Imaginez un pays déjà fracturé par plus d’une décennie de guerre civile, où les alliances se brisent soudainement entre deux puissants voisins du Golfe. C’est exactement ce qui se passe au Yémen en cette fin décembre 2025, avec une escalade inattendue entre l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Au cœur de cette crise : le soutien présumé d’Abou Dhabi à un mouvement séparatiste dans le sud du pays, qui menace directement les intérêts de Riyad.
Le Yémen, ce pays à la croisée des routes maritimes stratégiques, continue de payer un lourd tribut à ses divisions internes et aux ingérences régionales. Une trêve fragile avec les rebelles houthis tient depuis 2022, mais un nouveau front s’est ouvert au sud, opposant indirectement deux alliés historiques.
Cette situation rappelle à quel point la stabilité dans la péninsule arabique reste précaire, malgré les apparences d’unité affichées par les monarchies du Golfe.
Une Crise Qui Couvait Depuis Longtemps
Depuis le début de l’intervention de la coalition arabe en 2015, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont partagé un objectif commun : contrer l’avancée des rebelles houthis, soutenus par l’Iran. Riyad a pris la tête de cette coalition, soutenant le gouvernement yéménite internationalement reconnu.
Abou Dhabi, de son côté, a investi massivement dans le sud du pays, formant et équipant des forces locales pour lutter contre les extrémistes et sécuriser les routes maritimes vitales. Mais ces stratégies ont progressivement divergé.
Les Émirats ont vu dans le sud un partenaire fiable pour une autonomie accrue, tandis que l’Arabie saoudite défend farouchement l’unité du Yémen, craignant tout morcellement à ses frontières.
L’Avancée Fulminante des Séparatistes du Sud
Début décembre 2025, le Conseil de transition du Sud (STC), principal mouvement séparatiste, a lancé une offensive éclair. Ses forces ont pris le contrôle de vastes territoires, notamment les provinces riches en ressources d’Hadramout et d’al-Mahra.
Ces régions bordent directement l’Arabie saoudite, ce qui a immédiatement alarmé Riyad. Le STC a saisi des installations pétrolières clés, des bâtiments gouvernementaux et même des postes frontaliers.
Dans les rues d’Aden, capitale provisoire du gouvernement, des manifestations massives ont vu flotter les drapeaux de l’ancien Yémen du Sud, indépendant jusqu’en 1990. Les partisans du STC réclament ouvertement la restauration de cet État disparu.
Un porte-parole du STC a déclaré sans ambiguïté : il est impensable de demander aux habitants de quitter leurs propres terres. Cette position ferme a rejeté les appels au retrait émanant de la coalition.
« Il n’en est pas question. Il est déraisonnable de demander au propriétaire d’une terre de la quitter. La situation exige de rester et de se renforcer. »
Porte-parole du Conseil de transition du Sud
Cette avancée a été perçue comme une menace directe pour la sécurité nationale saoudienne, poussant Riyad à réagir vigoureusement.
Les Frappes Aériennes sur le Port d’al-Mukalla
Le 30 décembre 2025, la coalition menée par l’Arabie saoudite a mené une opération aérienne ciblée sur le port d’al-Mukalla, dans le sud du Yémen. Selon Riyad, des navires en provenance du port émirati de Fujairah avaient déchargé une importante quantité d’armes et de véhicules de combat destinés aux forces du STC.
Ces bateaux auraient désactivé leurs systèmes de suivi pour opérer discrètement. Les frappes ont visé précisément ces cargaisons, détruisant véhicules blindés et matériels militaires.
Aucune victime civile n’a été rapportée, l’opération étant qualifiée de « limitée » par la coalition. Mais le message était clair : toute tentative de renforcement des séparatistes serait contrecarrée.
Les Émirats ont immédiatement démenti : la cargaison ne contenait aucune arme et était destinée à leurs propres unités encore présentes sur place.
Chronologie des événements clés :
- Début décembre : Offensive du STC dans le sud.
- Mi-décembre : Prise de contrôle d’Hadramout et al-Mahra.
- 26 décembre : Premières frappes aériennes signalées.
- 30 décembre : Bombardement du port d’al-Mukalla.
- 31 décembre : Annonce du retrait émirati.
