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Le Sport : Nouvelle Clé pour Insérer 100 000 Jeunes d’Ici 2030

Et si le terrain de sport devenait le meilleur CV pour des milliers de jeunes sans diplôme ? Un plan national veut mobiliser 20 000 clubs et 1 000 entreprises pour changer leur destin d’ici 2030. Voici comment ça marche…

Imaginez un jeune de 19 ans qui a quitté l’école sans diplôme, passe ses journées entre canapé et petits jobs précaires, et qui, un beau matin, pousse la porte d’un club de foot ou de boxe du quartier. Six mois plus tard, il signe son premier CDI. Utopie ? Non, c’est exactement l’objectif que s’est fixé un collectif d’acteurs engagés avec le « Plan Jeune par le Sport » présenté ce mercredi à Paris.

Derrière cette initiative, une conviction simple mais puissante : le sport forge des compétences que les entreprises recherchent désespérément – persévérance, esprit d’équipe, gestion du stress, sens de l’effort – et qu’aucun CV classique ne sait valoriser chez les jeunes les plus éloignés de l’emploi.

Un constat alarmant qui appelle une réponse massive

Les chiffres parlent d’eux-mêmes et font froid dans le dos. Près de 1,5 million de jeunes Français âgés de 16 à 25 ans ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation. Chaque année, 400 000 adolescents décrochent dès la première année de lycée professionnel. Ajoutez à cela les centaines de milliers suivis par l’aide sociale à l’enfance. Autant de parcours brisés avant même d’avoir vraiment commencé.

Pendant ce temps, les entreprises peinent à recruter sur des postes pourtant accessibles, faute de candidats présentant les « bonnes attitudes ». Le paradoxe est criant : d’un côté des jeunes convaincus qu’ils ne valent rien sur le marché du travail, de l’autre des employeurs qui cherchent avant tout des personnalités solides et motivées.

C’est là que le sport entre en jeu, comme un formidable révélateur de talents cachés.

L’ambition chiffrée : 100 000 jeunes insérés d’ici 2030

Le plan présenté ce mercredi ne fait pas dans la demi-mesure. L’objectif est clair : accompagner 100 000 jeunes en situation de décrochage vers un emploi durable ou une formation qualifiante d’ici la fin de la décennie. Pour y parvenir, les promoteurs misent sur une mobilisation sans précédent :

  • 20 000 clubs sportifs mobilisés sur tout le territoire
  • 5 000 coaches d’insertion formés spécifiquement
  • 1 000 entreprises engagées dans un recrutement « par les compétences douces »
  • Un fonds de dotation national capable de lever 15 à 20 millions d’euros par an

Autant dire une véritable « épopée de la jeunesse par le sport », selon les mots des initiateurs.

Le rôle central des coaches d’insertion

Ils sont le cœur battant du dispositif. Aujourd’hui, on compte environ 700 coaches d’insertion par le sport en France. L’objectif ? Passer à plusieurs milliers en formant 500 nouveaux profils dès l’année prochaine.

Ces éducateurs pas comme les autres ont une double mission : aller chercher les jeunes là où ils sont (quartiers, missions locales, foyers éducatifs), les accueillir au club sans jugement, puis construire avec eux un parcours mêlant pratique sportive régulière et accompagnement socio-professionnel.

« On ne leur demande pas leur CV à l’entrée, on leur demande juste d’enfiler des baskets et de venir s’entraîner. Le reste vient tout seul. »

Un coach d’insertion expérimenté

Car une fois la confiance installée, les progrès sont rapides : ponctualité, respect des horaires, capacité à travailler en groupe, gestion de l’échec… Toutes ces soft skills si précieuses en entreprise se développent naturellement sur un terrain de sport.

Les entreprises au cœur du changement

L’une des grandes originalités du plan réside dans la mobilisation massive du monde économique. Les promoteurs veulent faire signer à des milliers d’entreprises un « manifeste national » par lequel elles s’engagent à recruter autrement.

Un récent sondage montre que l’opinion est prête : 71 % des Français estiment que les entreprises devraient se rapprocher des clubs sportifs pour dénicher des profils motivés ayant développé des qualités humaines grâce au sport.

