Imaginez. Le fracas des armes, l’éclat des armures rutilantes, la clameur de la foule en délire. Non, vous n’avez pas remonté le temps jusqu’au Moyen-Âge. Vous assistez à un tournoi de béhourd, ce sport de combat en armure qui séduit un nombre croissant de passionnés d’histoire et de traditions chevaleresques en France.
Le Béhourd, Entre Sport et Histoire Vivante
Né en Russie dans les années 90, le béhourd débarque en France en 2011. Mi-sport de combat, mi-reconstitution historique, il s’inspire directement des tournois médiévaux qui faisaient la fierté de la chevalerie européenne. Affublés d’imposantes armures, les “béhourdeurs” s’affrontent à coups d’épée, de hache et de hallebarde, dans un déchaînement de force et de technique rappelant les joutes d’antan.
Mais plus qu’un simple défouloir, le béhourd se veut une plongée dans l’histoire et la culture médiévales. “De nombreux adeptes y voient une occasion de renouer avec leurs racines culturelles profondes”, analyse Édouard Eme, président de la Fédération française de béhourd. Car derrière l’armure et les combats, se cache une véritable passion pour le patrimoine et les traditions chevaleresques.
L’Art de l’Armure : Un Savoir-Faire Millénaire
L’un des aspects les plus fascinants du béhourd réside sans doute dans les armures portées par les combattants. Loin des reproductions approximatives, il s’agit de véritables œuvres d’art, fruit d’un minutieux travail de reconstitution historique. Manuscrits enluminés, tableaux d’époque, fouilles archéologiques… Les “béhourdeurs” n’hésitent pas à se plonger dans de longues recherches pour retrouver les secrets des armuriers médiévaux.
Les gisants exposés dans les châteaux et édifices religieux sont une source d’inspiration majeure pour façonner une armure authentique.
Charles, membre de l’équipe du Hardi
La plupart des pièces d’équipement sont ainsi forgées en Europe de l’Est, notamment en Ukraine et en Pologne, où ce savoir-faire ancestral a pu être préservé. Car en France, rares sont les artisans encore capables de concevoir des armures dans les règles de l’art médiéval.
Une Discipline en Quête de Reconnaissance
Malgré un engouement croissant, le béhourd peine encore à s’imposer comme un véritable sport en France. Si sa dimension culturelle et patrimoniale est indéniable, sa facette “combat” suscite encore quelques réticences auprès des instances officielles.
Pourtant, l’impact du béhourd va bien au-delà du simple loisir médiéval. Pour beaucoup de pratiquants, il symbolise un retour aux sources, une manière de se réapproprier un pan entier de l’histoire et de l’identité françaises. Une quête d’authenticité et de tradition qui sonne comme un défi lancé à notre modernité déboussolée.
Un Tournoi Spectaculaire au Cœur du Berry
Début juillet, le village de Saint-Benoît-du-Sault, niché aux confins du Berry et du Limousin, a vibré au rythme des combats lors du championnat de France de béhourd. Un écrin de choix pour cette discipline avide d’authenticité médiévale.
Parmi la trentaine de clubs présents, les Descendants du Hardi et les Gargouilles de Paris ont ébloui le public par l’intensité de leurs assauts. Pendant plusieurs minutes, les “béhourdeurs” se sont affrontés sans relâche, martelant armures et boucliers dans un tourbillon d’acier et de sueur. Un spectacle à couper le souffle, qui a tenu en haleine les centaines de passionnés massés autour des lices.
Le Béhourd, Nouveau Fer de Lance du Tourisme Médiéval ?
Au-delà de sa dimension sportive et culturelle, le béhourd pourrait bien devenir un atout touristique majeur pour les régions riches en patrimoine médiéval. De plus en plus de communes misent sur cette discipline spectaculaire pour animer leurs fêtes historiques et attirer un public en quête d’expériences immersives.
Une aubaine pour des villages comme Saint-Benoît-du-Sault, qui voient dans le béhourd un moyen original de valoriser leur héritage tout en dynamisant leur économie locale. Car derrière les combats en armure se profile aussi l’artisanat, la gastronomie, les arts du Moyen-Âge… Autant de facettes d’un tourisme médiéval en plein essor.
Alors, simple mode passagère ou véritable phénomène de société ? Une chose est sûre : avec son savant mélange d’authenticité, de technique et de spectacle, le béhourd a de beaux jours devant lui. Et il pourrait bien entraîner dans son sillage toute une génération de Français en quête de sens et de racines. En garde !