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Soudan : Londres Sanctionne le Numéro 2 des FSR pour Atrocités

Le Royaume-Uni vient de frapper fort : le frère d’Hemedti, numéro 2 des FSR, est désormais interdit de territoire britannique et ses avoirs gelés pour « viols systématiques » et « exécutions de masse ». Mais pourquoi ces sanctions arrivent-elles maintenant, et surtout… pourquoi Hemedti lui-même échappe-t-il encore à la liste ? La réponse risque de vous surprendre.

Imaginez un pays où la famine est utilisée comme une arme, où le viol est ordonné méthodiquement et où des villages entiers disparaissent en quelques heures. Ce n’est pas un film d’horreur. C’est le Soudan, aujourd’hui, en décembre 2025.

Ce vendredi, le Royaume-Uni a décidé de ne plus seulement regarder. Londres a annoncé des sanctions ciblées contre quatre hauts responsables des Forces de soutien rapide (FSR), dont le numéro deux du mouvement paramilitaire : Abdelrahim Hamdane Daglo, frère cadet du célèbre Mohamed Hamdane Daglo, plus connu sous le nom d’Hemedti.

Des sanctions qui frappent au cœur du commandement des FSR

Le message est clair et sans appel. Yvette Cooper, la ministre britannique des Affaires étrangères, l’a dit sans détour : « Les sanctions imposées aujourd’hui frappent directement ceux qui ont du sang sur les mains. » Gel des avoirs, interdiction de territoire britannique : les quatre hommes visés ne pourront plus poser un pied au Royaume-Uni ni toucher à leurs éventuels comptes outre-Manche.

Parmi eux, Abdelrahim Daglo occupe une place particulière. Frère du chef suprême des FSR, il est considéré comme l’un des principaux exécutants sur le terrain. L’Union européenne l’avait déjà sanctionné en novembre. Le Royaume-Uni emboîte donc le pas et renforce la pression internationale.

Des accusations effroyables et documentées

Les motifs invoqués par Londres sont glaçants. Exécutions de masse, utilisation délibérée de la famine pour affaiblir les populations, et surtout emploi « systématique et prémédité » du viol comme arme de guerre. Ces mots ne sont pas lancés à la légère. Ils reposent sur des rapports d’ONG, de survivants et d’enquêtes internationales qui s’accumulent depuis plus de deux ans.

Dans la région du Darfour, particulièrement à El-Facher, capitale du Darfour-Nord tombée fin octobre aux mains des FSR, les témoignages se multiplient. Des familles entières massacrées, des femmes et jeunes filles enlevées, violées, parfois tuées ensuite. Des quartiers entiers rasés. Des survivants parlent d’une volonté claire d’effacer certaines communautés ethniques.

« Les preuves accablantes de ces crimes odieux ne peuvent et ne resteront pas impunies »

Yvette Cooper, ministre britannique des Affaires étrangères

Qui sont les quatre hommes désormais dans le viseur britannique ?

Outre Abdelrahim Hamdane Daglo, trois autres commandants des FSR sont touchés :

  • Le responsable des opérations au Darfour-Nord, directement impliqué dans les exactions à El-Facher
  • Deux autres officiers supérieurs accusés d’avoir supervisé des unités responsables de massacres et de violences sexuelles

Tous partageaient jusqu’à présent une relative impunité. Leur présence sur le sol européen ou britannique n’était pas impossible. C’est terminé.

Un conflit qui n’en finit pas de s’enfoncer dans l’horreur

Pour comprendre l’ampleur du drame, il faut revenir au 15 avril 2023. Ce jour-là, les deux hommes forts du Soudan, le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée régulière, et son ancien adjoint Mohamed Hamdane Daglo « Hemedti », font basculer le pays dans la guerre ouverte.

Ce qui avait commencé comme une lutte de pouvoir après le coup d’État de 2021 s’est transformé en conflit total. Deux ans et demi plus tard, le bilan est apocalyptique : des dizaines de milliers de morts (certaines estimations parlent de plus de 150 000), près de 12 millions de déplacés et réfugiés, soit plus d’un Soudanais sur quatre forcé de fuir son foyer.

Et depuis la chute d’El-Facher fin octobre, la situation a franchi un nouveau palier d’horreur. Dernier bastion de l’armée au Darfour, sa prise par les FSR a ouvert la porte à une vague de violences ethniques d’une ampleur rarement vue, même dans cette région martyre.

Des sanctions… mais jusqu’où ?

La réaction ne s’est pas fait attendre du côté des alliés de l’armée régulière. Minni Minawi, gouverneur du Darfour et figure historique de la rébellion désormais alignée sur Khartoum, a salué ces sanctions britanniques. Pour lui, c’est « une étape importante » vers la responsabilisation des auteurs de crimes.

Mais il a immédiatement ajouté une réserve lourde de sens : ces mesures restent « incomplètes » tant que le véritable décisionnaire, Mohamed Hamdane Daglo lui-même, n’est pas visé. « Hemedti est l’architecte direct du système de violence », a-t-il asséné.

Une question brûlante plane donc : pourquoi le chef suprême des FSR échappe-t-il encore aux sanctions individuelles britanniques et européennes ? Est-ce une question de preuves ? De calculs diplomatiques ? Ou la crainte de fermer totalement la porte à une négociation future ?

Une pression internationale qui s’organise lentement

Le Royaume-Uni n’est pas seul. Quelques jours plus tôt, les États-Unis annonçaient des sanctions contre un réseau, principalement colombien, recrutant des mercenaires pour renforcer les rangs des FSR. Un signe que Washington resserre aussi l’étau, même si de manière indirecte.

Côté européen, la décision de novembre contre Abdelrahim Daglo montre que la coordination commence à porter ses fruits. Reste à savoir si ces mesures individuelles auront un réel impact sur le terrain, où les FSR continuent leur progression militaire.

Et l’aide humanitaire dans tout ça ?

En parallèle des sanctions, Londres a annoncé débloquer 21 millions de livres supplémentaires (environ 24 millions d’euros) pour l’aide d’urgence. Depuis janvier 2025, le Royaume-Uni a ainsi mobilisé 146 millions de livres pour tenter d’endiguer la catastrophe humanitaire.

Un chiffre impressionnant… qui reste dérisoire face à l’ampleur des besoins. Famine, épidémies, camps de déplacés surpeuplés : le Soudan est au bord de l’effondrement total. Et chaque semaine de guerre aggrave la situation.

Au-delà des sanctions et des millions, une question demeure : combien de temps le monde continuera-t-il à regarder le Soudan s’enfoncer sans intervenir plus fermement ? Car derrière chaque communiqué, chaque liste de noms sanctionnés, il y a des milliers de vies brisées qui attendent autre chose que des mots.

Le Royaume-Uni a envoyé un signal fort ce vendredi. Reste à savoir si d’autres suivront. Et surtout, si cela suffira à arrêter l’engrenage de la terreur qui broie le Soudan depuis trop longtemps.

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