Concrètement, cela peut prendre plusieurs formes :

  1. Stages de découverte dans l’entreprise couplés à la pratique sportive
  2. Parrainage de jeunes par des salariés volontaires
  3. Recrutement direct à l’issue d’un parcours d’insertion validé
  4. Mise en place de « passeports compétences sport » reconnus par les RH

Des géants du CAC 40 aux PME locales, tout le monde est invité à jouer le jeu.

Un fonds de dotation pour financer l’ambition

Pour porter cette dynamique, un fonds de dotation national « Inclusion par le sport » verra le jour dès janvier 2026, piloté en partenariat avec France Travail et le mouvement olympique et sportif.

L’objectif affiché : collecter entre 15 et 20 millions d’euros annuels grâce aux dons d’entreprises et au mécénat. Cet argent servira à financer les parcours individualisés, former les coaches et soutenir les clubs engagés.

Une goutte d’eau ? Peut-être. Mais une goutte capable de déclencher un raz-de-marée si la mobilisation est au rendez-vous.

Des initiatives concrètes déjà sur le terrain

Le plan ne part pas de zéro. De nombreuses associations et clubs prouvent depuis des années l’efficacité du modèle. Sport dans la Ville, Rebonds !, les programmes de boxe éducative, les clubs de rugby en zones rurales… Les exemples ne manquent pas.

Au-delà, certaines fédérations se sont déjà lancées :

  • La Fédération Française de Voile avec ses actions en quartiers prioritaires
  • La boxeuse Sarah Ourahmoune et son programme « Les Puncheuses » pour l’empowerment féminin
  • Des clubs de rugby qui forment des jeunes aux métiers du sport et de la sécurité

Le plan veut maintenant passer à l’échelle nationale en structurant et démultipliant ces initiatives.

Un focus particulier sur les jeunes femmes

Parmi les 18 propositions, l’une vise spécifiquement à déployer un grand programme national pour les jeunes femmes, en s’appuyant sur l’expérience de Sarah Ourahmoune. Car si le sport est un formidable ascenseur social, il reste encore trop souvent masculin dans les quartiers.

Objectif : permettre à des milliers de jeunes filles de prendre confiance en elles grâce à la pratique sportive, puis de transformer cette confiance en projet professionnel.

Vers 20 cités du sport et de l’inclusion

Autre mesure phare : la création de vingt « cités du sport et inclusion » pilotes à travers la France. Ces lieux hybrides mêleront infrastructures sportives, espaces de formation, bureaux France Travail et entreprises partenaires.

L’idée ? Créer des écosystèmes locaux où le jeune peut pratiquer son sport, suivre des ateliers CV, rencontrer des recruteurs et même passer des entretiens sur place. Un guichet unique du rebond par le sport.

Une gouvernance décentralisée pour coller aux réalités locales

Enfin, le plan prévoit une organisation territoriale forte : chaque département aura sa gouvernance locale associant préfecture, France Travail, mouvement sportif et entreprises. Parce que les solutions miracles venues d’en haut n’existent pas, que chaque territoire a ses spécificités.

Cette approche « bottom-up » est sans doute la clé de la réussite : faire confiance aux acteurs de terrain tout en leur donnant les moyens d’agir à grande échelle.

Et si c’était enfin la bonne ?

Ces dernières années, les dispositifs d’insertion se sont multipliés : contrats aidés, garance jeunes, missions de service civique… Avec des résultats souvent décevants. Le sport offre une approche radicalement différente : partir des envies et des forces du jeune plutôt que de ses lacunes.

Quand un jeune reprend goût à l’effort sur un ring de boxe ou un terrain de rugby, quand il se surprend à arriver à l’heure tous les matins pour l’entraînement, quand il reçoit enfin des félicitations sincères d’un coach qui croit en lui… quelque chose se passe. Une étincelle. Et cette étincelle peut devenir un incendie.

Alors oui, 100 000 jeunes d’ici 2030, cela paraît énorme. Mais quand on voit le enthousiasme des clubs, la bonne volonté des entreprises et surtout la détermination de ces milliers de jeunes qui n’attendent qu’une chose – qu’on leur tende enfin la main –, on se dit que c’est possible.

Le sport a déjà prouvé qu’il pouvait déplacer des montagnes lors des Jeux olympiques. Et s’il parvenait cette fois à déplacer des destins ?

À suivre de très près.

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