins 77 morts selon un nouveau bilan.
Une journée sanglante
C’est dans un climat de tensions extrêmes que des milliers de Bangladais se sont rassemblés dimanche matin à Dacca, la capitale, pour exiger le départ de Sheikh Hasina. À l’appel d’une coalition étudiante, ils entendaient lancer un vaste mouvement de désobéissance civile. Mais très vite, la situation a dégénéré. Des affrontements ont éclaté entre manifestants et partisans du pouvoir, transformant la ville en véritable «champ de bataille» selon un policier. Bilan effroyable de cette journée : au moins 77 morts, dont 14 policiers, et des centaines de blessés.
Une contestation qui s’enracine
À l’origine de ce soulèvement, un mouvement étudiant dénonçant depuis plus d’un mois un système de quotas d’embauche dans la fonction publique, accusé de favoriser les proches du pouvoir. Mais au fil des semaines, les revendications se sont élargies, la colère montant face à la répression qui a fait ses premiers morts le 16 juillet. Désormais, c’est la démission pure et simple de la Première ministre qui est exigée.
Nous voulons que les futures générations puissent vivre librement.
Sakhawat, une jeune manifestante
L’armée, arbitre du conflit ?
Face à cette crise qui s’enlise, tous les regards se tournent vers l’armée. Des officiers à la retraite ont rejoint la contestation, tandis que le chef d’état-major a assuré que l’armée serait «toujours aux côtés du peuple». Une prise de position lourde de sens dans un pays où l’armée a souvent joué un rôle politique de premier plan. Le pouvoir vacille, mais Sheikh Hasina, au pouvoir depuis 15 ans, semble déterminée à s’accrocher. À quel prix ? Le Bangladesh retient son souffle.
Une économie fragilisée
Au-delà du lourd bilan humain, c’est toute l’économie bangladaise qui pourrait pâtir de cette crise. Le secteur textile, pilier de l’économie, s’est ainsi déclaré «solidaire» du mouvement. Dans ce pays de 170 millions d’habitants, où le chômage des jeunes diplômés est massif, la colère sociale menace la stabilité durement acquise ces dernières années. Un fragile équilibre aujourd’hui rompu.
Le spectre de la violence plane sur le Bangladesh, pris dans l’engrenage d’une crise politique qui semble sans issue. Entre répression et radicalisation, le fossé se creuse chaque jour davantage entre le pouvoir et la rue. Sheikh Hasina, qui règne d’une main de fer sur le pays depuis près de 15 ans, parviendra-t-elle à calmer la colère ? Rien n’est moins sûr. Car derrière les revendications initiales sur les quotas d’embauche, c’est un ras-le-bol général qui s’exprime aujourd’hui. Un profond désir de changement, pour une jeunesse qui rêve de liberté et d’avenir. Mais à quel prix ? Celui du sang, comme ce dimanche noir qui a endeuillé la nation ? L’histoire du Bangladesh est à un tournant. L’espoir d’une issue pacifique et démocratique reste mince. Mais il est l’unique voie pour sortir de l’impasse et éviter le chaos.