La Réaction Saoudienne : Une Ligne Rouge Franchie
Une source proche du gouvernement saoudien a exprimé un scepticisme profond. Le retrait des troupes émiraties est vu comme une mesure positive de désescalade, mais insuffisante.
Ce qui compte vraiment, selon Riyad, c’est l’arrêt total du soutien aux séparatistes – qu’il soit militaire, financier ou logistique. Les actions d’Abou Dhabi sont qualifiées d' »extrêmement dangereuses », constituant une menace pour la sécurité du royaume et de toute la région.
Le gouvernement yéménite reconnu, soutenu par l’Arabie saoudite, a décrété l’état d’urgence et annulé un pacte de défense avec les Émirats. Des milliers de forces pro-saoudiennes ont été déployées le long de la frontière.
Riyad espère que le retrait se traduira concrètement par une cessation complète d’aide au STC, mais reste vigilant.
Le Retrait Annoncé par les Émirats Arabes Unis
Sous cette pression intense, Abou Dhabi a annoncé le retrait de ses dernières unités présentes au Yémen. Ces forces, réduites depuis 2019, étaient principalement dédiées à des opérations antiterroristes.
Les Émirats présentent cette décision comme volontaire, prise pour assurer la sécurité de leur personnel face aux développements récents. Ils rejettent catégoriquement les accusations d’attiser le conflit ou de pousser les séparatistes à l’escalade.
Malgré ce geste, des questions persistent : le soutien politique et financier au STC va-t-il continuer en sous-main ? Abou Dhabi voit dans le sud un rempart contre les influences extrémistes et iraniennes.
Ce retrait pourrait apaiser les tensions immédiates, mais il révèle une fracture profonde entre deux partenaires du Golfe.
Le Contexte Historique du Conflit Yéménite
Pour comprendre cette crise, il faut remonter à 2014. Les rebelles houthis, issus du nord, prennent le contrôle de Sanaa et de vastes régions, forçant le gouvernement à l’exil.
En 2015, la coalition arabe intervient pour restaurer le pouvoir légitime. Les Émirats jouent un rôle crucial dans la libération d’Aden et du sud, mais y développent leurs propres réseaux.
Le STC émerge en 2017, revendiquant l’indépendance du sud. Intégré au gouvernement en 2020 via des accords, il reste une force autonome.
Aujourd’hui, le Yémen est divisé : nord tenu par les Houthis, sud fragmenté entre gouvernement et séparatistes. La guerre a causé des centaines de milliers de morts et la pire crise humanitaire au monde.
| Acteur | Position | Soutien principal |
|---|---|---|
| Gouvernement reconnu | Unité du Yémen | Arabie saoudite |
| Rebelles Houthis | Contrôle du nord | Iran (présumé) |
| Conseil de transition du Sud | Autonomie/indépendance sud | Émirats arabes unis |
| Coalition arabe | Soutien au gouvernement | Riyad et Abou Dhabi (divergences) |
Les Enjeux Stratégiques pour la Région
Le Yémen occupe une position géostratégique unique, bordant le détroit de Bab al-Mandab, par où transite une part importante du commerce mondial.
Un sud indépendant ou autonome pourrait redessiner les équilibres de pouvoir. Pour l’Arabie saoudite, cela représente un risque à ses frontières méridionales.
Les Émirats, quant à eux, cherchent à sécuriser leurs intérêts maritimes et à contrer toute influence iranienne prolongée.
Cette rivalité entre Riyad et Abou Dhabi, autrefois contenue, éclate au grand jour et pourrait affaiblir la coalition face aux Houthis.
Perspectives et Incertitudes
Le retrait émirati marque-t-il le début d’une désescalade réelle ? Riyad observe attentivement si le soutien au STC cesse effectivement.
Les séparatistes, eux, maintiennent leurs positions et refusent tout recul. Des négociations pourraient s’ouvrir, mais la confiance est rompue.
Dans ce pays épuisé, toute nouvelle confrontation aggraverait la souffrance de la population. La communauté internationale appelle à la retenue, mais les dynamiques régionales restent complexes.
Cette crise illustre les limites des alliances forgées dans l’urgence. Le Yémen paie une fois de plus le prix de ces divergences, dans un conflit qui semble sans fin.
À suivre de près dans les prochaines semaines, car les répercussions pourraient dépasser les frontières yéménites et affecter toute la stabilité du Golfe.
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