Imaginez la veille du Nouvel An. Partout dans le monde, on prépare les fêtes, on allume des lumières scintillantes, on réchauffe l’atmosphère avec des chants et des rires. Mais dans une petite ville au nord de Kiev, la réalité est bien différente. Le froid glacial s’infiltre partout, et l’électricité fait défaut depuis des jours.
C’est dans ce contexte que des habitants ordinaires tentent de maintenir un semblant de normalité. Malgré les interruptions constantes, ils se préparent pour le réveillon, bravant les éléments et les menaces invisibles. Leur histoire touche au cœur, révélant une force intérieure incroyable.
Un Nouvel An sous le signe de l’adversité à Vychgorod
Vychgorod, cette banlieue paisible au bord du Dnipro, offre habituellement une vue magnifique sur le fleuve. Mais aujourd’hui, elle porte les marques d’un conflit qui n’épargne pas les civils. Proche d’une infrastructure énergétique clé, la ville subit de plein fouet les conséquences des attaques répétées.
À quelques heures de minuit, le quotidien est rythmé par les absences d’électricité. Les immeubles plongés dans l’obscurité, les rues enneigées silencieuses, et ce froid qui pénètre jusqu’aux os. Pourtant, la vie ne s’arrête pas complètement.
Le quotidien d’une esthéticienne dans le froid
Daria Louchtchyk, une jeune femme d’une trentaine d’années, gère son salon de beauté avec une détermination farouche. Dans son petit espace, le thermomètre lutte pour atteindre les 15 degrés. Elle tente d’allumer son poêle à gaz portable pour apporter un peu de chaleur.
Malgré les conditions extrêmes, des clientes affluent pour leurs rendez-vous de fin d’année. Elles veulent se faire belles pour le réveillon, comme un acte de défi face à la situation. Daria, bonnet vissé sur la tête, les accueille avec professionnalisme.
Les récentes frappes ont laissé la ville sans courant, sans chauffage central et souvent sans eau courante. « Nous étions toutes en stress total », confie Daria. Mais l’engagement envers les clientes l’emporte. Elles ont travaillé malgré tout, honorant chaque rendez-vous.
Nous sommes quand même allées travailler parce que nous avions des rendez-vous pour le nouvel an.
Ces attaques ont gravement endommagé le réseau énergétique local. Daria décrit un système « complètement détruit » dans la région. Le froid hivernal amplifie les difficultés, rendant chaque panne plus insupportable.
Cette année, les interruptions ont atteint un niveau inédit. Les habitants s’étaient adaptés à des délestages précédents, mais cette vague a tout bouleversé. « C’était comme un effondrement », souffle-t-elle, évoquant un quotidien devenu infernal.
Pour pallier les pannes, elle avait investi dans des batteries de secours. Ces équipements permettaient d’éclairer le salon et de continuer les soins. Mais les coupures prolongées ont vidé toutes les réserves, transformant chaque journée en lutte constante.
Des clientes courageuses malgré tout
Dehors, la neige tombe dru, épaississant le manteau blanc sur les trottoirs. À l’intérieur, les séances se déroulent à la lumière artificielle. Une cliente brave le froid pour une simple épilation des sourcils, éclairée par une lampe autonome.
Pendant les blackouts totaux, l’ingéniosité prend le relais. Les femmes utilisent la torche de leurs téléphones pour illuminer l’espace de travail. Cela permet aux professionnelles de poursuivre leurs gestes précis, même dans la pénombre.
Daria observe cette ténacité avec admiration. Rien ne semble décourager ces femmes de prendre soin d’elles. C’est plus qu’une routine beauté : c’est un moyen de se soutenir les unes les autres dans l’adversité.
Il me semble que rien ne peut empêcher nos Ukrainiennes de venir se faire belles, peu importe ce qui se passe.
Ce rituel devient un lien social précieux. Dans ces moments partagés, on échange des encouragements, on rit parfois pour chasser la tension. La beauté extérieure reflète une force intérieure collective.
Les interruptions électriques s’accompagnent souvent d’alertes aériennes. Les nuits sont perturbées par des bruits suspects, ajoutant à la désorientation générale. Daria avoue être épuisée, les larmes aux yeux derrière ses lunettes.
Les traces visibles des attaques
Dans les rues de Vychgorod, les stigmates sont omniprésents. De nombreuses fenêtres ont été remplacées par des planches de bois, soufflées par les ondes de choc. Les services de secours installent des tentes chauffées pour offrir un abri temporaire.
