Sombre constat en ce début d’année 2024 : selon les derniers chiffres de l’Insee, la France a enregistré 8 140 naissances de moins au premier semestre par rapport à la même période l’an dernier. Avec seulement 326 131 bébés nés entre janvier et juin, 2024 est partie pour battre le triste record du plus faible nombre de naissances depuis la Seconde Guerre mondiale, détrônant ainsi l’année 2023 et ses 678 000 nouveau-nés.
Loin d’être un phénomène nouveau, la baisse de la natalité en France s’inscrit dans une tendance de long terme, la courbe des naissances piquant du nez depuis maintenant plus d’une décennie. Pourtant, avec un taux de fécondité qui atteignait encore 1,68 enfant par femme en 2023, l’Hexagone faisait figure de bon élève parmi les pays développés. Mais les Françaises ont désormais leur premier enfant de plus en plus tard, ce qui explique mathématiquement qu’elles en aient moins au final.
Quelles mesures pour enrayer le déclin démographique ?
Face à cette crise des naissances qui s’aggrave d’année en année, le gouvernement cherche des solutions pour inverser la tendance. Emmanuel Macron a annoncé le lancement prochain d’un grand plan de lutte contre l’infertilité, et souhaite également créer un congé de naissance, pour les mères comme pour les pères, en remplacement de l’actuel congé parental jugé de moins en moins attractif.
Ce nouveau congé, qui pourrait voir le jour dès 2025, serait certes plus court mais bien mieux indemnisé. Une concertation avait été engagée il y a quelques mois sur ce sujet, mais elle a été interrompue par la dissolution de l’Assemblée nationale. Il reviendra donc à la nouvelle assemblée de trancher sur ce dossier.
Un modèle social fragilisé
Au-delà de ces mesures, c’est tout notre système de protection sociale qui risque d’être mis à mal par ce déclin démographique. Comme le souligne le démographe Gérard-François Dumont :
“Sur le long terme, cette chute des naissances va fragiliser notre modèle social”. Avec une population active en diminution, c’est tout l’équilibre de notre système par répartition qui est menacé.
– Gérard-François Dumont
Pour enrayer durablement la chute de la natalité, il faudrait selon lui revenir à l’universalité des allocations familiales et supprimer le plafonnement du quotient familial. Des mesures qui représenteraient un coût important pour les finances publiques, à l’heure où la dette atteint des sommets.
Une prise de conscience tardive
Si les pouvoirs publics semblent enfin décidés à agir face à l’ampleur de la crise démographique, on peut toutefois regretter que la prise de conscience ait été si tardive. Cela fait en effet plus de 10 ans que la courbe des naissances s’affaisse inexorablement, sans que cela ne suscite de véritable sursaut politique.
Il aura fallu attendre que les chiffres deviennent réellement alarmants, avec la perspective de passer sous la barre des 600 000 naissances annuelles dans les toutes prochaines années, pour qu’enfin des mesures soient envisagées. Mais il est peut-être déjà trop tard pour inverser cette spirale du déclin démographique dans laquelle la France semble s’être durablement engagée.
Le vieillissement de la population apparaît en effet comme une tendance difficilement réversible, alimentée par l’allongement continu de l’espérance de vie. Et même une politique nataliste volontariste ne produira ses effets que dans plusieurs décennies. D’ici là, la France devra apprendre à faire avec une population active réduite et des dépenses sociales alourdies par le poids des retraites et de la dépendance.
Un véritable défi pour notre modèle social, qui nécessitera des réformes en profondeur et des arbitrages douloureux. La relance de la natalité n’en demeure pas moins un impératif absolu si l’on veut éviter le scénario du déclin. Car c’est bien l’avenir de notre nation qui se joue dans les maternités, ces prochaines années.