Imaginez une femme qui, malgré des années passées en prison, continue de défier un régime autoritaire au péril de sa vie. Une voix qui refuse de se taire, même face à la répression la plus brutale. C’est le parcours de Narges Mohammadi, lauréate du prix Nobel de la paix, dont le silence soudain inquiète profondément ses proches et ses soutiens à travers le monde.
Une Arrestation Brutale Lors D’une Cérémonie Commémorative
Les faits se sont déroulés à la fin de la semaine dernière, dans la ville de Mashad, à l’est de l’Iran. Narges Mohammadi participait à une cérémonie en hommage à un avocat connu pour avoir défendu des manifestants. Ce défenseur des droits, Khosrow Alikordi, avait été retrouvé mort au début du mois de décembre, dans des circonstances qui soulèvent de graves interrogations.
Durant cet hommage, la militante a pris la parole. Des images circulent montrant une femme sans voile obligatoire, grimpée sur une voiture, s’adressant à une foule qui scande des slogans hostiles aux autorités. Ce geste de défi n’a pas tardé à entraîner une réaction immédiate des forces de l’ordre.
Selon les informations disponibles, l’arrestation a été particulièrement violente. Plus de cinquante personnes pourraient avoir été interpellées ce jour-là, bien que les chiffres officiels parlent de trente-huit arrestations lors de la cérémonie elle-même.
Qui Était Khosrow Alikordi ?
Khosrow Alikordi, âgé de 45 ans, était un avocat engagé. Il avait notamment représenté des personnes arrêtées lors de la vague de contestation de 2022, ce mouvement massif qui avait secoué l’Iran après la mort de Mahsa Amini. Son engagement lui avait valu une reconnaissance parmi les défenseurs des droits humains.
Son corps a été découvert le 5 décembre. Depuis, des organisations de défense des droits exigent une enquête indépendante. Certaines voix, comme celle d’ONG basées à l’étranger, évoquent même la possibilité d’un meurtre orchestré par l’État, tant les soupçons sont lourds.
La cérémonie organisée en sa mémoire était donc un acte de résistance en soi. Y participer, c’était affirmer que la lutte pour la justice ne s’arrête pas, même quand ceux qui la portent disparaissent dans des conditions troubles.
Un Silence Inquiétant Depuis L’arrestation
Depuis son interpellation, Narges Mohammadi n’a donné aucun signe de vie. Pas un appel téléphonique, pas un message. Seules quelques personnes arrêtées en même temps qu’elle ont pu contacter leurs familles, et encore, en nombre limité.
Son comité de soutien a publié un communiqué exprimant une profonde inquiétude. Il craint pour son bien-être physique et psychologique. La militante, âgée de 53 ans, souffre notamment de problèmes pulmonaires qui avaient justifié une permission de sortie temporaire en décembre 2024.
Cette permission avait été accordée pour raisons médicales. Elle représentait un rare moment de répit après des années d’incarcération presque continue depuis novembre 2021. Retourner derrière les barreaux dans ces conditions soulève des questions sérieuses sur son état de santé actuel.
« Seules un nombre limité de personnes interpellées ont pu contacter leurs familles »
Cette phrase résume l’opacité qui entoure ces arrestations. Dans un système où les détenus politiques sont souvent isolés, ce silence prolongé devient une source d’angoisse supplémentaire pour les proches.
Des Accusations Liées À La Sécurité Nationale
Le dossier a été transmis au procureur révolutionnaire de Mashad. Cela signifie que les charges pourraient être particulièrement graves. Les autorités parlent de discours provocateurs ayant incité la foule à perturber l’ordre public et à scander des slogans contraires aux normes établies.
Narges Mohammadi n’est pas la seule visée. Sepideh Gholian, une autre militante connue, a également été arrêtée lors de la même cérémonie. Le frère de l’avocat décédé, Javad Alikordi, a été interpellé peu après.
Ces accusations de sécurité nationale sont souvent utilisées pour justifier des peines lourdes contre les opposants. Elles permettent de contourner certaines procédures et d’allonger les détentions préventives sans véritable contrôle.
Les autorités ont qualifié les interventions de « provocateurs » et accusé les participants d’avoir troublé l’ordre public.
Cette qualification montre à quel point toute expression critique peut être criminalisée. Prononcer un discours lors d’un hommage devient un acte susceptible de menacer la sécurité de l’État.
Le Parcours D’une Combattante Infatigable
Narges Mohammadi n’en est pas à sa première incarcération. Arrêtée pour la dernière fois en novembre 2021, elle a passé la majeure partie des dernières années en prison. Son engagement pour les droits des femmes et contre la peine de mort lui a valu une reconnaissance internationale.