La proximité avec la centrale hydroélectrique explique en partie ces ciblages. Les drones survolent parfois très bas, créant des moments de panique intense. Daria se souvient d’un passage au-dessus de son salon.
Le bruit était indescriptible, « irréel », comme un déchirement dans l’air. Les clientes fermaient les yeux, figées par la peur. Ces épisodes laissent des traces psychologiques profondes.
Un café refuge au milieu du chaos
Un peu plus loin, Andrii Galmiz tient son café branché. Les pannes récentes ont durement impacté son activité. Il décrit ces jours comme un véritable « enfer », avec des pertes et des contraintes quotidiennes.
Grâce à un générateur, il maintient un minimum de service. Le courant et internet fonctionnent, permettant de servir boissons chaudes. Mais le chauffage fait défaut, rendant l’atmosphère fraîche.
Son établissement devient un point de rassemblement. Les voisins viennent recharger lampes frontales, téléphones ou ordinateurs. Certains s’installent pour travailler ou simplement se réchauffer un instant.
Les gens venaient, se réchauffaient, travaillaient. Il faut s’entraider.
Cette entraide spontanée illustre la solidarité locale. Dans ces refuges improvisés, on partage des nouvelles, on offre un sourire. Le café hipster, avec sa barbe blanche d’Andrii, symbolise cette résistance communautaire.
Récemment, une explosion proche a soufflé les vitres et endommagé un garage voisin. Des voitures ont été calcinées, rappel brutal de la proximité du danger. Ces incidents secouent le quartier entier.
La peur nocturne et un réveillon modeste
Néonila, une retraitée du quartier, évoque l’attaque majeure avec émotion. L’explosion semblait toute proche, faisant trembler les murs. Ces moments restent gravés dans les mémoires.
Le plus dur, c’est la nuit. La peur d’une alerte en dormant empêche le repos. On reste vigilant, prêt à réagir. L’obscurité amplifie chaque bruit suspect.
Elle s’est adaptée à éclairer son intérieur à la bougie ou avec son téléphone. Le Nouvel An se passera en famille, de manière simple. Pas de grandes célébrations, juste l’essentiel.
Nous allons fêter ça à la maison, modestement, sans fioritures. Sans joie.
Son vœu pour l’année nouvelle est simple et poignant. Une seule chose primordiale : le retour de la lumière stable. Tout le reste découlera de cette base essentielle.
La résilience comme force quotidienne
Ces récits individuels dessinent un portrait collectif émouvant. Face aux délestages interminables, au froid intense et aux menaces persistantes, les habitants font preuve d’une adaptabilité remarquable.
Les investissements personnels en équipements de secours, l’ingéniosité pour continuer le travail, la solidarité dans les refuges : tout cela témoigne d’une volonté de ne pas céder.
Même les petits gestes, comme se faire belle pour le réveillon, prennent une dimension symbolique. Ils affirment la vie, la normalité, malgré le contexte exceptionnel.
Les nuits perturbées par les alertes, les journées rythmées par les retours intermittents du courant, tout contribue à une fatigue accumulée. Pourtant, l’espoir persiste, porté par cette communauté soudée.
En cette fin d’année, Vychgorod incarne cette dualité : vulnérabilité face aux éléments et force inébranlable des esprits. Le Nouvel An sera sobre, mais chargé de sens.
Ces histoires rappellent que derrière les grands titres, il y a des vies concrètes, des efforts quotidiens pour tenir bon. Une leçon d’humilité et de courage pour tous.
Dans l’obscurité de l’hiver, une lueur persiste : celle de l’humanité qui refuse de s’éteindre.
Alors que l’année se termine sur ces notes contrastées, on ne peut qu’admirer cette capacité à avancer. Le froid physique est rude, mais la chaleur humaine compense, un peu.
Pour 2026, les souhaits sont modestes mais profonds. La stabilité énergétique comme fondation pour reconstruire le reste. Un retour à une vie moins chaotique.
Ces témoignages, recueillis en cette période festive, mettent en lumière une réalité souvent oubliée. Loin des lumières des grandes villes, des gens ordinaires vivent l’extraordinaire au quotidien.
Leur persévérance inspire. Elle montre que même dans les moments les plus sombres, l’esprit humain trouve des moyens de briller.
En refermant cette page sur Vychgorod, on emporte une réflexion sur la fragilité et la force. Que l’année nouvelle apporte enfin cette lumière tant attendue.









