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Explosion de Bitchat en Ouganda Avant les Élections 2026

En Ouganda, les recherches pour Bitchat explosent à l'approche des élections 2026. L'opposant Bobi Wine exhorte les citoyens à télécharger cette app de Jack Dorsey pour contourner d'éventuelles coupures internet. Mais cette solution décentralisée tiendra-t-elle vraiment ses promesses face à un pouvoir déterminé ?

Imaginez un pays où, à quelques semaines d’élections cruciales, les citoyens se ruent soudain sur une application méconnue pour chatter sans internet, sans serveur, sans numéro de téléphone. C’est exactement ce qui se passe actuellement en Ouganda, où Bitchat, l’outil de messagerie décentralisée lancé par Jack Dorsey, connaît une explosion de popularité inattendue. À l’approche du scrutin présidentiel de janvier 2026, cet outil discret devient soudain un symbole de résistance face à la menace récurrente de coupures du réseau.

Pourquoi un tel engouement ? Parce que l’histoire récente du pays montre que les autorités n’hésitent pas à plonger le pays dans le silence numérique dès que les tensions électorales montent. Face à cette réalité, une voix influente a décidé de prendre les devants et de proposer une alternative concrète.

Quand la technologie devient un bouclier contre la censure

Jack Dorsey, connu pour avoir cofondé Twitter (devenu X) et pour son engagement en faveur du Bitcoin, ne cesse d’explorer des voies pour rendre la communication plus libre et moins contrôlable. Après avoir soutenu des projets décentralisés comme Bluesky ou Nostr, il a lancé en juillet 2025 une petite expérience personnelle : une application de messagerie qui fonctionne entièrement sans connexion internet.

Le concept est simple en apparence, mais révolutionnaire dans les faits : utiliser le Bluetooth Low Energy pour créer un réseau maillé entre les téléphones à proximité. Chaque appareil devient à la fois émetteur, récepteur et relais. Les messages rebondissent de proche en proche jusqu’à atteindre leur destinataire, même à plusieurs centaines de mètres, pour peu qu’il y ait assez d’utilisateurs intermédiaires. Pas de serveur central, pas de collecte de données, pas d’inscription obligatoire.

Les racines d’une innovation née d’un week-end de bricolage

Dorsey a lui-même expliqué avoir passé un week-end à explorer les réseaux mesh Bluetooth, les modèles de relais et de stockage temporaire, ainsi que les protocoles d’encryption. Il a publié un whitepaper technique sur GitHub et mis en bêta une version iOS via TestFlight. L’application évoque les vieux salons IRC des années 90, mais adaptée à une époque où la censure gouvernementale est devenue monnaie courante.

Le but affiché est clair : offrir une communication résiliente dans des contextes où internet disparaît soudainement, que ce soit à cause d’une catastrophe naturelle ou d’une décision politique. Et c’est précisément cette seconde hypothèse qui fait aujourd’hui vibrer l’Ouganda.

Un historique de coupures internet lors des scrutins

Depuis plusieurs élections, les autorités ougandaises ont régulièrement imposé des blackouts internet et des restrictions sur les réseaux sociaux. En 2016 et 2021, ces mesures ont duré plusieurs jours, souvent déclenchées la veille du vote. Officiellement, elles visaient à lutter contre la désinformation, les discours de haine ou les appels à la violence. Mais pour l’opposition, elles servaient surtout à empêcher la transmission rapide des résultats des bureaux de vote et à compliquer l’organisation de manifestations.

Les formulaires de déclaration des résultats (DR Forms), ces documents officiels remplis dans chaque bureau, sont au cœur de la controverse. Leur photographie et leur partage rapide permettent aux observateurs indépendants de comparer les chiffres locaux avec les résultats officiels annoncés plus tard. Sans internet, cette vérification citoyenne devient quasi impossible.

« Le régime prévoit d’éteindre internet dans les prochains jours, comme il l’a fait lors de toutes les élections précédentes. Cela bloque la communication, empêche l’organisation et la vérification des résultats. »

Ces mots, publiés récemment sur les réseaux, ont agi comme un détonateur. En quelques heures, ils ont propulsé Bitchat au rang des sujets les plus recherchés dans le pays.

L’appel qui a tout changé

L’instigateur de cette vague n’est autre qu’une figure politique très suivie : un ancien chanteur devenu leader de l’opposition, connu pour ses positions franches contre le pouvoir en place. Il a explicitement recommandé à ses partisans de télécharger l’application sans attendre, en insistant sur sa capacité à transmettre des images et des informations critiques même sans connexion.