En 2023, elle reçoit le prix Nobel de la paix alors qu’elle est toujours détenue. Un symbole fort qui met en lumière la répression subie par celles et ceux qui osent défier le pouvoir en place.
Malgré les conditions difficiles, elle a continué à faire entendre sa voix depuis sa cellule, dénonçant les violations des droits humains. Sa détermination force l’admiration, mais elle expose aussi à des représailles constantes.
Sa santé fragile ajoute une dimension tragique à son combat. Les problèmes pulmonaires, mais aussi d’autres affections, nécessitent des soins que la prison rend difficiles à obtenir. Chaque nouvelle arrestation fait craindre une dégradation irréversible.
Un Appel À La Libération Immédiate
Le comité de soutien de Narges Mohammadi ne se contente pas d’exprimer son inquiétude. Il lance un appel clair et ferme : la libération immédiate et inconditionnelle de la militante et de toutes les personnes arrêtées lors de cette cérémonie.
Cet appel s’adresse directement aux autorités iraniennes. Il rappelle que priver quelqu’un de contact avec l’extérieur, surtout dans un état de santé fragile, constitue une forme de pression supplémentaire.
Plus largement, cette demande s’inscrit dans une longue série d’exigences portées par la communauté internationale. Les défenseurs des droits humains appellent régulièrement à la fin de la répression contre les voix dissidentes.
« Nous appelons à leur libération immédiate et inconditionnelle »
Ces mots résonnent comme un cri d’alarme. Ils rappellent que derrière chaque arrestation, il y a une histoire humaine, une famille dans l’angoisse, une société qui aspire à plus de liberté.
Les Conséquences D’un Geste De Défi
Apparaître sans voile en public reste un acte hautement symbolique en Iran. C’est un refus direct d’une règle imposée aux femmes depuis la révolution de 1979. Pour Narges Mohammadi, ce choix n’est pas anodin : il s’inscrit dans son combat plus large pour l’égalité et la liberté individuelle.
Mais ce geste a un prix. Il attire immédiatement l’attention des autorités et justifie, à leurs yeux, une intervention musclée. L’arrestation violente décrite par ses soutiens illustre la tolérance zéro face à toute forme de désobéissance visible.
La foule présente ce jour-là, en scandant des slogans critiques, a participé à ce moment de défi collectif. La réponse des autorités montre à quel point ces rassemblements, même pacifiques et commémoratifs, sont perçus comme une menace.
Une Inquiétude Partagée Au-Delà Des Frontières
L’absence de nouvelles de Narges Mohammadi ne laisse pas indifférent. Partout dans le monde, ceux qui suivent le combat pour les droits humains en Iran retiennent leur souffle. Chaque jour sans information renforce le sentiment d’impuissance face à un système opaque.
Les organisations internationales, les gouvernements démocratiques, les citoyens engagés : tous attendent un signe, une preuve que la militante est en vie et traitée correctement. Ce silence prolongé devient un sujet de mobilisation.
Car au-delà du cas individuel, c’est tout un modèle de répression qui est mis en lumière. Arrêter des dizaines de personnes lors d’un hommage, couper les contacts avec l’extérieur, brandir des accusations graves : ces pratiques sont malheureusement récurrentes.
Le prix Nobel décerné à Narges Mohammadi avait pourtant placé l’Iran sous les projecteurs. Il avait rappelé au monde l’existence de ces prisonnières et prisonniers d’opinion. Aujourd’hui, cette nouvelle arrestation semble défier directement cette reconnaissance internationale.
Vers Quelle Issue ?
Personne ne sait ce qui attend Narges Mohammadi dans les jours qui viennent. Une nouvelle condamnation ? Une détention prolongée sans procès ? Ou, comme par le passé, une permission pour raisons médicales qui viendrait apaiser temporairement les tensions ?
Ce qui est certain, c’est que son combat ne s’arrêtera pas. Même privée de liberté, sa voix continue de porter, à travers ses écrits passés, ses déclarations antérieures, le soutien qu’elle reçoit.
Et tant que des femmes et des hommes continueront de se lever pour dire non à l’injustice, des cérémonies comme celle de Mashad auront lieu. Des voix s’élèveront, avec ou sans voile, avec ou sans peur.
En attendant des nouvelles, l’inquiétude reste entière. Mais elle s’accompagne aussi d’une immense admiration pour cette femme qui incarne, plus que jamais, le courage face à l’arbitraire.
Le silence autour de Narges Mohammadi nous rappelle que la lutte pour les droits humains est loin d’être terminée. Chaque voix réduite au silence est une raison supplémentaire de continuer à parler haut et fort.
Espérons que ce silence sera bientôt brisé par une bonne nouvelle : la libération de la militante et de ses compagnons d’infortune. En attendant, le monde observe, attentif et solidaire.









