Les Jeux Olympiques battent leur plein en France, mais dans l’ombre des exploits sportifs, la délinquance joue sa propre partition. Malgré un déploiement massif des forces de l’ordre, censé avoir un effet dissuasif, les statistiques montrent que les crimes et délits font de la résistance.
La saturation policière, une stratégie aux vertus limitées
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin s’était félicité le 24 juillet d’avoir “quasiment ramené la délinquance à zéro” grâce au dispositif de sécurité mis en place pour les JO. La présence renforcée d’agents en uniforme devait en effet réduire drastiquement la marge de manœuvre des délinquants, en particulier dans l’hypercentre parisien.
Cependant, les données publiées chaque semaine par le service statistique du ministère de l’Intérieur (SSMSI) durant la période olympique et paralympique viennent nuancer ce satisfecit. Si elles reflètent l’activité des services plus qu’une photographie exhaustive de la délinquance, elles montrent malgré tout que cette dernière n’a pas dit son dernier mot.
Des crimes et délits qui résistent à la pression sécuritaire
Malgré la saturation de l’espace public par les forces de l’ordre, certains phénomènes délictuels et criminels semblent peu impressionnés. C’est notamment le cas des violences physiques, qui maintiennent un niveau élevé à l’échelle nationale. Les atteintes aux biens, cambriolages en tête, n’ont pas non plus été éradiquées par la seule présence policière renforcée.
La présence massive des forces de sécurité produit un effet dissuasif indéniable, mais ne peut à elle seule endiguer totalement la délinquance.
Frédéric Lagache, secrétaire général du syndicat Alliance Police nationale
Pour les spécialistes, la persistance de la délinquance en dépit du déploiement sécuritaire illustre les limites d’une approche uniquement axée sur la dissuasion et la saturation. Si elle complique indéniablement l’action des délinquants, elle ne s’attaque pas aux racines du phénomène et ne peut donc suffire à l’endiguer.
Une délinquance protéiforme et adaptable
La résilience de la délinquance face au déploiement massif de forces de l’ordre traduit aussi sa capacité d’adaptation. Contraints par la pression policière, certains délinquants se reportent ainsi vers des zones moins quadrillées ou optent pour des modes opératoires plus discrets.
Les analystes soulignent également le caractère multiforme d’une criminalité qui sait jouer sur différents tableaux. Si les délits de voie publique sont plus exposés à l’action policière, d’autres, comme la cybercriminalité, y échappent plus aisément. La délinquance financière ou les trafics passent aussi largement entre les mailles du filet.
Interpréter avec prudence les chiffres de la délinquance
Au-delà du constat d’une délinquance résistante malgré le déploiement sécuritaire, les experts appellent à une lecture prudente et nuancée des statistiques. Le SSMSI lui-même souligne que ses chiffres hebdomadaires donnent avant tout à voir l’activité des services, pas un état des lieux exhaustif de la délinquance.
Ils invitent aussi à prendre en compte “l’effet JO” dans l’analyse des données : la présence de millions de visiteurs supplémentaires offre mécaniquement plus d’opportunités aux délinquants. Certaines hausses apparentes peuvent donc refléter cette réalité plutôt qu’un véritable regain d’activité délictueuse.
Vers une approche globale de la sécurité ?
Si le renforcement sans précédent du maillage policier durant les JO n’a pas suffi à réduire à néant la délinquance, il a au moins eu le mérite de garantir la sécurité d’un événement planétaire. Mais pour les observateurs, cet épisode démontre surtout la nécessité d’une approche plus globale des questions de sécurité.
Au-delà de la réponse sécuritaire, qui restera toujours indispensable, beaucoup plaident pour une action de long terme sur les causes profondes de la délinquance. Prévention, intégration, réduction des inégalités : autant de leviers complémentaires pour construire une société durablement plus sûre.
Les Jeux Olympiques auront donc été un formidable révélateur des forces et des limites de notre modèle de sécurité. Reste maintenant à capitaliser sur ces enseignements pour façonner une stratégie de sécurité publique à la hauteur des défis de notre époque.