Dans le tourbillon post-électoral qui secoue actuellement la France, un nom revient avec insistance dans les négociations pour Matignon : celui d’Huguette Bello. Cette figure politique réunionnaise, proche de la France Insoumise et du Parti Communiste, s’impose comme une potentielle Première ministre pour le Nouveau Front Populaire. Mais qui est vraiment cette femme dont le parcours atypique séduit une partie de la gauche, sans pour autant faire l’unanimité ?
Un Long Parcours Politique
À 73 ans, Huguette Bello a derrière elle une impressionnante carrière politique. Élue pour la première fois au conseil régional en 1982 sur la liste du PCR (Parti Communiste Réunionnais), elle devient députée en 1997, un mandat qu’elle conservera pendant 23 ans. À l’Assemblée nationale, elle siège sans discontinuer au sein du groupe communiste jusqu’en 2020.
En parallèle, elle mène une carrière locale à La Réunion, étant élue maire de Saint-Paul en 2008, puis à nouveau en 2020. Mais c’est surtout son accession à la présidence de la région Réunion en 2021 qui la propulse sur le devant de la scène nationale. À la tête d’une coalition de gauche et de la société civile, elle parvient à détrôner la droite en place depuis plus de 10 ans.
Une Forte Personnalité
Ceux qui la connaissent décrivent une femme au franc-parler, peu encline à suivre aveuglément une ligne politique. En 2012, elle quitte d’ailleurs le PCR pour fonder son propre parti, Pour La Réunion. Sans pour autant s’éloigner de ses idéaux de gauche, elle se rapproche de Jean-Luc Mélenchon et de la France Insoumise, leur accordant son parrainage en 2017 et 2022.
Elle est à la tête d’une collectivité territoriale dans laquelle elle gouverne une majorité assez proche du Nouveau Front Populaire.
– Manuel Bompard, coordinateur de LFI
Son élégance, son aisance à la fois dans les quartiers populaires et à la tribune de l’Assemblée, ainsi que son engagement de longue date pour les droits des femmes et contre le racisme, séduisent une partie de la gauche. Le patron du PCF Fabien Roussel salue une femme d’expérience qui “sait négocier”. Jean-Luc Mélenchon, lui, vante une “femme racisée et féministe antiraciste”.
Des Réserves Du Côté Du PS
Mais son profil ne fait pas l’unanimité, notamment chez les socialistes. Certains lui reprochent de ne pas avoir voté la loi sur le mariage pour tous en 2013, même si elle sera ensuite la première à célébrer une union homosexuelle dans sa commune. D’autres lui préfèrent le premier secrétaire du PS Olivier Faure.
Malgré ces réserves, beaucoup reconnaissent en Huguette Bello une femme de consensus, capable de rassembler au-delà de son camp. Une qualité qui pourrait s’avérer précieuse dans les négociations à venir pour former un gouvernement. Car si son nom circule avec insistance, rien n’est encore joué. Les tractations s’annoncent âpres entre les différentes composantes du Nouveau Front Populaire.
Une Nomination Qui Ferait Date
Si elle était nommée à Matignon, Huguette Bello deviendrait la deuxième femme Première ministre sous la Vème République, après Édith Cresson en 1991-1992. Elle serait aussi la première cheffe de gouvernement issue de l’Outre-mer et d’une minorité ethnique. Un symbole fort à l’heure où la représentation de la diversité est au cœur des débats.
Mais au-delà des symboles, c’est surtout sa longue expérience politique et sa capacité à gouverner une majorité plurielle qui pourraient faire pencher la balance en sa faveur. À l’Assemblée nationale, la nouvelle majorité relative devra composer avec des oppositions diverse, de LR au RN en passant par LREM.
Elle a l’étoffe pour devenir Première ministre car elle sait ce que c’est que le Parlement et construire des majorités. Elle est respectée, elle a de l’autorité.
– Fabien Roussel, secrétaire national du PCF
Alors qu’Emmanuel Macron doit recevoir les différents groupes parlementaires dans les prochains jours, les spéculations vont bon train sur l’identité de son ou sa future Première ministre. Si le choix d’Huguette Bello constituerait assurément un pari audacieux, il pourrait aussi s’avérer un coup politique habile pour tourner la page des cinq dernières années et incarner le “renouveau” promis par le président.
Une chose est sûre : la nomination du prochain locataire de Matignon s’annonce comme un des moments clés de ce début de second quinquennat. Et dans ce contexte post-électoral inédit, tous les scénarios semblent ouverts, y compris celui d’une Première ministre réunionnaise issue de la gauche radicale. Les prochains jours nous diront si Huguette Bello transforme l’essai, ou si son nom restera comme un des nombreux supposés “favoris” à Matignon qui n’auront finalement jamais franchi le perron de l’hôtel de Rothelin-Charolais.