C’est un séisme qui secoue le monde de la tech française. Atos, géant tricolore de l’informatique et partenaire clé des Jeux Olympiques de Paris 2024, se trouve aujourd’hui au bord du précipice. Après des mois d’incertitude sur son avenir, l’entreprise vient d’obtenir l’ouverture d’une procédure de sauvegarde accélérée auprès du tribunal de commerce de Nanterre. Une bouffée d’oxygène inespérée pour ce fleuron en grande difficulté, qui va ainsi pouvoir renégocier sa dette abyssale et tenter d’échapper au pire : la faillite.
Atos dans la tourmente
Fondé en 1997, Atos s’est imposé au fil des années comme un acteur majeur du secteur des services numériques, en France comme à l’international. Présent dans plus de 70 pays, le groupe emploie près de 110 000 salariés et a réalisé un chiffre d’affaires de 11 milliards d’euros en 2021. Mais derrière cette success story se cachent de profondes fragilités, révélées au grand jour ces derniers mois.
Annonçant une perte colossale de 2,96 milliards d’euros pour le seul exercice 2021, Atos a vu sa valorisation boursière s’effondrer de près de 75% en un an. Les agences de notation ont dégradé sa note, et les analystes s’interrogent sur la pérennité de son modèle. Une crise de confiance majeure qui a poussé la direction à chercher des solutions en urgence pour assainir ses comptes et rassurer ses parties prenantes.
La procédure de sauvegarde, un remède miracle ?
C’est dans ce contexte que le tribunal de commerce de Nanterre a accepté, ce mercredi, d’ouvrir une procédure de sauvegarde accélérée au bénéfice d’Atos. Ce dispositif, prévu par le droit des entreprises en difficulté, va permettre au groupe de geler ses dettes le temps de négocier un plan de restructuration avec ses créanciers. L’objectif : alléger son fardeau financier et dégager de nouvelles marges de manœuvre pour rebondir.
Le tribunal a estimé que, compte tenu du soutien suffisamment large des créanciers financiers, l’adoption du projet de plan de restructuration financière au cours de la procédure de sauvegarde accélérée était vraisemblable.
– Atos, communiqué de presse du 26 juillet 2023
Concrètement, Atos va avoir deux mois pour ficeler un accord avec une majorité qualifiée de créanciers, représentant au moins deux tiers du montant des créances. Un défi de taille, alors que sa dette nette atteignait 1,2 milliard d’euros fin 2022. Mais le groupe se veut confiant, fort du « soutien suffisamment large » déjà exprimé par une partie de ses financeurs.
Un avenir toujours incertain
Si cette procédure collective offre un répit bienvenu à Atos, elle est loin de régler tous ses problèmes. Car au-delà de la question de la dette, c’est tout le modèle économique du groupe qui est remis en cause. Face aux mutations accélérées du secteur technologique, marqué notamment par l’essor du cloud, Atos peine à se réinventer et à trouver les relais de croissance dont il a besoin.
Le plan de transformation « Vision 2025 », lancé l’an dernier par son PDG Rodolphe Belmer, prévoit certes de recentrer l’activité sur les segments les plus porteurs, comme la cybersécurité et le quantique. Mais sa mise en œuvre s’annonce compliquée dans un contexte financier dégradé, et alors que l’entreprise peine à attirer et retenir les talents.
Autant d’incertitudes qui pèsent sur l’avenir d’Atos, et avec lui sur l’écosystème français du numérique. Car une faillite de ce mastodonte aurait des répercussions majeures, de par son poids économique comme son rôle dans des projets stratégiques tel que les JO de Paris. Plus que jamais, le sort du groupe s’apparente à un test grandeur nature de la résilience de la French Tech. Avec l’espoir qu’Atos, à l’image du Baron de Münchhausen, parvienne à se sortir du bourbier en se hissant lui-même par les cheveux.