Depuis quelques années, la ville de Lyon fait face à un phénomène inquiétant : l’explosion des fraudes à l’examen théorique du permis de conduire. Le démantèlement récent d’un important réseau dans le département voisin de l’Isère a mis en lumière l’ampleur du problème, avec l’annulation de plusieurs dizaines de permis de Lyonnais les ayant obtenus frauduleusement.
La multiplication des centres d’examen privés, terreau fertile pour la fraude
Depuis 2016, le passage du code de la route peut se faire dans des centres d’examen privés, en plus de La Poste. Si cette ouverture à la concurrence devait permettre de réduire les délais de passage, elle s’est malheureusement accompagnée d’une recrudescence des cas de fraude. Des réseaux parfois très structurés proposent à des candidats de passer l’examen à leur place contre rémunération.
Au début on les repérait parce qu’ils avaient 40/40 dès leur première présentation, explique Maxime Bourgeois, secrétaire national du syndicat d’inspecteur Unsa-Saneer. Maintenant ils se méfient et commencent par un échec.
Des candidats prêts à parcourir des centaines de kilomètres
Pour brouiller les pistes, certains candidats lyonnais n’hésitent pas à passer leur examen théorique à l’autre bout de la France. “Des candidats lyonnais qui passent l’épreuve théorique à Cherbourg, cela peut être annonciateur d’une anomalie”, souligne l’inspecteur. Un stratagème qui ne trompe plus les autorités, désormais sur leurs gardes.
- En 2022 et 2023, les services de l’état ont dénombré dans le Rhône :
- 300 procédures en cours
- 100 épreuves théoriques invalidées
- 80 permis retirés
Un renforcement des contrôles et des critères d’agrément
Face à ce fléau, la préfecture du Rhône a annoncé un renforcement des contrôles des centres d’examen privés. Le nouveau cahier des charges mis au point au printemps resserre un peu les critères pour obtenir l’agrément, avec notamment une vérification du casier judiciaire des examinateurs. Les amplitudes horaires des centres ont aussi été revues pour coïncider avec celles des contrôles des inspecteurs du permis.
Tant que ce sera privé, il y aura de la fraude, avance Maxime Bourgeois, qui plaide pour une renationalisation. Il y a eu des cas de fonctionnaires corrompus mais ils s’exposent à de lourdes sanctions, ce qui est dissuasif.
Pourtant, les 34 inspecteurs rhodaniens peinent à endiguer le phénomène au vu de l’ampleur de la tâche. Outre le passage des examens pratiques, les missions de contrôle des centres ne constituent qu’une infime part de leur travail. Un renfort de 100 recrutements à l’échelle nationale a été annoncé, mais sera-t-il suffisant ?
Des sanctions lourdes pour les fraudeurs
Les candidats fraudeurs s’exposent non seulement à l’annulation de leur permis durement acquis, mais aussi à de lourdes sanctions pénales. Frauder à un examen constitue un délit passible de 5 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende, rappelle la préfecture. Sans compter les risques pour la sécurité routière que représentent des conducteurs n’ayant pas réellement prouvé leur aptitude à la conduite.
L’explosion des fraudes à l’examen théorique du permis de conduire à Lyon met en lumière les dérives liées à l’ouverture à la concurrence des centres d’examen. Si un renforcement des contrôles et des critères d’agrément semble indispensable, la question d’un retour à un système nationalisé mérite également d’être posée. En attendant, les fraudeurs risquent de payer au prix fort leur volonté de contourner les règles d’accès au précieux sésame.