En ce mois de juillet 2024, le Tour de France bat son plein et avec lui, les records tombent les uns après les autres. Au cœur de ce tourbillon de performances : le phénoménal Tadej Pogacar. Le jeune prodige slovène, déjà double vainqueur de la Grande Boucle, semble tout simplement inarrêtable cette année. Sur chaque étape de montagne, il relègue ses adversaires à des minutes-lumière, dans un style époustouflant. Sur les pentes mythiques du Galibier, du Pla d’Adet ou encore du Plateau de Beille, “Pogi” écrase les chronos des plus grands champions du passé. Même les temps de référence établis par les sulfureux Marco Pantani ou Lance Armstrong au plus fort de l’ère du dopage ne résistent pas à la tornade slovène. Une domination écrasante qui suscite autant d’admiration que d’interrogations.
Des watts monstrueux qui défient l’entendement
Pour saisir l’ampleur des performances actuelles, il faut se plonger dans les données. Les capteurs de puissance, désormais incontournables sur les vélos des champions, nous livrent des chiffres édifiants. Selon plusieurs estimations, Pogacar aurait ainsi grimpé le Plateau de Beille avec une moyenne effarante de 6,8 watts/kg pendant près de 40 minutes. Soit un effort 10% supérieur à ceux d’Armstrong ou Pantani sur ce même col au début des années 2000. Des valeurs hors normes qui témoignent d’une génération de coureurs aux capacités physiologiques de plus en plus exceptionnelles.
Derrière Pogacar, ils sont quelques-uns à suivre le rythme infernal imposé par le Maillot Jaune. Son dauphin Jonas Vingegaard ou encore le jeune prodige belge Remco Evenepoel réalisent eux aussi des chronos de feu dans les ascensions. Si bien que cette 111ème édition du Tour de France s’annonce d’ores et déjà comme l’une des plus rapides de l’histoire. Une tendance à l’accélération qui ne date pas d’hier, mais qui semble encore s’accentuer ces dernières années.
Une mécanique au service de la performance
Pour expliquer ces performances de haute volée, il faut s’intéresser aux coulisses de la performance. Car si les organismes des champions d’aujourd’hui semblent repousser toujours plus loin les limites, ils sont aussi soutenus par un arsenal technologique et scientifique de pointe. Vélos ultra-légers en carbone, roues profilées, postures optimisées en soufflerie, étude poussée des frottements… Chaque détail compte pour grappiller ces précieux watts qui font la différence en montagne. Des équipements high-tech de plus en plus perfectionnés, fruit d’intenses recherches et développements menés par les équipes.
La science de l’entraînement et de la récupération
Mais la mécanique n’explique pas tout. C’est aussi dans la préparation des coureurs que se joue la performance. Plans d’entraînements individualisés et optimisés grâce aux données, travail spécifique de la puissance au seuil, gestion pointue de la récupération et du pic de forme… Là encore, la science est mise à contribution pour tirer la quintessence de chaque organisme. Un suivi de tous les instants qui permet aux leaders de se présenter sur le Tour avec une fraîcheur optimale, prêts à se sublimer pendant 3 semaines.
Cette même approche scientifique se retrouve dans la gestion des étapes et des efforts. Capteurs, outils d’analyse, reconnaissance poussée des parcours… Tout est fait pour gérer au mieux les temps forts et éviter le moindre gaspillage d’énergie. Sur le Tour, on voit ainsi de plus en plus d’équipes “contrôler” les étapes de plaine à des allures très mesurées, tout juste ce qu’il faut pour récupérer, avant d’exploser les compteurs en montagne. Un phénomène qui contribue à creuser toujours plus les écarts entre les cadors et le reste du peloton.
Vers une nouvelle ère pour le cyclisme ?
Cette évolution technologique et scientifique pose question quant à l’avenir du cyclisme. Certains observateurs s’inquiètent d’une discipline à plusieurs vitesses, où seuls quelques élus peuvent se payer le matériel et l’encadrement dernier cri. D’autres s’interrogent sur les limites physiologiques des coureurs et les risques pour la santé. Des enjeux cruciaux pour l’avenir d’un sport qui se cherche un nouvel équilibre entre tradition et modernité, performances et équité sportive.
En attendant, le spectacle est sur les routes et il est grandiose. Dans la roue de Pogacar et ses rivaux, c’est un cyclisme d’un nouveau genre qui est en train de s’écrire. Un cyclisme de vitesse, de puissance et de prouesses technologiques qui repousse sans cesse les frontières du possible. Reste à savoir jusqu’où mènera cette quête de l’extrême, et à quel prix pour les organismes. Le Tour de France 2024, dans sa démesure sportive, nous offre en tout cas une formidable fenêtre sur ce cyclisme du futur. Vertigineux.