Dans une décision historique, la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) a statué jeudi que l’ensemble des femmes afghanes fuyant leur pays en raison des mesures discriminatoires prises à leur encontre par le régime taliban peuvent désormais obtenir le statut de réfugiées en France. Les juges ont reconnu pour la première fois la persécution des femmes en raison de leur genre et leur appartenance au “groupe social des femmes afghanes”.
Une protection pour toutes les Afghanes
Selon le communiqué de la CNDA, “les femmes et jeunes filles afghanes sont, dans leur ensemble, perçues d’une manière différente par la société afghane” et “doivent être considérées comme appartenant à un groupe social susceptible d’être protégé comme réfugié”. Cela signifie concrètement que n’importe quelle femme afghane demandant l’asile en France au motif des discriminations subies dans son pays devrait se voir accorder le statut de réfugiée.
C’est une avancée majeure dans la reconnaissance des persécutions liées au genre par le droit d’asile français.
François Héran, démographe spécialiste des migrations
Des discriminations systématiques
Depuis leur retour au pouvoir en août 2021, les talibans ont mis en place une série de mesures particulièrement restrictives et discriminatoires envers les femmes et les filles :
- Exclusion de la plupart des emplois
- Interdiction de voyager seules
- Obligation de porter le voile intégral en public
- Fermeture des écoles secondaires pour les filles
- Restriction d’accès à l’université
Ces règles drastiques privent les Afghanes de leurs droits fondamentaux et les exposent à des violences en cas de non-respect. De nombreuses femmes, notamment celles engagées pour leurs droits, sont contraintes de fuir le pays.
L’asile, seul recours pour beaucoup
Malgré les risques du voyage et les difficultés pour obtenir un visa, l’exil reste souvent le seul moyen d’échapper à l’oppression pour ces femmes. Depuis 2021, plusieurs milliers d’Afghanes ont déposé une demande d’asile en France.
Je ne pouvais plus vivre sous le joug des talibans. Demander l’asile était ma seule option pour avoir un avenir.
Mariam, demandeuse d’asile afghane en France
Jusqu’à présent, l’obtention du statut de réfugiée n’était pas garantie et dépendait de l’évaluation au cas par cas des risques individuels encourus. Avec cette décision de la CNDA, la persécution des femmes afghanes est reconnue de manière générale, facilitant leur protection.
Un signal fort mais des défis à relever
Si ce jugement représente une avancée significative, sa mise en œuvre soulève plusieurs questions. Le nombre de places d’hébergement dédiées et les moyens alloués à l’accompagnement devront être à la hauteur des besoins.
L’enjeu sera d’assurer des conditions d’accueil dignes à ces femmes vulnérables et de favoriser leur intégration.
Delphine Rouilleault, directrice de l’association France terre d’asile
Au-delà de l’aspect légal, cette décision envoie un signal politique fort de solidarité envers les Afghanes. Reste à espérer qu’elle incitera d’autres pays à suivre l’exemple français et, à terme, fasse pression sur le régime taliban pour qu’il respecte les droits des femmes.