En quelques jours, les statistiques parlent d’elles-mêmes : les recherches Google pour « Bitchat » ont bondi de manière spectaculaire, avec des termes comme « bitchat apk », « bitchat mesh » ou « comment utiliser bitchat » classés en « breakout » (hausse fulgurante). Les téléchargements ont suivi la même trajectoire, avec des dizaines de milliers d’installations supplémentaires en une semaine seulement.

Comment fonctionne concrètement ce réseau maillé ?

Pour bien comprendre pourquoi cet outil suscite un tel intérêt, il faut plonger un peu dans son fonctionnement technique. Chaque téléphone avec Bluetooth activé diffuse un signal qui permet aux appareils voisins (dans un rayon d’environ 30 mètres) de se découvrir mutuellement. Lorsqu’un utilisateur envoie un message, celui-ci est fragmenté en petits paquets cryptés.

  • Les paquets sont transmis au premier relais disponible.
  • Chaque relais stocke temporairement le message et le renvoie dès qu’un autre appareil compatible apparaît.
  • Le message continue ainsi son chemin jusqu’à atteindre le destinataire ou jusqu’à expiration (les messages sont éphémères).

Plus il y a d’utilisateurs dans une zone, plus le réseau devient robuste et étendu. Dans une foule dense – manifestation, marché, file d’attente devant un bureau de vote – la portée effective peut atteindre plusieurs centaines de mètres, voire plus.

L’encryption de bout en bout garantit que seul le destinataire peut lire le contenu. Aucun identifiant personnel n’est requis, ce qui rend la traçabilité très compliquée pour un observateur extérieur.

Un outil déjà testé dans d’autres crises

Bitchat n’est pas une première dans ce genre de contexte. Des applications similaires ont déjà prouvé leur utilité lors de mouvements sociaux ou de catastrophes. À Madagascar, en Indonésie ou au Népal, des hausses similaires de téléchargements ont été observées pendant des périodes de troubles politiques ou de restrictions d’accès au net.

Ces précédents montrent que la technologie mesh Bluetooth peut réellement servir de soupape quand les canaux classiques sont fermés. Mais elle a aussi ses limites : elle dépend fortement de la densité d’utilisateurs et ne fonctionne pas sur de très longues distances sans une chaîne ininterrompue de relais.

Les autorités face à cette nouvelle menace numérique

Du côté du pouvoir, la réaction reste pour l’instant mesurée. Officiellement, toute mesure de restriction vise à préserver l’ordre public et à lutter contre les fausses informations. Mais l’annonce récente de restrictions sur l’importation de kits Starlink (le service satellite d’Elon Musk) laisse penser que les autorités cherchent à limiter les alternatives à l’infrastructure internet classique.

Si Bitchat continue de gagner du terrain, il est probable que de nouvelles stratégies soient mises en place pour en réduire l’efficacité : brouillage Bluetooth localisé, interdiction de l’application dans les stores, ou même campagnes de désinformation sur ses faiblesses supposées.

Quels enseignements pour l’avenir de la communication libre ?

Cette soudaine popularité en Ouganda illustre un phénomène plus large : dans un monde où les gouvernements maîtrisent de mieux en mieux les interrupteurs numériques, les citoyens se tournent vers des solutions décentralisées et résilientes. Jack Dorsey, avec son parcours entre finance décentralisée (Bitcoin) et réseaux sociaux ouverts, incarne cette quête d’autonomie technologique.

Mais la technologie seule ne suffit pas. Pour que Bitchat devienne vraiment utile lors d’un blackout, il faut une adoption massive et préalable, une bonne compréhension de son fonctionnement et une stratégie claire de diffusion des informations critiques. Sans cela, le réseau risque de rester trop clairsemé pour être efficace.

En attendant le jour J, les téléchargements continuent d’affluer. Et avec eux, l’espoir que la voix des citoyens puisse continuer à circuler, même quand on essaie de la faire taire.

Ce cas ougandais pourrait bien marquer un tournant dans l’utilisation des outils mesh pour la défense des droits numériques. Reste à voir si cette petite application née d’un week-end de code tiendra ses promesses face aux enjeux d’une élection nationale sous haute tension.

Et vous, seriez-vous prêt à installer une app comme celle-ci si votre pays annonçait une coupure internet avant un scrutin important ? La question mérite d’être posée, car les réponses techniques d’aujourd’hui pourraient bien devenir les réflexes démocratiques de demain.

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